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d'expliquer les Livres facrés, d'en ap pliquer les figures, de déveloper les myfteres de la Religion, de tirer du fond de la créance les inftructions pour régler les mœurs, & pour nourrir la piété.

.I I.

Dire tout ce qu'il faut, ne dire que ce qu'il faut, & le dire de la meilleure maniere; c'eft le caractere d'un bon esprit.

III.

S'il eft avantageux de penser jufte même fur les fujets frivoles, quelle jufteffe d'efprit n'eft pas néceffaire à celui qui traite toujours des fujets importans? Il doit avoir le goût du vrai, comme par inftinct, & l'appercevoir au premier coup d'œil.

IV.

Un grand fond de raifon & un gé nie pénétrant trouvent d'abord dans chaque fujet le folide & le vrai. Ils font des divifions juftes, des raisonnemens fuivis & convaincans, des réflexions judicieuses & pleines d'un fens exquis.

V.

Ordre, netteté, précision, exactitude, ce font les qualités, effentielles d'un

difcours. Elles coulent d'un efprit jufte, elles rendent le ftile pur, & l'élocution exacte. L'abondance vient enfuite dans la chaleur de la compofition.

V I.

Il est des efprits qui fe portent au grand, fans effort, Le fublime leur eft comme infpiré. Ces efprits fupérieurs paroiffent ce qu'ils font, fans qu'ils Fenfent.

VII.

y

Quoique l'efprit folide foit préférable au bel efprit, on peut fans fcrupule cultiver celui-ci, & le mettre en œuvre. Un beau tour rend nouvelles les penfées ufées. La Religion ne fouffre de nouveau que le tour.

VIII.

Il n'eft pas avantageux pour la Chaire d'affecter trop d'efprit. On voit des Prédicateurs qui ne peuvent fe défaire d'une maniere trop fine de penfer & de s'exprimer. Ils distillent, pour ainsi dire, les vérités; & plus ces effences font épurées, plus elles s'évaporent. Cette dépenfe eft à pure perte; elle ne fert de rien pour la fin de l'action.

IX.

Les Auditeurs qui ont beaucoup delprit n'en exigent pas du Prédica

reur à proportion. Ils favent qu'il parle au gros de l'auditoire, qui eft le peuple.

X.

Ce qui eft naturel, & fondé fur la droite raifon, plaît par-tout, & eft de tous les tems. Les grands & le peuple, les favans & les ignorans, tous y applaudiflent, tous s'y rendent.

X I.

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L'efprit médiocre devient ridicule, s'il affecte de paroître fublime. Chacun doit s'en tenir à fa portée, & à la mẹfure de fes dons.

XII.

Dire qu'on prêche apoftoliquement, lorfque faute de génie, ou de préparation, on parle d'une maniere rampante & indigne du miniftere, c'eft profaner une expreffion fi fainte, c'est blasphêmer ce qu'on ignore. Que ces négligens, ou ces efprits bas ayent les dons apoftoliques, on leur pardonnera leur groffiereté.

XIII.

L'affectation de plaire & de fe faire applaudir fcandalife & attire le mépris. Il faut fouhaiter que l'Auditeur frape fa poitrine, non pas qu'il batte des mains. Le Prédicateur n'eft

pas

pas dans la chaire pour penfer à luimême, moins encore pour y faire penfer; fon ministere a trop de grandeur, pour le livrer à la bagatelle.

XIV.

Trop de jufteffe peut énerver le difcours, & le rendre languiffant. H eft des négligences, qu'on n'apperçoit pas dans un orateur qui fe donne un grand effor.

XV.

L'efprit vif penfe promptement, & non pas toujours heureusement. C'est au jugement à tempérer ce feu, & à le régler.

XV I.

L'efprit folide ne court pas après de fauffes lueurs. Le véritable fond de l'éloquence eft le bon fens il foutient mieux le difcours que le brillant, & même que l'érudition.

XVII.

Le brillant fe rencontre rarement avec la jufteffe des pensées, & la folidité des raifonnemens. Plus on a d'imagination, plus on court rifque de s'égarer. On prête à l'Ecriture des fens étrangers, que jamais l'Ecrivain facré n'a eu en vûe.

B

XVIII

Le Prédicateur ne doit pas tellement s'occuper de fa matiere, qu'il oublie ce qu'il doit au tems, aux lieux, aux perfonnes, aux occafions. Il faut qu'il proportionne à toutes ces vûes les chofes qu'il traite, & la maniere dont il les traite.

XIX.

C: que l'invention fournit doit fe mettre en œuvre avec choix. Il est dangereux de trop compter fur la fécondité de fon imagination. En s'y abandonnant, on parle beaucoup, mais on dit peu, & fans ordre.

X X.

C'eft une vanité mal fondée, que celle qu'on tire de la facilité de compofer. S'il y a de l'efprit dans ce qu'on fait à la hâte, fouvent le jugement y manque. On ne voit pas le foible de ce qu'on vient de produire. On eft furpris, quand on y revient, de n'y trouver qu'un mélange de traits d'efprit & de fautes groffieres.

X X I.

La qualité de Prédicateur ne dif penfe pas d'être docile. Ses lumieres doivent toujours être foumifes aux décisions de ceux qui font les Juges

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