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quelque difference entre le premier éloignement de ce Tyran & le fecond. Je trouve cependant peu probable, que les ennemis de Piliftrate, l'euffent ainfi laiffe fi fort dans leur voisinage & dans un lieu de la dépendance d'Athènes. Ce qu'Hérodote a voulu dire apparemment, c'est que Pififtrate s'étoit plus éloigné d'Athénes cette feconde fois, que la premiére.

:

2. Il peut fe faire, qu'il y eût originellement dans le texte Eufebe is Пeтaλíav. C'étcit une Ville d'Eubée, très-voifine de l'Actique, puifqu'elle étoit oppofée au Promontoire de Sunium. (1) Il y avoit aufli quatre Ifles de méme nom, (2) & du même côté, à l'entrée de l'Euripe. On ne peut s'empêcher d'être frapé de la reffemblance de ce nom, & de celui, que préfente le texte d'Eu febe.

3. Peut-être auffi ce texte portoit-il: us furJáλcsav; ou furJaλlay. Car c'étoit le nom d'une petite Ifle, voisine de Salamine, & par conféquent de l'Attique. Il en eft fait mention dans Hérodote (3) & dans plufieurs autres Auteurs. De cet endroit, comme de Pétalie, Pifistrate étoit également à portée de profiter de tous les mouvemens, qui pouvoient arriver dans Athènes en fa faveur. Ce nom eft auffi fort approchant de celui d'Italie & l'un & l'autre ont pû aifément être confondus par les Copiftes. Je ne fuis embarafle que pour le choix. Ce qui me feroit pancher pour Pétalie, c'eft que Pififtrate ayant dans fon dernier exil cherché une retraite dans l'Eubée, il y a apparence qu'il en avoit fait autant dans le premier. Mais encore un coup je n'ofe décider.

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Je ne fçais au refte, fi ce que je viens d'obferver, ne peut pas fervir à rétablir le texte d'une Loi célébre, (4) qui a exercé la fagacité des plus grands Critiques, auffi bien que de très-exellens Jurifconfultes.

Il y eft question d'un particulier, qui ayant fait naufrage en Italie, (¡v tỷ italia, porte ce texte) fe plaignoit, que les Publicains des Ifles Cyclades s'étoient injuftement emparez de fes

effets.

Tous les meilleurs Interprétes, jufqu'à M. de Bynkershock,

(1) Strabon, Lib. 10. p. 444. (2) Pline, Hift. 17. 12.

(3) Hérodote, VIII, 95. Paulanias, Attic. C. 36. Plutarque, in Ariftid. p. 323. AlciPhron, Epift. Lib. 1. p. 32. Krienne de By 1

zanae, V. Yurata. Meurfius, in Pir ae, cap. s. de Pop, Attic. p. 148.

(4) Volufius Macianus, in L. 9. D. De Leg. Rood.

avoient regardé, comme une chofe incroyable, que la charge d'un vaiffeau, brife fur les côtes d'Italie, pût être portée par les flots, jufqu'aux Ifles, dont je viens de parler. Ainfi ils avoient jugé, que cet endroit étoit corrompu, & avoient propofe diverles maniéres de le corriger, dont il fera fait mention dans la fuite. Cette corruption eft fi évidente, que je ne fçais comment le fçavant Hollandois, que je viens de nommer, (1) a pû entreprendre de défendre l'opinion contraire. Auffi a-t-il été abandonné en ce point par M. Noodt, (2) Jurifconfulte fameux de fon pays, au fentiment duquel je me range à cet égard fans diffi

culté.

Mais quel nom fubftituerons-nous dans cette Loi à celui d'Italie ? C'eft fur quoi les Critiques n'ont pû encore s'accorder. Les uns (3) ont lû: iv tỹ Traía Les autres, (4) iv Tŷ пaparía. D'au ἐν τῇ Παραλία. tres, (5) ¿v tÿj Atlaλig. D'autres encore, (6) & Tŷ Ixapía. Mais toutes ces conjectures, ont été fort bien réfutées par M. de Bynkershoek, à l'exception de la derniére, qui me paroîtroît affez probable, fi elle ne s'écartoit pas tant de la leçon ordinaire. Pour la premiére, notre grand Saumaise (7) avoit déja fait voir, qu'elle n'étoit pas foutenable.

à ce

Un docte Allemand (8) a propofé de lire, iv rỹ Aguía; c'està-dire dans la mer Egée. Mais ce nom reffenble trop peu lui d'iraxía, pour croire que les Copiftes ayent pû s'y tromper. Noodt (9) foupçonne qu'il devoit y avoir dans la Loi, iv Tỹ Aida Nía. C'eft le nom d'une Ifle voifine de Samos, & M. de Bynkerfhock ne paroît pas défaprouver cette correction, fupofe qu'il en faille faire une.

