SOMMAIRE DU LIVRE CINQUIEME. On envoie des ambassadeurs à Athenes pour recueillir les loix de Solon. Au retour de ces ambassadeurs, on choisit parmi les patriciens dix commissaires ou décemvirs qui gouvernent souverainement. Appius, chef du college des décemvirs, devient suspect à ses collegues. Pour empêcher qu'il ne soit continué dans le décemvirat, ils le déclarent président de l'assemblée où se devoit faire la seconde élection. Mais il se propose luimême pour premier décemvir, et le peuple en reçoit la proposition avec de grands éloges suivis de la plupart des suffrages. Ces nouveaux magistrats veulent rendre leur domination perpétuelle. Malgré l'opposition des principaux sénateurs, ils viennent à bout de se faire donner le commandement des armées pour marcher contre les Eques et les Sabins. Les Romains refusent de vaincre de peur d'augmenter leur puissance. La dureté de leur domination, leur orgueil, leurs injustices, mais sur-tout la passion d'Appius pour la jeune Virginie, sont cause de leur ruine. Virginius pere de cette fille infortunée, s'étant vu réduit à la triste nécessité de lui enfoncer un poignard f dans le sein pour la dérober à la brutalité du décemvir, les armées se soulevent et reviennent à Rome, où elles obtiennent la cassation du décemvirat, et la punition des décemvirs. On rétablit le consulat et le tribunat, et on rend au peuple tous ses privileges. LIVRE CINQUIEME. Nous avons vu, dans le volume précédent, Rome jalouse de sa liberté, se défaire de ses rois; le gouvernement monarchique se tourner en républicain sous l'autorité de deux consuls; la noblesse et le peuple qui composoient cette république naissante, par le même amour de la liberté, depuis divisés et prêts à se séparer; le tribunat qui n'avoit été établi que comme le gage de leur réunion, devenir le fondement de nouvelles divisions; et ces magistrats plébéiens, artisans perpétuels de discorde, poursuivre tout ce que le sénat avoit de plus grand et de plus illustre, et s'attacher sur-tout avec opiniâtreté à la ruine des consuls, dès qu'ils sortoient de charge: en sorte qu'un consulaire devoit se regarder comme la victime du peuple, et l'objet de la fureur des tribuns. Tel étoit l'état de Rome, où l'on faisoit alors un crime aux souverains magistrats de gouverner An de Rome 299. An de Rome 299. selon les anciennes loix. Cependant la disgrace de Romilius et de Veturius dont nous venons de parler, n'épouvanta point leurs successeurs. Sp. Tarpeius et* A. Haterius n'en montrerent pas moins de fermeté. Ces généreux consuls déclarerent hautement au peuple qu'il pourroit bien les condamner à leur tour quand ils seroient sortis de charge, ou à une amende, où à des peines encore plus injustes; mais que ces vexations, et la perte même de leur vie, ne les obligeroient jamais à consentir à la publication de la loi agraria. Tant de fermeté et ce concert unanime de tous les sénateurs ébranla les tribuns. Les deux partis également fatigués de ces divisions contínuelles, semblerent se rapprocher. On fut quelque temps sans entendre parler du partage des terres. L'animosité parut cessée, ou du moins suspendue. Mais le peuple, toujours inquiet, ne fit que changer de vues et d'objet il : * A. Terminius, selon Denis d'Halicarnasse. An revint à la loi terentilla, et demanda Le sénat ne s'éloignoit pas de cette proposition; mais quand il fut question de nommer les législateurs, il prétendit qu'ils devoient être tous tirés de son corps; et le peuple au contraire demandoit qu'ayant un égal intérêt dans une affaire aussi importante, il fût admis par ses députés à partager un si noble emploi. Il envoya au sénat le tribun Siccius et ses collegues pour soutenir ses prétentions. L'affaire y fut agitée avec beaucoup de chaleur ; les avis se trouverent partagés. Mais rien ne surprit tant que celui de Romilius, ce consulaire que le peuple venoit de condam |