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tracter la parole de Dieu; qu'il ne pouvoit pas éviter le scandale en la défendant, parce qu'il n'étoit pas dans fon pouvoir d'empêcher que la parole de Jefus-Chrift ne fût une pierre d'achoppement; qu'il fçavoit bien qu'il falloit obéir aux puiffances & aux magiftrats, & ne pas fe fier à fon propre fens, qu'il l'avoit enfeigné lui-même; mais qu'il lifoit aufli dans l'Ecriture, qu'il falloit obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes ; & qu'il étoit prêt de tout faire, pourvu qu'on ne l'obligeât pas de nier la parole de Dieu. "Si ceux qui gouvernent l'é,, glife, (dit il,) faifoient leur devoir de la ,, maniere que Jefus-Chrift & les apôtres l'ont ordonné, il ne feroit pas neceffaire d'acca,,bler les confciences de ce joug dur & infupportable de loix humaines; je n'ignore pas », que l'Ecriture veut qu'on abandonne fon » propre fens, & j'y foufcris volontiers; mais , je ne prétends rien faire avec opiniâtreté, je ,, demande feulement qu'il me foit permis de ,, faire profeffion de l'évangile.,,

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1521.

XIII.

Luther

l'ar

Le cardinal Pallavicin dit que l'archevêque Conditions de Treves touché de l'opiniâtreté de Luther que propofa à ce religieux de remettre toute fon chevêque affaire, & de s'en rapporter au jugement du de Treves pape & de l'empereur, où à celui de l'empe- propofe à reur feul, fçachant bien qu'il jugeroit comme Fallavic. le pape, ou à la decifion de l'empereur & des hift. onc. princes fans le pape; & enfin de révoquer pour Trid. l. 1. le prefent fes erreurs les plus confiderables, en c. 7. remettant le jugement des autres à la décifion d'un concile. Mais comme ces propofitions paroiffoient bleffer l'autorité du fouverain pontife dans les chofes de foi, le nonce Aléandre s'en plaignit fi vivement, que l'archevêque crut devoir fe juftifier, en difant qu'il n'avoit rien avancé qu'en fuppofant l'appro

IS2 I.

XIV.

part de

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60mment.

bation du faint fiege. Luther refufa par un autre motif d'accepter ces propofitions, fçavoir parce qu'on lui donnoit des juges qu'il avoit déja recufez.

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Enfin l'électeur de Tréves lui ayant demandé de quels remedes, à fon avis, il feroit plus à propos de le fervir; " de ceux ( dit-il, ) ,, que Gamaliel propofa aux Juifs, en difant », que fi l'entreprise étoit humaine, elle avorteroit; au lieu que fi elle venoit de Dieu, il fe,,roit impoffibled'en empêcher le fuccès;qu'ainfi le pape devoit être fatisfait, étant indubitable que fi fon deffein ne lui étoit

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pas venu de Dieu, il manqueroit bientôt.,, Comme on ne put pas tirer de lui d'autre réponse, on lui donna fon congé, avec ordre d'être à Wittemberg dans l'efpace de vingt & un jours, & on lui défendit de prêcher & de composer dans le chemin. Luther ayant donc remercié l'affemblée, partit de Wormes le vingt-fixiéme d'Avril accompagné du même exempt qui l'avoit amené.

Luther s'arrêta à Fribourg qui étoit sur sa Luther route, & il écrivit de-là à l'empereur pour fe juftifier auprès de lui de la réfiftance qu'il & écrit de avoit faite à ceux qui vouloient l'obliger à réFribourg à tracter fes fentimens. Il repete dans fa lettre l'empereur. ce qu'il avoit déja dit fouvent, qu'il ne demanSleidan. doit que des juges qui ne le jugeaflent que fur des témoignages de l'Ecriture.,, Ce que 1.3.p.71. je défends, ajoûte-t-il, ) n'eft pas ma " caufe particuliere, c'eft celle de toute l'éfcript. Lu- glife, c'eft celle de l'univers, & principaletheri. ann. ment de l'Allemagne, ainfi,grand empereur, 1521. ,, je vous prie de me défendre contre mes ennemis,,. Il écrivit à peu près dans les mêmes termes aux princes, & s'excufe de ce qu'il n'a pas voulu foumettre fes livres à leur juge

Cochlaus "

de act.

Pallavicin

hift. l. 1. c.

28.

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ment, parce qu'il ne pouvoit compromettre 15 2 1. en aucune maniere la parole de Dieu. Il déclare que toutes les fois qu'il plaira à fa majesté imperiale & à eux,il fe rendroit dans le lieu qu'on lui marqueroit, pourvû qu'il eût affaire à des juges équitables & non fufpects. Il chargea l'exempt Sturmius de ces deux lettres. Il étoit bien aife de trouver cette occafion pour se défaire d'un homme qui l'incommodoit, dans le deflein qu'il avoit de le faire enlever, afin d'avoir un prétexte pour ne plus obéir; car tout cela étoit concerté.

X V.

Luther eft enlevé fur

le chem n & caché

Sleidan.

