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·lection des tribuns. A. Virginius, pere
de l'infortunée Virginie; Numitorius,
son oncle, et Icilius, à qui elle avoit
été promise, furent élus les premiers.
On leur donna pour collegues C. Sici-
nius, M. Duillius, M. Titinius, M.
Pomponius, C. Apronius, P. Villius et
C. Oppius. On créa ensuite un entre-
roi, qui nomma pour consuls, suivant
les vœux du peuple, L. Valerius Poti-
tus, et M. Horatius Barbatus. C'étoit
une récompense due aux soins qu'ils
avoient pris pour le rétablissement de
la tranquillité publique.

Leur consulat fut tout populaire, et
les plébéiens en obtinrent ce qu'ils n'eus-
sent osé espérer de leurs tribuns mê-
mes. Nous avons vu que les sénateurs
et les patriciens ne prétendoient point
être soumis aux ordonnances du peu-
ple, quand l'assemblée étoit convoquée
par tribus. Le peuple au contraire sou-
tenoit que la souveraineté de l'état ré-
sidant essentiellement dans toute l'as-
semblée générale du peuple romain

An de Rome

304.

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tous les citoyens, de quelque rang qu'ils

de Rome fussent, devoient y être soumis, puis

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qu'ils avoient droit d'y donner leurs suffrages chacun dans leur tribu. Cette dispute se renouvelloit souvent entre les deux ordres de la république. Les deux consuls, se prévalant de l'autorité absolue qu'ils avoient alors dans le gouvernement, firent décider cette grande affaire en faveur du peuple; et par un décret rendu par les comices des centuries, il fut déclaré, que toute ordonnance émanée des comices par tribus tiendroit lieu de loi à l'égard de tous les citoyens.

On confirma de nouveau la loi Valeria, touchant les appels devant l'assemblée du peuple et on la fortifia d'une autre, qui défendoit d'établir à l'avenir aucune magistrature, sans qu'il y eût appel de ses ordonnances. Les consuls ajouterent à cette loi un réglement qui prescrivoit : Que les sénatusconsultes qui étoient souvent supprimés ou altérés par les consuls, seroient dans

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la suite remis aux édiles, et conservés dans le temple de Cérès. La plupart des de Rome sénateurs ne souscrivirent qu'avec chagrin à ces différentes ordonnances. Ils voyoient avec douleur que deux patriciens et deux consuls, plus plébéiens même que les tribuns du peuple, sous prétexte d'assurer sa liberté, ruinoient absolument l'autorité du sénat. Mais les plus équitables et les moins ambitieux de ce corps, instruits par la conduite tyrannique des décemvirş, aimoient mieux qu'on confiât au peuple le dépôt et la garde de la liberté publique, que d'en laisser le soin aux grands, qui, par leur autorité, en pouvoient abuser.

La république, par ces différens réglemens, et par le rétablissement de ses anciens magistrats, ayant repris sa premiere forme de gouvernement, il ne restoit plus, pour ainsi dire, du décemvirat que la personne même des décemvirs. On sait combien ils étoient odieux à la multitude. * Virginius crut

* D. Hal. 1. 11, pag. 726.

An

de Rome

554.

qu'il étoit temps alors de les poursuivre, et en qualité de tribun du peuple, il intenta action contre Appius, et se rendit son accusateur. Appius parut dans l'assemblée couvert d'habits noirs, et conformes à l'état présent de sa fortune. Le peuple vit avec plaisir ce superbe décemvir avec une contenance triste et abattue dans la même place où peu de jours auparavant il paroissoit environné de ses satellites, et menaçant fièrement la multitude par l'appareil de ses licteurs armés de leurs haches.

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Virginius prenant la parole, et l'adressant au peuple : « J'accuse, Ro« mains, dit-il, un homme qui s'est fait le tyran de sa patrie; qui vous « a contraints de recourir aux armes « pour défendre votre liberté; qui, pour « satisfaire ses infâmes voluptés, n'a

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point eu de honte d'arracher une « fille romaine de condition libre, d'en«<tre les bras de son pere, pour la livrer

* Tit. Liv. lib. 3, cap. 56 et 57. Diod. l. 12.

« à l'infâme ministre de ses plaisirs,

à

An de Rome

« et qui, par un jugement également "304. injuste et cruel, a réduit un pere <<< donner la mort à sa fille

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pour sauver « son honneur. » Puis en se tournant vers Appius, il lui dit, que sans s'arrêter au détail de tous ses crimes, dont le moindre méritoit les plus grands supplices, il lui demandoit seulement raison du jugement qu'il avoit rendu contre Virginie. « Pourquoi, lui dit-il, avez« vous refusé à une fille de condition << libre la provision de la liberté, du«rant qu'elle lui étoit contestée ? Si << vous ne me pouvez répondre, j'or<<< donne que sur - le- champ on vous «< conduise en prison.

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Appius représenta qu'on n'avoit jamais refusé aux accusés les délais nécessaires pour préparer leurs défenses; qu'il étoit inoui dans la république qu'on eût arrêté aucun citoyen avant qu'il eût été entendu en pleine assemblée ; et que si le tribun, contre toutes les loix, prétendoit le faire arrêter, il

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