Je ferois en cela de fon avis, s'il ne me paroiffoit plus fimple, & plus naturel, de fubftituer dans cette Loi, foit Пraλía, soit YurlaXie, au mot iranía, tant à caufe de la reffemblance de ces noms, que de la proximité de ces lieux, & des Ifles Cyclades. Les Sçavans en jugeront. La chofe n'eft pas aflez importante, pour s'y arrêter d'avantage.

(1) M. de Bynkershoek, Dissers, ad dif.

Leg.cap. 3.

(2) Ger. Noodt, Obfervat. Jur. 1, 13. (3) Sam. Petit, Miscell. III, 11,

(4) Cafaubon, in Strabon. p. 143. Saumai

fe, De Mod. Ufur. p. 207.

(5) Cironius, in P. Collect, Decres. p. 18.,

Godefroi, in cand Leg. cap.3. Holftenius, (6) Grotius, Flor. Spars. in di&. Leg. Jaq. in Steph. By V. I'xapos."

(7) Saumaife, Loc. cit. p. 205.

(8) Chriftfrid Wachtier, an Journ. de Leipfic, de 1714. P. 554.

(9) Noodt, Lec. fupr. cit.

CHAPITRE XV.

De la Chronologie des Cypfélides, derniére Dynastie des Rois de

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Corinthe.

Uuoique de fçavans hommes (1) ayent travaillé à débrouiller cette partie de l'Hiftoire Grèque, il y refte encore des difficultés, , qui ne font pas aifées à réfoudre. Tâchons d'y apporter quelques lumières, s'il eft poffible.

On fçait que le fondateur de la derniére Dynastie des Rois de Corinthe a été Cypfélus, fils d'Eétion. On fçait auffi, que fon fils Périandre regna après lui, & qu'il cut pour fucceffeur Pfammétichus, fils de Gordius, qui fut le dernier de ces Rois. Ariftote (2) affure de plus, que cette Dynastie fubfifta pendant 73. ans, & demi. Mais il n'eft pas aifé de fixer le commencement, & la fin de chacun des ces regnes.

Eufebe (3) dit à la vérité, que Cypfélus commença à regner la première année de l'Olympiade 30. qui répond à l'An 4054. de la Période Julienne. Sur quoi Scaliger obferve, qu'il auroit dû dire, que ce fut la feconde année de l'Olympiade fuivante. En quoi il a pour lui Syncelle, (4) lequel affure, que la Dynastie des Cypfelides commença l'Année 447. après le retour des Héraclides dans le Péloponnèfe, & par confequent l'An 4059. D'où il fuit, que fi le calcul d'Ariftote, fur la durée de certe Dynastie, eft jufte, elle a fini dans l'Année 4133.

Cela s'accorde parfaitement avec le témoignage de Soficrate (5) fur le tems, où a vécu Périandre. Car il dit, que fon regne commença dans la trente-huitiéme Olympiade, dont la derniére année tombe fous l'An 4089. Or ce fut en effet la premiére du regne de Pififtrate; puifqu'on convient que fon pere regna 30. ans, & qu'Hérodote (6) l'aflure ainfi. Soficrate dit encore que Périandre mourut 41. ans avant Créfùs ; c'est-à-dire avant qu'il cût été détrôné par Cyrus, comme d'autres l'ont obfervé. En effet, fi Pé

(1) Scaliger, Canon. Ifagog. Lib. 3. p. 333. Marsham, Chronic. p. 565. Vindingius, Helten. p. 166. & feq.

(2) Ariftote, Politic. V, 12.

98.

(4) Syncelle, Chronogr. p. 179.

(5) Soficrate, dans Diogène Laërce, 1,95.

(6) Hérodote, V, 92.

(3) Eufébe, Chron. Ann. 1357.

riandre ne regna que 40. ans, fuivant l'opinion commune, & s'il ne commença à regner qu'en 4089. fa mort arriva l'An 4029. & par conféquent 41. ans avant la chute de Créfus, qui arriva l'An 4170. Que fi l'on ajoute les trois ans & demi, que le fucceffeur de Periandre regna, fuivant Ariftote, on trouvera l'An 4133. où dût finir cette Dynaftic, felon ce qui vient d'être dit

On peut faire cependant fur ce point deux objections très-fortes. La premiére refulte d'un Oracle de Delphes, raporte par Hérodote, (1) qui apprit à Cypfélus, que lui, & fes enfans régneroient à Corinthe; mais que cette Couronne ne pafferoit pas à la troifième génération :

Αυτὸς, και παίδες, παίδων γε μὲν ἐκέτι παῖδες.