En effet, Luther étant forti d'Eyfenach le troifiéme de Mai, & traversant la forêt qui eft fur le chemin de Wittemberg, deux cavaliers mafquez, & apoftez par Frederic électeur de Saxe, l'attaquerent, le jetterent même par dans un terre, pour mieux faire croire qu'ils étoient château. des ennemis qui en vouloient à fa perfonne, & Pallavicın. le conduifirent comme par force dans le châ- hift. 1. 1, teau de Versberg, fitué fur une montagne,dans 26. un païs affez défert de la Saxe auprès d'Altstad. Luther y demeura enfermé pendant neuf mois, Cochleus,ds fort bien nourri, à la verité, mais fans aucun fcript. & commerce exterieur, & fans qu'on pût fçavoir act. Luther. où il étoit, tant l'affaire avoit été conduite avec an. 1521. adreffe & fidelité. On dit même que l'électeur P.42.43. de Saxe n'avoit pas voulu qu'on lui fit fçavoir à lui-même le lieu où ce religieux fut enfermé, afin qu'il pût protefter à l'empereur & au pape qu'il l'ignoroit abfolument.

p. 76.

XVI.

Bruits La nouvelle de cet enlevement fut bien-töt qu'on rérépanduë de tous côtez; Aléandre en donna pand fur avis au pape. Charles V. foupçonna la chofe l'enlevecomme elle étoit arrivée, & les perfonnes ment de judicieufes penferent de même. Cependant Luther les partifans de Luther ne manquerent pas hift. 4.1. Ga de publier par tout que les émiaires de la

Pallavicin.

28. P

122

cour de Rome l'avoient fait affaffiner, ou da 1521. moins le tenoient enfermé contre la foi publique. Il y en eut d'affez furieux pour publier qu'ils avoient trouvé fon cadavre percé de coups dans une mine d'argent, ce qui penfa exciter une fédition dans Wormes, & mit les deux nonces Caraccioli & Aléandre, déja fort haïs des Lutheriens, en danger de perdre la vie. L'empereur, après avoir déliberé avec les princes & les électeurs fur ce qu'il étoit à propos de faire dans les conjonctures préfentes, avant la clôture de la diete, on convint qu'il falloit donner un édit contre Luther. Il fut dreffé le fixiéme de Mai, & l'on en porta deux copies à l'empereur, l'une en latin & l'autre en Allemand. Ce prince étoit alors dans l'églife avec fa cour, & environné du peuple qui y étoit accouru, il figna ces deux copies avec beaucoup de joye, en préfence des cardinaux de Mayence & de Sion,qui les fignerent auffi. Cet édit avoit été lû auparavant, & approuvé dans une affemblée qui fut tenue le huitiéme Mai, qui étoit cette année le dimanche de la Trinité. Quand l'édit fut revêtu de toutes ces formalitez, on le fit imprimer pour le rendre public.

XVII.

Charles V.

L'empereur y expofe d'abord, qu'il eft da Edit de devoir d'un prince chrétien d'accroître la relil'empereur gion, & d'étouffer les héréfies dès leur naifcontre Lu- fance. Il y raconte enfuite comment Luther ther. tâchoit d'infecter l'Allemagne de cette conta& le danger évident qui menaçoit cette Extat apud glon, nation de tomber dans le précipice, fi l'on n'y Joan. Coclaum an remedioit de bonne heure;que le pape Leon X. 1521 infine après avoir exhorté paternellement ce relioper de act. gieux, mais fans fuccès,à fe retracter, avoit été &fcript obligé avec le facré college, de condamner fes

Lutheri.

écrits, & de le déclarer hérétique,fi dans un cer

Sleidan,

per. t. 2.

Trid. lib. 1.

cap. 28.

tain tems qu'il lui prefcrivoit, il ne révoquoit fes erreurs:de laquelle fentence Jerôme Aléan- 15 2 1. dre, nonce apoftolique, réfidant auprès de fa perfonne, lui avoit donné une copie, le priant 13. p 76. de la part du pape, comme le vrai protecteur Apud Gol. de l'église, de la faire publier & exécuter par daftum tout l'empire & dans toute l'étendue de fes conf. imétats; que cependant Luther, au lieu de s'a- P 143. mender, & de rentrer dans son devoir, écri- Pallavicin. voit de jour en jour des livres latins & en Al- hift conc. lemand,remplis non-feulement d'héréfies nouvelles, mais encore de celles que les facrez conciles avoient condamnées par le paffé; qu'il n'y a pas un feul de fes écrits qui ne foit peftiferé,ou qui ne porte quelque aiguillon mortel, ni même une parole qui ne foit un pur poifon : que pour ces causes, voulant fuivre les traces des empereurs Romains fes prédéceffeurs,après en avoir conferé avec les électeurs,les princes & les états de l'empire, comme auffi avec fon confeil particulier, compofé de perfonnes choifies, de toutes les nations foumifes à fa domination, de leur avis & confentement unanime,& pour ôter tout fujet de plainte & de conteftation à ceux qui difoient qu'il falloit l'écouter avant que de proceder à l'exécution de la bulle du pape, (quoique peut-être il ne fût pas à propos tendre un homme condamné par le faint fiege, obstiné dans ses mauvaises opinions, & connu publiquement pour hérétique il l'avoit fair citer par un de fes hérauts, non pas pour connoître ni pour juger des choses de la foi, ce qui appartient feulement au pape, mais pour le ra mener dans le bon chemin par de fortes & falutaires exhortations.

d'en

Enfuite l'empereur expofe comment Luther fut introduit dans l'affemblée, fur quoi il fut interrogé, & ce qu'il répondit: enfin la ma

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