concert, à en affurer le repos & la tranquillité.

Coutage, difait Caton le cenfeur, à un jeune homme de fa connaiffance qui fortait d'un lieu de prostitution: Courage; c'est là que doivent aller les jeunes gens plutôt que de féduire nos femmes. Caton vivait dans une république corrompue: il n'avait à choifir qu'entre les degrés plus ou moins funeftes de corruption.

Jeune homme, tu détruis ta fanté, tu fouilles tes mœurs en fréquentant les plus vils fuppôts de la débauche; tu perds l'habitude de rougir en ofant te montrer dans des réduits infâmes ; tu t'avilis dans la plus vile des fociétés ; tu dépraveras en toi les goûts honnêtes qu'infpire la nature, car tu préfereras l'effronterie des courtifanes à la timidité naïve de la pudeur; les femmes honnêtes, les chaftes vierges détourneront de toi leurs regards, ou ne les porteront fur toi qu'avec mépris.

Tu préféreras les plaifirs imparfaits

mais faciles dont tu as pris l'habitude, aux douceurs vertueufes de l'union conjugale qu'il faut toujours payer de quelques peines; ou fi tu t'enchaînes dans les nœuds de l'hyménée, tu regretteras les impures compagnes de ta jeuneffe, tu t'arracheras du fein d'une chafte épouse pour te plonger fur le fein impudique d'une prostituée; tu n'auras ni le caractere révéré d'un tendre époux, ni celui d'un refpectable pere; après avoir contrifté le cœur d'une époufe honnête, trop indigne de fon amour, privé de la vénération de tes enfants, tu traîneras une vieilleffe trifte & mal-faine dans les douleurs & dans le repentir mais le Sage qui gémit fur ta corruption te regarderait avec encore plus d'horreur, fi tu avais porté le vice dans la couche nuptiale de ton ami, dans le chafte lit de fa fille, dans le fanctuaire de la vertu.

Notre religion fait une vertu de la chafteté abfolue, de la confervation de la virginité : mais elle n'attend, elle n'exige cette vertu que des ames privilé

giées, marquées du fceau d'une élection particuliere. La chasteté dont elle a fait un devoir général, c'eft celle qui nous défend de fouiller un lit étranger; c'est cette chafteté féconde qui, ne nous permettant pas d'ufer nos forces par l'abus des plaifirs, nous rend plus dignes de les goûter, plus capables d'être utiles à la propagation de l'efpece, plus propres à fupporter les travaux qui nous font impofés; qui nous conferve enfin la pureté des mœurs, la vigueur de l'efprit, celle & la vie même.

du

corps,

Choix des Epoux.

La néceffité du mariage établie, il eft temps de parler du choix des époux. Il dépend quelquefois des contractants, & très fouvent de leur famille. Que ce choix eft difficile à faire!

La nature ne fait point fe démentir. Elle agit dans l'homme comme dans les autres animaux. Voyez le foin que prend cet habitant de la campagne d'unir enfemble des animaux de bonne race pour avoir toujours du bétail de la meilleure qualité cet homme que vous mé: prifez, rendu plus intelligent que vous par l'expérience, vous dicte la leçon que vous devez fuivre.

Nous tirons de nos parens, quelquefois de nos aieux, fouvent, peut-être, de nos ancêtres plus éloignés (car les obfervations ne peuvent remonter bien haut) une partie de nos traits, de nos habitudes extérieures, du fon de notre voix. Eh! qui ofera dire que nous ne leur

devons pas auffi une grande partie de nos qualités? On peut le prouver par analogie. On a remarqué dans les haras, que, par la génération, un étalon bien choifi, communique prefque toutes fes qualités naturelles & acquifes. On pourrait faire à peu près les mêmes obfervations fur les autres animaux domeftiques : & l'on voudra que l'homme ne tienne tout au plus que quelques traits de ceux qui lui ont donné l'être! non, fans doute. Notre caractere, nos vertus, nos vices, notre génie, viennent fouvent en grande partie, de nos ancêtres. C'est une vérité dont bien des peuples ont paru convenir, en accordant la nobleffe aux defcendants de ceux qui s'étaient ennoblis par leurs vertus.

Pere de famille, tu connais les vertus de ton fils; tu defires qu'elles foient encore reproduites dans fa poftérité. Prends donc garde où tu lui choisiras une épouse. Ne va pas la chercher, féduit par l'attrait de l'or, dans une famille où regnent des vices. Etudie le caractere des parents,