ges, ne vouloit point de mal à la fœur de fon Maître il fentit donc qu'il devoit veiller à la fois fur la Reine, fur le Duc de Suffolk & fur lui-même. La Ducheffe de Valois & la Comteffe d'Angoulême trouvèrent des prétextes pour ne jamais perdre la Reine de vue; on lui perfuada qu'elle n'ofoit coucher feule, & la Baronne d'Aumont, fa Dame d'honneur, réclama comme un droit de fa place, celui de coucher dans sa chambre en l'abfence du Roi. La Reine prit ou feignit de prendre toute cette contrainte pour une étiquette dont fon rang la rendoit efclave. Varillas prétend que le Duc de Valois, non content de toutes ces précautions, prit encore celle de parler à Suffolk en particulier ; que dans cet entretien, joignant les menaces aux promeffes & aux prieres, il l'avertit de modérer fes defirs pendant la vie du Roi, l'affura qu'on lui permettroit d'époufer fa veuve; qu'on se chargeroit de faire fa paix avec le Roi d'Angletere, ou qu'on le dé dommageroit en France de ce qu'il pourroit perdre en renonçant à fa patrie. Varillas ajoute qu'après la mort de Louis XII, François tint exactement parole à Suffolk, contre l'avis de tout fon Confeil, qui craignoit le mécontentement du Roi d'Angleterre & les troubles que fa vengeance eût pu exciter dans le Royaume au commencement d'un nouveau regne. Varillas admire la franchise de ce procédé, qu'il pour roit bien avoir imaginé pour le plaifir de l'admirer; il eft peu vraifemblable que le Duc de Valois ait hafardé une démarche fi indécente, fi peu utile à ses projets, si injurieuse à la Reine, fi délicate même à l'égard Mém. de du Roi. Varillas eût mieux fait de Fleurang. s'en tenir au récit du Maréchal de Fleuranges, qui dit qu'après la mort de Louis XII. feulement, François I. dit à Suffolk: » Je connois vos fen» timens pour la Reine, & ceux de la Reine pour vous; fi le Roi d'An>gleterre mon frere, avec qui je veux entretenir alliance & amitié, les כל approuve, faites qu'il m'en écrive. Jufques-là promettez-moi de ne » rien entreprendre dont lui & moi » ayions lieu d'être mécontens. Je >> vous le promets, dit Suffolk, & je » confens que ma tête vous réponde » de ma conduite. A peine la crainte avoit elle fait ce ferment, que l'amour l'avoit violé. Trois jours après cette converfation, le Duc de Suffolk époufa fecretement la Reine; le Roi l'apprend, il mande Suffolk: » Vous fçavez, lui dit-il, à quoi vous vous êtes engagé, & vous fçavez » à quoi la justice m'engage. » Je le » fais, répond Suffolk en tremblant; כל mais fi vous connoiffez l'amour, → vous devez pardonner les fautes qu'il fait faire. Je ne vous pardon» ne ni ne vous condamne, reprit François, je vais écrire au Roi » d'Angleterre mon frere, votre fort dépend de lui. a Lorfque Henri Petr. de VIII. vit qu'il falloit faire trancher Angl. epift. la tête à fon favori ou le reconnoître pour fon beau-frere, il prit le parti de la clémence. Marie écrivit elle Cy même à fon frere qu'elle avoit forcé Lettre de la le Duc de Suffolk à recevoir sa main. Ducheffe de » Vous m'auriez refufé votre conHenri VIII. » fentement, lui dit-elle, vous m'acdu mois de corderez mon pardon. « Polydore Suffolck à Mars 1515 Virgile va jufqu'à dire que Henri VIII. deftinoit fa fœur à Suffolk avant que des intérêts politiques l'obligeaffent de la donner à Louis XII. & qu'il n'avoit fait fon Favori Duc, que dans l'intention d'en faire fon Beau-frere. Marie retourna auprès de Henri VIII. & l'Angleterre qui l'avoit vue partir Reine de France, la vit revenir Ducheffe de Suffolk, plus contente de l'heureufe médiocrité de ce fecond état, que de la fplendeur gênante du premier. Il lui refta de fa Couronne un douaire de foixante mille livres de rente bien payé quand la France & l'Angleterre étoient amies. Marie d'Angleterre mourut à trente-sept ans comme Anne de Bretagne. Tous les Hiftoriens conviennent que fi les charmes de cette nouvelle épouse contribuerent à confoler Louis XII.de la perte qu'il avoit faite, ils contribuèrent auffi à rejoindre plus promptement fes cendres aux cendres de fa premiere femme ; il ne vécut (a) que deux mois & demi avec Marie, parce qu'il employa trop ce tems à lui plaire. Outre qu'il avoit changé pour elle toute fa maniere de vivre, il avoit vouluft, dit Fleuranges, faire du gentil compaignon avecq Du Bellay. fa femme, mais il n'étoit plus homme pour ce faire, car de long-tems il étoit Fleuranges. fort malade. On a dit que, comme le pelican, il s'étoit facrifié pour le grande hift. falut des fiens, parce qu'il n'avoit confenti à ce mariage, qui devoit lui être fi fatal, que pour procurer la paix à fes peuples. Cette comparai (2) Brantôme prétend qu'après la mort de Louis XII. elle feignit une groffeffe, & voulut fuppofer un enfant, pour refter Reine & Régente; le Maréchal de Fleuranges croyable dit tout le contraire; » Monfieur d'Angouleme demanda à ladite Royne, fe pouvoit nommer Roi, à caufe qu'il ne favoit » fi elle eftoit enceinte ou non; fur quoi ladict » Dame lui fit réponse qu'oui, & qu'elle ne favoir » aultre Roi que lui : car elle ne penfoit avoir fruit ɔɔ au ventre, qui l'en peust empêcher. Mém. de Mém. de Mezerai, |