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béiens, et qu'ils auroient été également soumis à l'autorité des consuls.

Quintius, pour tenir le peuple en respect, publioit encore exprès qu'à son retour il ne convoqueroit point d'assemblée pour élire de nouveaux consuls et qu'il étoit résolu de nommer un dictateur, afin que les séditieux apprissent, par leur châtiment, que toutes les harangues des tribuns ne seroient pas capables de les mettre à couvert de la puissance et des jugemens sans appel du souverain magistrat.

Le peuple, qui jusqu'alors n'avoit fait la guerre que contre des ennemis voisins de Rome, accoutumé à revenir dans sa maison à la fin de chaque campagne, fut consterné d'un dessein qui l'exposoit à passer l'hiver sous des tentes. Les tribuns n'étoient pas moins alarmés par la crainte d'une assemblée hors de Rome, où il se pouvoit prendre des résolutions contraires à leurs intérêts. Les uns et les autres intimidés par la fermeté des consuls, eurent recours au sé

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nat les femmes et les enfans tout en larmes, conjurerent les principaux sénateurs d'adoucir Quintius, et d'obtenir de ce sévere magistrat que leurs maris et leurs peres pussent revenir chez eux à la fin de la campagne. L'affaire fut mise dans une espece de négociation. C'étoit le point où le consul, par cette sévérité affectée, mais nécessaire, avoit voulu amener les tribuns. Il se fit comme un traité provisionnel entre eux; Quintius promit de ne point armer et de ne point faire hiverner les troupes en campagne, s'il n'y étoit forcé par quelques nouvelles incursions des ennemis; et les tribuns, de leur côté, s'engagerent à ne faire au peuple aucune proposition touchant l'établissement des loix nouvelles.

Quintius, au lieu de faire la guerre, employa tout le temps de son consulat à rendre justice aux particuliers. Il écoutoit tout le monde avec bonté; il examinoit avec attention le droit des parties, et rendoit ensuite des jugemens

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si équitables, que le peuple, charmé de la douceur de son gouvernement, sembloit avoir oublié qu'il y eût des tribuns dans la république.

Malgré une conduite si pleine de modération et d'équité; Virginius, Volscius et les autres tribuns, employoient tous leurs soins pour se faire perpétuer dans le tribunat, sous prétexte que le peuple avoit besoin de leur zele et de leur capacité pour faire recevoir la proposition de Terentillus. Le sénat, qui prévoyoit les abus qui pouvoient s'ensuivre de cette magistrature perpétuelle, fit une ordonnance qui défendoit qu'aucun citoyen concourût dans les élections deux ans de suite pour la même charge. Mais, malgré une constitution si nécessaire pour la conservation de la liberté, ces tribuns, accoutumés à la douceur du commandement, firent tant de brigues, qu'on les continua dans le même emploi pour la troisieme fois. Le sénat, de Rome qui croyoit avoir tout à craindre de ces

esprits séditieux, sans avoir égard au

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décret qu'il venoit de rendre, vouloit de Rome de son côté continuer aussi Quintius dans le consulat, * mais ce grand homme s'y opposa hautement; il représenta avec beaucoup de gravité aux sénateurs le tort qu'ils se faisoient de vouloir violer eux-mêmes leurs propres ordonnances. Que rien ne marquoit davantage la foiblesse du gouvernement, que cette multitude de loix nouvelles qu'on proposoit tous les jours, et qu'on n'observoit pas. Que c'étoit par une conduite si inconstante qu'ils s'attiroient justement le mépris de la multitude. Le sénat, également touché de la sagesse et de la modération de Quintius, revint à son avis. On procéda à l'élection : Q. Fabius Vibulanus, et L. Cornelius Maluginensis, furent nommés consuls pour l'année suivante. A peine Quintius fut-il sorti de charge, qu'il retourna à sa campagne, pour y reprendre ses travaux et ses occupations ordinaires.

* Val. Max. 1. 4, cap. 1, art. 4.

* Après son départ, les amis de sa maison, et entre autres A. Cornelius et Q. Servilius, questeurs cette année, indignés de l'exil injuste de Ceson, citerent en jugement M. Volscius son accusateur, l'auteur et le ministre d'une si cruelle persécution. Ces deux questeurs, par le pouvoir attaché à leurs charges, convoquerent l'assemblée du peuple. Ils produisirent différens té moins, dont les uns déposoient avoir vu Ceson à l'armée le jour même que Volscius prétendoit qu'il avoit tué son frere dans Rome; d'autres rapportoient que ce frere de Volscius étoit mort d'une maladie de langueur, qui avoit duré quelques mois, et qu'il n'étoit point sorti de sa maison depuis qu'il étoit tombé malade. Ces faits et beaucoup d'autres étoient attestés par un si grand nombre de gens de bien, qu'on ne pouvoit plus douter de la malice et de la calomnie de Volscius; mais les tribuns,

* Tit. Liv. dec. 1, lib. 3, c. 24.

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