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Ainfi, par notre barbarie, nous nous fommes privés de ce frein néceffaire que l'homme peut mettre à la conduite de l'homme. Il ne nous refte que les loix, qui n'ont que peu d'infpection fur les mœurs, dont l'empire eft éludé par l'adreffe, & dont les miniftres ne peuvent ni tout connaître, ni tout punir.

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Suicide.

UNE autre espece de courage, non moins condamnable, eft celle qui porte à fe donner la mort à foi-même.

On fe tue quelquefois, parceque les efprits actifs manquant au fluide nerveux, l'homme ne peut traîner qu'avec' dégoût fa pefante machine. Le raifonneur n'a rien à dire aux gens attaqués de cemal: c'eft un médecin qu'il leur faut. Que dire encore à ceux qui s'arrachent la vie dans un moment de fureur ou de désespoir ? Avant qu'on eût le temps de parler, ils ne font plus.

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D'autres fe tuent par réflexion. Non ils fe donnent la mort parcequ'ils n'ont pas affez réfléchi. Tant qu'on exifte, il refte des jouiffances. D'ailleurs ils fe hâ tent trop dans quelques jours, peut-être, ils auraient vu luire le plus beau moment de leur vie. GET...

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Devoirs dans le commerce ordinaire de la fociété.

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LE mot de fociété, pris dans un fens plus refferré que celui dans lequel nous Layons employé jufqu'ici, ne fignifie plus tous les hommes compofant un corps focial; il fe reftreint aux perfonnes avec lesquelles nous avons des liai fons d'affaires, d'amufements, de convenance, ou d'habitude. Cette fociété, indépendamment des devoirs impofés par l'intérêt de la grande affociation, dont il ne nous eft jamais permis de nous départir, a auffi fes devoirs. ticuliers into

par

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Elle en fait un de la politeffe; même de celle de convention, qui consistè dans de certaines attitudes prefcrites, dans de certaines manieres d'ôter & de remettre

propos quelques parties de ses vête ments, dans de certains mots particu liers, qu'on apprend par cœur dès l'enfance, & qu'il faut bien fe garder de confondre

confondre avec d'autres mots qui auraient la même fignification, mais qui n'entrent point dans la formule établie. Ces usages varient dans les diffétents pays; on n'est pas poli à Paris de la même maniere qu'on l'eft à Ifpahan, & telle grimace qui fait regarder un homme comme très honnête à Pékin, le ferait trouver fort ridicule à Verfailles.

Au refte, comme toutes ces poftures font fort innocentes, & qu'elles flattent beaucoup ceux devant qui elles font faites, il eft convenable de les apprendre, pour éviter le reproche de rufticité.

Il est une autre politeffe, qui eft de tous les pays & de tous les temps, qui infpire de juftes égards pour tous les hommes, qui prefcrit le plus grand foin de n'en offenfer, de n'en humilier aucun. L'homme honnête n'a pas besoin d'apprendre cette politeffe-là: il en porte les principes dans fon cœur.

Celui qui accable de proteftations d'eftime & d'amitié le premier qu'il rencon

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tre, & fouvent un homme qu'il méprise ou qu'il détefte; qui vous careffe avec tranfport, & vous quitte pour aller vous nuire; qui vous offre fon crédit & fes fervices, lorfqu'il eft occupé de confommer votre perte; qui a fu fe faire un langage toujours contraire à fa pensée, & un vifage qui dément toujours fon cœur: cet homme-là paffe auffi pour poli, & ne devrait paffer que pour un scélérat.

Ces fortes de gens font foule dans la fociété. D'ordinaire ils font affez aimés, parcequ'ils paraiffent aimer tout le mon de. L'intérieur eft inconnu; on n'eft jugé que par le mafque, & l'on réuffit quelque temps, quand on fait fe déguifer à fon avantage : mais quelqu'un vient qui arrache le mafque, & montre le frippon à vifage découvert.

L'homme faux eft-il perdu quand il eft reconnu? Non. Econduit aujourd'hui d'une fociété, il fera demain le héros d'une autre ; & comme on eft très léger dans le monde, qu'on cherche les hommes pour fe diftraire, & non pour les

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