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ment écclefiaftique. Auffi avez-vous vû dans toute cette hiftoire avec quelle attention & quelle circonfpection on ordonnoit les Evêques pendant les neuf ou dix premiers fiécles : j'en ai marqué le détail au fecond difcours, où j'ai relevé cette . 4. to. 8. parole de faint Cyprien, qu'un Evêque ordonné canoniquement eft établi par le jugement de Dieu. Cypr. epift. L'Evêque une fois établi ordonnoit les prêtres & 67. ad Hft les autres clercs, mais avec le confentement de fon clergé & de fon peuple; & toûjours pour un titre certain, c'est-à-dire pour fervir dans une certaine Eglife. D'où eft venue la collation des benefices depuis le partage des revenus ecclesiasti

ques.

montreue

L'autre partie de la jurifdiction qui tend à la confervation des bonnes mœurs, s'exerce principalement par l'adminiftration de la penitence: où le prêtre prend connoiffance des pechés comme juge, pour favoir s'il les doit remettre ou les re.8. tenir, kier ou délier le pecheur. Voyez encore ce que j'en dit au fecond discours, où j'ai fe n'impofoit que des peines medecinales, oux qui les acceptoient volontairement fententant de prier pour les indociles & les endurcis, qu'elle fe trouvoit quelquefois obligée à retrancher de fon corps, de peur qu'ils n'infectaffent les autres. J'ai marqué dans le troifiéme difcours deux abus très-nuifibles à la penitence, la multiplication exceffive des peines canoniques & les penitences forcées. Or je vous renvoye à ces difcours fur l'hiftoire pour éviter les redites.

2,16,to. 13

Une autre partie de la jurisdiction ecclefiaftique qu'il faloit peut-être plaçer la premiere, c'eft le droit de faire des loix & des reglemens, droit effentiel à toute focieté. Ainfi les apôtres en fondant les Eglifes leur donnerent des regles de difcipline qui furent long-tems confervées par la

fim

fimple tradition, & enfuite écrites fous le nom de canons des apôtres & de conftitutions apoftoliques. Les conciles qui fe tenoient frequemment faifoient auffi de tems en tems quelques reglemens; & c'est ce que nous appellons les canons, du mot grec qui fignifie regle..

ques.

II.

Comme un des devoirs des Evêques étoit de conferver l'union & la charité entre les fidéles, re Arbitrages ils avoient grand foin d'apaifer les querelles, de terminer ou prévenir les differends : du moins ils exhortoient ceux qui leur étoient foumis à les regler entre eux à l'amiable, fans plaider devant les juges ordinaires, qui étoient payens. Saint Paul en fait un grand reproche aux Corinthiens; 1.Cor.v1.4 & dit, que les plus méprifables d'entre eux ne font que trop bons pour juger leurs affaires temporelles, tant ils doivent faire peu de cas de ces fortes d'affaires; & prendre garde de ne pas scandalifer les payens en plaidant pour de petits interêts comme les autres hommes. Vous avez v.7. déja tort, continue l'apôtre d'avoir des procès : que ne foufrez vous plûtôt l'injuftice & la fraude? & là-deffus il leur fait une puiffante exhortation touchant le défintereffement & l'éloignement de l'avarice. Ainfi quand JESUS-CHRIST refufa d'être arbitre entre les deux freres, il en prit occafion d'inftruire le peuple fur le mépris des biens temporels.

Or, quoique felon faint Paul, les moindres des laïques puffent être pris pour arbitres de leurs freres; c'étoit toutefois l'Evêque qu'ils choififfoient ordinairement comme leur pere commun; & l'on voit la forme de ces jugemens charita- #6.11.c.474 bles dans le livre des conftitutions apoftoliques écrit avant la fin des perfecutions. L'Evêque étoit affis au milieu des prêtres, comme un magiftrat affifté de fes confeillers : les diacres étoient débout, comme fervant d'appariteurs, ou mi

a 3

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niftres

niftres de juftice: les parties fe prefentoient en perfonne & s'expliquoient par leur bouche. L'affaire étoit examinée fimplement & de bonne foi, fans formalités rigoureuses, & decidée suivant la loi de Dieu, c'eft-à-dire les faintes Ecritures. Le juge avoit égard à la qualité des parties, principalement à leurs mœurs, pour ne donner lieu ni à la calomnie ni à la chicane; & non con, tent de juger l'affaire au fonds en declarant ce qui étoit jufte, il s'efforçoit d'en perfuader les parties, les faire acquiefcer à fon jugement, les reconcilier parfaitement & les guerir de toute aigreur & de toute animofité. C'eft pourquoi l'audience de l'Evêque fe tenoit le lundi, afin que les parties euffent le reste de la femaine pour calmer 1. Tm. 11. leurs paffions; & que le dimanche fuivant ils puffent dans leurs prieres lever à Dieu des mains pures, comme dit l'Apôtre.

8.

