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venir au fecond, & que celui-ci confirme l'autre, & enchériffe. Dans le difcours il faut de tems en tems ramener le fujet qu'on y traite pour ne point

s'écarter.

XV I.

On n'affecte plus aujourd'hui de cacher fa méthode; on fait fentir plus d'une fois l'analyse du difcours. Cette clarté conduit à la conviction, ou du moins à l'inftruction. Si pour mieux furprendre, l'art déguife fes fineffes, ce ne doit être que dans les mouvemens & dans les figures.

XVII.

Les Subdivifions aident à l'ordre. Cependant trop marquées n'ôtent-elles pas l'embonpoint du difcours Elles mettent en morceaux ce qui doit être préfenté comme des membres entiers.

XVIII.

On diftribue un Sermon comme on fait aujourd'hui une maison, dont les appartemens vont en enfilade. Les Subdivifions font comme autant de portes ouvertes, qui laiffent entrevoir toute la piéce, & qui donnent envie de tout voir plus diftinctement.

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CHAPITRE VI.

De la Difpofition.

I.

N peut comparer les difcours oratoires à des ouvrages d'Architecture ils tirent leur force, & leur beauté de la fymétrie. Des monceaux de pierre, & des arbres entaffés, ne font ni des maifons ni des navires.

II.

Il y a une éloquence des chofes : elle eft indépendante des expreffions. Elle réfulte de l'ordre général de la piéce de l'arrangement des preuves, & de la liaison des parties.

III.

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On ne peut pas dire que la beauté du difcours vienne de la beauté de quelques endroits, où l'Orateur aura épuifé tout fon art & tout fon feu; mais bien de la convenance des parties entr'elles, & de leur raport avec le tout. C'est un corps d'ouvrage où tout fe tient, parce que tout eft lié & bien afforti. L'enchaînement des chofes par

elles-mêmes eft tout autre, que celui des tranfitions recherchées.

IV.

Une imagination féconde offre d'abord une foule d'idées que le jugement fait trier. Il fait un retranchement févere du fuperflu. L'abondance fait obfcurité. Le bled trop épais verse, & ne mûrit pas.

4.

Il eft dangereux d'employer ce qui fe préfente fur le champ, & ce qui n'a pas été médicé. La nouveauté éblouit, & fait fouvent goûter ce que la réflexion méprise.

V I.

Dans le feu de la compofition, oubliez la méthode des préceptes; ce qu'ils prescrivent eft quelquefois ce qu'il faut éviter. L'Orateur doit traiter fon fujet en maître : il ne court pas après l'éloquence; elle le fuit.

VII.

La Difpofition trace le deffein, elle dreffe l'ordre du difcours, elle arrange les preuves, établit, éclaircit, prouve, détaille, tire des conféquences, fait des objections, les réfout, pourfuit dans les faux-fuyans l'aveu qui fe

refuse.

VIII.

Le discours eft arrangé, fi toutes les parties s'entretiennent de façon que les premieres conduisent aux fecondes, celles-ci aux fuivantes, & que la derniere rappelle tout, & laisse dans l'efprit une idée entiere du fujet.

IX.

4

Les propofitions & les preuves doivent être difpofées, s'il eft poffible, comme celles des Géométres, les dernieres fuppofent les premieres. Toutes dépendent des principes évidens, d'où elles fuivent par une conféquence néceffaire.

X.

Les meilleures raifons fe mettent les dernieres, ainfi le difcours va toujours croiffant. Les plus fortes preuves ne font pas toujours celles qui ont plus de fuccès. J'appelle donc meilleures celles qui font plus d'impreffion, qui intéreffent davantage, ou que l'Auditeur faifit plus aifément, & dont il eft plus frappé.

X I.

La bonne éloquence ne laiffe pas de fouffrir de petits vuides, & des inégalités. Le Peintre affoiblit certains endroits du tableau, pour en relever d'au

tres. Tout n'eft pas os & nerfs dans le corps humain.

XII.

Que l'ordre du difcours foit affez marqué, pour être apperçu par l'Auditeur habile, & attentif: il veut voir où on le mene; mais pour le vulgaire on court rifque de l'ennuyer, fi on lui fair tout prévoir. Pour lui moins de lumiere & plus de mouvement.

XIII.

Trop de fcrupule fur l'arrangement n'appartient qu'aux Orateurs médiocres; les maîtres de l'art franchissent ces barrieres, & fe mettent en liberté. La magnificence dédaigne les petits ornemens ; & pour elle un beau defordre vaut plus qu'une jufteffe étudiée.

XIV.

On ne doit guéres ajoûter aux fubdivifions d'autres partitions fenfibles : ce qu'on hache trop se réduit à rien. Par-là on feroit toujours dans les theses, rien ne feroit pouffé, & le détail viendroit trop tard. L'ufage préfent veut des fubdivifions, on ne doit ni les refufer, ni en trop mettre. X V.

Usez rarement de tranfitions triviales. Que les chofes naiffent les unes des

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