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collegues et complices de Volscius, arrêterent ces poursuites, sous prétexte qu'ils ne vouloient pas souffrir qu'on prît les voix sur aucune affaire, avant que le peuple eût donné ses suffrages au sujet des loix proposées. Le sénat se servit à son tour du même prétexte; et sitôt qu'on parloit des cinq commissaires, que les tribuns demandoient, il faisoit revivre l'affaire de Volscius. Le consulat de Fabius et de Cornelius se passa dans ces oppositions réciproques.

La guerre se ralluma sous celui de C. de Rome Nautius Rutilus et de L. Minutius leurs

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successeurs; les Sabins et les Eques renouvellerent leurs irruptions. * Nautius marcha contre les Sabins, les battit et entra sur leur territoire, où il mit tout à feu et à sang. Minutius n'eut pas un si heureux succès contre les Eques. Ce général timide, et qui songeoit moins à vaincre qu'à n'être pas vaincu, se laissa pousser par les ennemis dans les défilés,

* Tit. Liv, 1. 3, cap. 26.

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où il avoit à dos, à droite et à gauche, des montagnes qui couvroient à la vérité de Rome mais aussi qui l'empêchoient

son camp,

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d'en sortir. Ces lieux escarpés n'avoient qu'une issue; les Eques prévinrent les Romains et s'en emparerent. Ils s'y fortifierent ensuite de maniere qu'ils ne pouvoient être forcés à combattre : ils tiroient facilement leurs vivres et les fourrages par leurs derrieres, pendant que l'armée romaine, enfermée dans les détroits de ces montagnes, manquoit de tout. Quelques cavaliers, qui à la faveur des ténebres traverserent le camp ennemi, en porterent la nouvelle à Rome. Ils dirent que l'armée investie de tous côtés, et comme assiégée, seroit obligée, faute de vivres, de mettre les armes bas, si on ne lui donnoit un prompt secours. Quintius Fabius, gouverneur de la ville, dépêcha aussitôt un courier à l'autre consul, pour lui apprendre l'extrémité où se trouvoit son collegue. Nautius, ayant laissé son armée sous les ordres de ses lieutenans, partit secrettement, et se rendit

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A 11 de Rome

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en diligence à Rome. Il y arriva la nuit et après avoir conféré sur-le-champ avec les principaux du sénat, on convint qu'il falloit, dans cette occassion, avoir recours au remede dont on se servoit dans les plus grandes calamités, c'est-à-dire, à l'élection d'un dictateur. Le consul selon le droit attaché au consulat, nomma L. Quintius Cincinnatus, et il s'en retourna aussitôt avec la même diligence, se remettre à la tête de son armée. Le gouverneur de Rome envoya à Quintius le décret du consul: on trouva ce grand homme, comme la premiere fois, cultivant de ses propres mains son petit héritage. Les députés, en lui annonçant sa nouvelle dignité lui présenterent vingt-quatre licteurs armés de haches d'armes entrelacées dans leurs faisceaux, espece de gardes des anciens rois de Rome, dont les consuls avoient retenu une partie, mais qui ne portoient des haches d'armes dans la ville, que devant le seul dictateur. Le sénat ayant appris que Quintius ap

prochoit, lui envoya un bateau, dans ́lequel il passa le Tibre; ses trois enfans, ses amis et les premiers du sénat, furent le recevoir à la sortie du bateau, et le conduisirent jusqu'à sa maison.* Le dictateur nomma le lendemain, pour général de la cavalerie, L. Tarquitius, patricien d'une rare valeur, mais qui, pour n'avoir pas eu le moyen d'acheter et de nourrir un cheval, n'avoit encore servi que dans l'infanterie. Ainsi, toute l'espérance de la république se trouvoit renfermée dans un vieillard qu'on venoit de tirer de la charrue, et dans un fantassin, à qui on confioit le commandement général de la cavalerie.

Mais ces hommes, qui se faisoient honneur de la pauvreté, n'en montroient pas moins de hauteur et de courage dans le commandement. Le dictateur fit fermer les boutiques, et ordonna à tous les habitans qui étoient encore

* Tit. Liv. lib. 3, cap. 27.

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en âge de porter les armes, de se rende Rome dre avant le coucher du soleil dans le 245.

champ de Mars, chacun avec douze pieux, et des vivres pour cinq jours. Il se mit ensuite à la tête de ces troupes, et arriva avant le jour assez près du camp ennemi. * Il alla le reconnoître lui-même, autant que les ténebres le pouvoient permettre. Ses soldats, par son ordre, pousserent de grands cris, pour avertir le consul de l'arrivée du secours; ils se retrancherent, et fortifierent ces retranchemens par une palissade faite des pieux qu'ils avoient apportés de Rome, et ces retranchemens servoient en même temps à enfermer le camp ennemi. Le général des Eques appellé Gracchus Cloelius, entreprit malgré les ténebres, d'interrompre ce travail. Ses troupes s'avancerent, mais avec cette crainte et cette inquiétude que cause toujours la surprise et la nuit. Quintius, qui avoit prévu cette attaque,

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