On ne peut guére douter, qu'Hérodote, qui faifit toutes les occafions, d'infpirer du refpect pour les Oracles, n'ait donné celui-ci, comme ayant été fuivi de l'evénement. D'ailleurs Eufebe (2) nous apprend, que le Royaume de Corinthe finit avec la vie de Pérandre. Ainfi il semble, qu'il n'y ait eu d'autres Rois de cette Dynastie, que lui, & Cypfélus fon pere; malgré le fentiment contraire d'Ariftote ci-deffus cité, & de plufieurs autres, (3) qui veulent que cette famille ait regné pendant trois générations.

La feconde objection résulte de quelques faits, qui font raportez par Hérodote, & qui prouvent, que Périandre a vécu plusieurs an. nées au-delà du tems marqué ci-deffus.

Il dit en premier lieu, (4) que Pififtrate, Tiran d'Athénes ayant enlevé aux Mitylénéens la Ville de Sigée, y établit pour Roi fon fils Hégéfiftrate. Il ajoute, que ce nouveau Roi, pour s'y maintenir, fut obligé de foutenir une guerre affez longue contre les Mitylénéens ; & qu'elle fut enfin terminée par la médiation de Périandre, fils de Cypfélus. Ce fait eft encore attesté par Strabon. (5) Or Pififtrate, qui mourut en 4186. comme on l'a vû au Chapitre précédent, ne pouvoit avoir au tems de la mort de Périandre, fupofé qu'elle foit arrivée en 4129. un fils, qui fût en âge de gouverner Sigée, & de la défendre contre les armes des Mitylénéens. Il y a d'ailleurs apparence, que la prise de cette Ville

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par les Athéniens, fous la conduite de Pifistrate (1), précéda de peu d'années la premiére domination de cet Athénien fur les compatriotes, que j'ai fixée à l'An 4153. Car il ne pouvoit guère avoir alors, que cinquante ans. Ainfi Périandre a dû atteindre jusques à l'An 4150. ou environ. Il vivoit même encore environ l'An 4154. s'il eft vrai, comme le dit Dion Chryfoftome, (2) que Solon fe retira d'abord chez ce Roi, quand la tyrannie de Pififtrate l'engagea à quitter Athènes, lequel fait fe trouve confirmé par un paflage de Plutarque, dont je ferai mention dans la fuite.

En fecond lieu Hérodote, (3) parlant de la guerre, que les Lacédémoniens déclarérent à Polycrate, Tyran de Samos, vers l'An 4189. dit qu'une génération auparavant les Samiens avoient grievement offense le même Périandre, par un fait, qui arriva avant la mort d'Alyatte, Roi de Lydie, & par conféquent avant l'An 4156. (4) Il eft vrai que Plutarque (5) veut, que ce fait ait précédé cette guerre de trois générations. Mais c'est une erreur manifefte. Car cela remonteroit à l'An 4089. où Alyatte ne regnoit pas encore; & d'ailleurs la chose, dont il s'agit, arriva peu avant la mort de Périandre, fuivant Diogene Laërce. (6) Or ceux, qui avancent le plus fa mort, la placent fous l'An 4029.

Je fçais bien, que le P. Pétau (7) s'eft plaint, qu'Hérodote avoit troublé en cela l'Hiftoire de Périandre, & qu'il eft contraire, nonfeulement à Soficrate, & à Eufébe, mais encore à lui-même. Car il dit ailleurs, (8) qu'environ la feptième année du regne d'Alyatte, & par conféquent l'An 4106. Périandre avoit donné certain confeil à fon ami Trafybule, Tyran des Miléfiens. D'où il conclut, que Périandre n'ayant regné, que quarante-quatre ans tout au plus, il n'avoit pû atteindre le tems de la mort d'Alyatte.

Mais j'ai peine à croire, que l'autorité de Soficrate, dont le tems eft incertain, & encore moins celle d'Eufébe, ni même celle d'Ariftote, foient préférables au témoignage d'Hérodote, qui a vécu peu de tems après Périandre, & qui d'ailleurs circonftancie trèsbien tous les faits, qu'il raporte de ce Tyran. Il fe peut très-bien faire, qu'il ait regné beaucoup plus de cinquante ans, puifque Diogéne Laerce nous apprend, qu'il en avoit près de quatre-vingt quand il mourut. Auquel cas il fera vrai, qu'il regnoit déja, quand

(1) V. Mcurfius, Pififtrat. cap. 8.
(2) Dion Chrifoftome, Orat. 37. p. 455.
(3) Hérodote, III, 48, & feq.

(4) V. ci-deflus, Chap. s.

| 860.

(6) Diogéne Laërge, 1, 95.

(7) Le P. Pétau, De Dodr. Temp. Tom. 2.

(43) Plutarque, De Maiignis. Herodot, pag. | P. 858.

(8) Hérodote, I, 20,

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