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Au milieu du fond de cette nef une grande niche de marbre cizelée de fleurons, de fruits, & d'oyfeaux, étoit aparemment la niche de la principale idole caf tout autour on en voit d'au tres plus petites, & il y en a deux rangs les unes fur les autres. Les corniches qui en font l'ornement font toutes de mar bre tres bien travaillé. Je fus allumer deux groffes chandelles, & aprés avoir marché trente pas en descendant fous une voû te nous entrâmes dans de tres beaux apartemens. Nous paffames dans fix belles falles qui font de plein pied, & toutes basties de fi belles pierres qu'elles paroiffent eftre d'un beau marbres gris. Toutes ont trente a quarante pieds de long fur fept de large. Il y en avoit dont les chambres étoient rondes, & les autres ovales & octogones,

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je fus vifiter le Cadis dont la maison eft tres belle; il me receut fort bien, & nous fit don ner le caffé & le forbec. Dans la converfation que nous eumes enfemble, je luy demanday pourquoy il avoit fait tant de depense à une maifon comme la fienne, qui étoit tres belle à la verité, mais qui n'étant bas tie que de terre dureroit tres peu. Qu'avec la même depense il pouvoit en bastir une auffi belle de pierre d'une plus lon gue durée. Ce n'est Pas la con. tume parmy nous, me réponditil, d'avoir des logemens qui durent plus que nôtre vie. Mais luy repliquay-je, cela feroit bon fi les hommes ne laiffoient point d'enfans aprés eux. Ne feroitil pas mieux que les peres riches fiffent baftir de belles maifons qui leur feroient honneur & qui feroient utiles à leurs enfanş

prés leur mort? Encore une fois, me dit-il, ce n'eft pas la coutu me parmy nous, les enfans n'habitent jamais les maifons de leurs peres, ils les abandonnent & les laiffent perir. Hé bien,re pris-je pour, vôtre propre fatif faction ne vous feroit il pas plus honorable que vos maifons fub fiftaffent aprés vous pour éter nifer en quelque façon vôtre memoire. Non, non, interrom pit le Cadis,nous avons une pro phetie qui nous menace que les Francs feront un jour maitres de tout le païs des Mufulmans; cela étant ils fe logeroient dans la maifon que j'aurois fait bâtir, ils y mangeroient du cochon & profaneroient : ils s'en feront s'ils veulent, auffi bien les nôtres ne dureront pas tant. Ce difcours me furprit & m'apprit en même temps pourquoy les Turcs détruifoient les maifons

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folides des anciens, & n'en far foient que de boüe.

Je pris congé du Cadis pour aller joindre la caravane où l'on me demanda cinq écus pour le cafar qu'il me fallut payer fort injuftement, paifque les Francs ne doivent rien payer en Turquie. Parmy toutes ces ruines la Ville ne laille pas d'estre habitée, & il y a environ trente fa milles Chrétiennes, quelques Juifs, & bien environ sept à huit mille habitans Turcs. Nous par. tîmes avant le foleil levé, & paffàmes par d'affez beaux païs, quoyque de montagnes, & par de beaux villages. Nous arref tâmes fous des noyers, dans une belle pleine pour y demeurer jufqu'au l'endemain que nous partimes devant le jour. De-là nous paffames par des montagnes affreufes arides & feches fans trouver de l'eau nul

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le part. Après avoir marché

trois heures dans ces montagnes par des chemins taillés dans le Focher, nous defcendîmes dans une plaine fi grande, qu'elle ne paroiffoit point avoir de bor nes à la veue par aucun endroit. On me dit que c'étoit la plaine d'Ardara où les Arabes venoient faire de grandes courses, & fort fouvent pilloient les caravanes. A ce nom je ne pus me deffendre de quelque trifteffe. par le fouvenir d'une cruelle avanture qui m'étoit arrivée lá dans un autre voyage. Elle est affez particuliere pour meriter que je la rapporte en cet endroit en tout cas la difgreffion ne fera que du tems.

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