N°. II. LIBERTÉ DE LA PRESSE. A PRÈS PRÈS avoir préfenté quelques traits qui caractérisent l'ame jufte & bienfaifante de nos jeunes Princes, dignes d'êtres l'espoir de l'Augufte Maison de Bourbon; nous allons rapporter un A&te de la plus haute fageffe, d'un des Grands Rois qui en font aujourd'hui l'honneur. LES AMIS du genre humain remarquent avec plaifir que, depuis quelque tems, & particulierement depuis l'avénement du Roi CHARLES III, la Cour d'Espagne s'eft occupée d'une fuite d'opérations effentiellement utiles aux Royaumes qu'elle gouverne, & même à l'humanité en général. Elle a d'abord fait, par le Pacte de Famille, avec tous les Etats foumis aux divers Princes de la Maifon de Bourbon, un Traité tel qu'il devroit y en avoir un entre toutes les Souverainetés du Monde. Il est véritablement trifte de penser que ce Traité ait été néceffaire, & que l'on ait oublié pendant tant de fiécles, & fi généralement, que tous les hommes étoient nés freres & libres. Les Grecs & les Romains appelloient les Etrangers des Barbares. Les Nations modernes ont adouci le mot; mais elles ont continué d'agir effectivement vis-à-vis d'eux avec une barbarie trop réelle. Heureux encore, fi elle ne fe fut étendue qu'aux Etrangers! On s'eft imaginé par-tout que les hommes devoient, du plus au moins être affervis à la glêbe qui les avoit vu naître. On n'a pas fongé que par leur qualité d'êtres fenfibles, ils avoient le droit indélébile de chercher le bonheur, & de fe tranfporter où ils efperent de le trouver. On a voulu les retenir de force dans l'in térieur de chaque Pays. On a hériffé de difficultés les tranfmigrations. On ne s'est pas apperçu qu'il n'y avoit contre elles de barrieres fuffifantes, que celles qu'y peut mettre le bien-être des fujets, & la vigilance avec laquelle le Gouvernement protège tous les droits naturels, dont la liberté est le premier. Dans le même-temps que chaque domination vouloit, en quelque façon, emprisonner fur fon territoire les hommes qui lui étoient foumis; chacune d'elles repouffoit, par une politique contradictoire mais également injufte, ceux qui auroient voulu venir du déhors pour y prendre un établiffement. On leur a refufé l'ufage des droits les plus imprefcriptibles, & celui de la plupart des priviléges dont jouiffent les nationaux ; on leur a interdit une infinité de commerces. On a été jufqu'à priver leurs familles du droit de réclamer leur fucceffion, Les Couronnes de France, des Efpagnes, de Naples & de Parme, ont donné à la terre l'exemple, qui commence heureusement à être fuivi, de brifer entr'elles ces barrieres odieufes, élevées dans des fiécles d'ignorance; & d'abolir pour jamais ces droits d'aubaine, qui ne renfermoient au fonds, qu'une espece de brigandage réciproque, favorifé par des Loix peu réfléchies, & par le laps de tems. Tout homme né fous l'Empire d'un des Princes de la Maifon de Bourbon, peut à prefent paffer à fon gré dans les Etats de l'autre; il eft sûr d'y trouver un protecteur, un pere, un digne defcendant du Grand HENRI; d'y jouir de tous les droits de régnicole; d'y voir respecter fa liberté, fa propriété & celle de fa famille. Les fages Princes qui ont conçu la néceffité & la justice de traiter ainfi les fujets les uns des autres, fentent vraifemblablement bien auffi, qu'ils ne leur ont accordé en cela, que l'ufage des droits naturels de l'homme, qui n'euffent jamais dû être violés à l'égard d'aucune Nation. Il feroit beau & noble, il feroit digne de leur grandeur bienfaisante; mais fur tout il feroit fingulierement profitable pour eux, d'étendre les mêmes priviléges à tous les Peuples de l'Univers, foit que leurs Souverains fuffent ou ne fuffent pas difpofés à la réciprocité. Les grands Rois font trop au deffus des petites querelles, & des ridicules antipathies nationales, pour en rendre victimes des particuliers paifibles, qui leur offrent un hommage flatteur de confiance & de vénération, en venant eux-mêmes, & en apportant des richeffes dans leurs Etats. Images de Dieu même, Peres refpectés, Gardiens tutélaires des hommes, ils ne doivent fe montrer terribles qu'aux malfaiteurs ; en quelques lieux qu'il ait pris la naiffance, tout être humain qui met le pied fur leur territoire, entre dans le nombre de leurs enfans, & ne doit y trouver, |