111. Conciles.

Les affaires plus importantes, comme les plaintes contre les Évêques mêmes, fe jugeoient dans les conciles provinciaux : qui fe tenoient regulierement deux fois l'an, à moins que la perfecution ouverte ne l'empêchât; & au-deffus de ces conciles il n'y avoit point de tribunal ordiepift. 19. naire. Saint Cyprien parlant des Chrétiens qui étoient tombés dans la perfecution, dit : Qu'ils attendent la paix publique de l'Eglife, afin que dans une affemblée de plufieurs Evêques nous can. 5 puiffions tout regler d'un commun avis. Le concile de Nicée tenu au commencement de la liberté de l'Eglife, ordonne deux conciles par an: ce qui femble montrer que c'étoit déja la coûtume de les tenir frequemment.

Telle eft donc la jurifdiction effentielle à l'Eglife, comme elle l'a reçûë de JESUS-CHRIST fe foutenant par elle-même, fans aucun fecours de la puiffance feculiere; & fe contenant dans fes bornes, fans rien entreprendre fur le temporel.

Elle

Elle fe conferva dans cette pureté pendant les trois
premiers fiecles fous les Empereurs payens; &
jamais l'Eglife ne fut plus forte ni plus heureu-
fe, c'est-à-dire plus floriffante en toutes fortes
de vertus, qui eft l'unique bien que J. C. lui a pro-
mis en cette vie. Les fondemens de cette jurifdi-
ction étoient l'autorité des pasteurs & la foi des peu-
ples. Les pafteurs s'attiroient du refpect par leur do-
ctrine & leurs vertus: les peuples ne connoiffoient
point de plus grand mal en cette vie
› que d'ê-
tre retranchés de l'Eglife & privés de la commu-
nion des Saints. S'ils n'en étoient pas touchés
rien ne les empêchoit de retourner au paganif-
me mais tant qu'ils demeuroient Chrétiens,
rien ne leur étoit plus précieux que la grace de
Dieu & l'efperance des biens éternels.

Ce fut par cette autorité purement spirituelle, que l'Eglife combatit & reprima tant d'herefies qui s'éleverent dans les premiers fiecles : les Nicolaïtes, les Gnoftiques de diverfes fortes, les Ebionites, les Valentiniens, les Encratites, les Marcionites. On n'employa contre eux que l'inftruction, les conferences charitables ; & une fermeté invincible à n'avoir aucun commerce avec les incorrigibles, fuivant le precepte de faint Tit.111.10. Paul.

8.

Or, encore que l'Eglife n'eût pas besoin de la puiffance temporelle pour l'exercice de fa jurifdiction: toutefois elle n'en refufoit pas le fecours, même de la part des payens. On le voit Hft. liv. dans l'affaire de Paul de Samofate, qui après vin. 7. 4. avoir été déposé du siege d'Antioche, ne laiffoit pas d'y demeurer fous la protection de la reine Zenobie jufqu'à ce que l'Empereur Aurelien, à la priere des Chrétiens, le fit chaffer de la maison épiscopale.

Cette protection devint ordinaire fous les Empereurs Chrétiens, & ils prêtoient à l'Eglife

24

leur

IV.

Protection des Princes.

leur puiffance coactive pour l'execution de fes jugemens. Ainfi après qu'Arius cut été condamliv.xi.n.24. né au concile de Nicée, l'Empereur Constantin l'envoya en exil & condamna fes écrits au feu : liv. XXVI. défendant à toute perfonne de les cacher sous peine de la vie; & Neftorius fut traité de même par l'Empereur Theodofe. C'eft le fecond état de la jurifdiction ecclefiaftique, où elle commença à être appuïée par la feculiere.

78.34.

1.35.

1. 7. Cod. de

pifc. and.

Ce fut particulierement pour autorifer les arbitrages des Evêques, dont l'utilité étoit reconHift. liv.xx. nuë de tout le monde. L'Empereur Honorius étant à Milan en 398. declara, que ceux qui confentiroient de plaider devant l'Evêque n'en feroient point empêchés: mais qu'il les jugeroit comme arbitre volontaire, en matiere civile feulement. Et par une autre loi de l'an 408. il ordonne que la fentence arbitrale de l'Evêque fera executée fans apel, comme celles du préfet du pretoire; & que l'exécution s'en fera par les officiers des juges; preuve que les Evêques n'en avoient point de femblables.

1. 8. Cod.

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On ne contraignoit perfonne de procéder de125.de epifc. vant l'Evêque, même contre les clercs. C'eft ce 1.29.5.4. de que porte une loi de l'Empereur Marcien datée de 456. où il dit, que fi celui qui pourfuit un epife, and. clerc de C P. ne veut pas fubir le jugement de l'Archevêque, il ne pourra pourfuivre ailleurs que devant le préfet du pretoire. En general les clercs comme les laïques étoient foumis à la jurifdiction des juges féculiers: feulement il étoit defendu de les tirer du fervice de leur Eglife, en les pourfuivant dans une autre province; il faloit s'adreffer aux juges des lieux de leur refidence, fuivant la maxime generale, que le demandeur fuit la jurifdiction du defendeur. 133.de epife. C'est ce que porte une loi de l'Empereur Leon; 1.29. §.1. ep. & c'est à quoi fe reduifoit le privilege clerical.

and.

Dès

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