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Le corps
feul eft ou en mouvement ou en
repos (, il n'eft pas en mouvement; car
pour qu'il foit en mouvement, il faut une
caufe étrangère qui produife en lui plus
que fon effence feule, favoir, une vitefle
qui contient du plus & du moins (i), qui
eft une grandeur permanente (), de la-
quelle nous verrons dans la fuite () qu'il
s'enfuit des effets plus ou moins grands,
felon qu elle et plus ou moins grande,
qui eft par conféquent une force ajoutée
à l'effence du corps qui confifte dans fon
étendue (m): il faut donc que le corps foit
en repos, lorsqu'il eft fuppofé feul.

268. Les Cartéfiens répondront à ce troifiéme raifonnement; que le corps feut n'eft ni en repos ni en mouvement, qu'il a fon effence, c'eft-à-dire, fa maffe abftraite & diftinguée de tout état, c'est-à-dire, de mouvement & de repos, qu'il tient d'une caufe étrangère l'un & l'autre de ces deux états, de même que le corps confideré feul indépendemment de toute caufe étrangère n'a aucune figure, plutôt qu'une autre ; que feul il a fon effence, & que pour les figures il les a des caufes étrangéres, quoiqu'il ne puiffe jamais être fans aucune figure.

269. Ils ajoûteront même que ce troifiéme raifonnement prouveroit que le mouvement convient au corpsconfidéré feul. Car, diront-ils, on pourroit raisonner en cette forte le corps fuppofé feul eft ou en mouvement ou en repos; il n'eft pas en repos, parceque pour qu'il foit en repos, il faut ane caufe étrangère qui lui donne autre

:

(b) N. 248:

(i) Fin du n 238.

(k) N. 242 (1) N. 32&

(223) N. 7j

chofe que fon eflence, puifque le repos n'eft pas fon eflence, n'étant point fa (Fin du mafle (n).

A. 2:21.

n. 214.

(p) Par ce qui eft dit depuis

270. Mais les Cartéfiens en difant que pourque le corps foit en repos, il faut une caufe étrangère qui lui donne autre chofe que fon eflence, oublient d'ajoûter, qui contienne du plus ou du moins, qui foit une grandeur, laquelle pour être produite demande une force plus ou moins grande felon que cette chofe eft plus ou moins grande: ils fentent bien que tout cela fe roit faux, au fuict du repos, quoiqu'il foit véritable au fujet du mouvement.

271 Je répondrai donc que le repos n'est pas l'effence ni fuite de l'effence du corps confidéré indépendemment de tout état de folitude, ou de combinaison de caufes (0) N. Fin du étrangères (a): mais il eft conftant (p) que le repos n'eft que la folitude même du corps ou une fuite naturelle de cette folitude, & que cet état doit ceffer de convenir au.corps joint à des caufes étrangères qui le meuvent. Il eft donc faux que lc corps' feul ne foit pas en repos ; il est faux que pour le mettre en repos il foit befoin d'une autre caufe étrangère que celle qui lui donne fimplement l'éxiftence, & qu'il faille lui donner autre chofe que fon effence feule & féparée de toute caufe

le n. 259 jufqu'au 267.

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mouvante.

272. Cette même propofition (9) est combatue de plufieurs difficultez. Voici la premiere: le corps, dit-on, eft indifférent au mouvement & au repos : donc ni le mouvement ni le repos ne font des

fuites de la nature du

corps confidéré feul. 273. Je répons que le corps eft indiffé fent au mouvement & au repos, coinme il est indifférent à être feul ou accompa gné de causes mouvantes, c'est-à-dire, que le corps confidéré indépendemment de tout état de folitude & d'union avec des caufes mouvantes, & entant qu'il eft indifférent à ces deux états, eft auffi indifférent au mouvemenr & au repos. Mais on ne peut pas dire la même chofe du corps entant qu'il eft feul. La preuve en eft ci-deflus (·).

(r) Depuis le 274. Voici la feconde difficulté: Si l'on n. 250, jufôte toute cause étrangère, le corps n'est qu'au n.167. ni en repos ni en mouvement, mais il n'exifte point du tout, parcequ'il ne peut exifter que par la vertu d'une cause étrangère, qui eft la vertu Divine.

(s) N. 259.

renchefe du

n. 263.

275. Je répons à cela, que je fuppofe le corps éxitant, par quelque vertu que ce foit qu'il éxifte, comme il paroît par ce qui eft dit ci-deflus (s): car la propofition du n. 259, eft indépendante de toute opi- 260 & la pa. nion fur la caufe qui donne l'éxistence au corps (), quand on confidére le corps feul, comme nous le considérons ici, on le confidére éxistant: on fuppofe donc tout ce qu'il faut pour fon éxiftence, mais on ne confidére d'éxiftant que cette eflence, & ce qu'il faut pour lui donner fimplement être, fans y rien ajoûter de plus,

276 Voici la troifiéme difficulté. Íl ne faut pas plus de force, dira-t-on, pour qu'un corps foit en mouvement, que pour qu il foit en repos: car pour qu'un corps

(1) N. 260.

foit en repos, il faut & il fuffit qu'il foit N. 179. continuellement créé au même lieu (1); & pour qu'il foit en mouvement, il fuffic

qu'il foit créé fucceffivement en différens N. 180. licux (x): or il ne faut pas plus de force pour qu'un corps foit créé fucceffivement en différens lieux, que pour qu'il foit continuellement créé au même licu. Suppofons par exemple, que Dieu crée un corps au premier inftant dans un lieu que je nommerai A, pour mieux retenir le raifonnement; au fecond inftant dans un aulieu B; au troifiéme inftant dans un troifiéme lieu C, & ainfi de fuite, il feroit en G) N. 184. mouvement (y); au licu que fi Dieu créoit ce corps au premier inflant dans le lieu A, au fecond encore dans le lieu A, & au troifiéme encore dans le lieu A, ce corps feroit en repos (2): or dans le premier cas il ne faut pas plus de force que dans le fecond.

)N. 179.

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277. La preuve en réfulte de ce que comme avant le premier moment Dieu étoit également le Maître de produire ce corps ou de ne le point produire du tout: de le produire en A ou en B & il qu ne lui falloit pas plus de force pour le produire la premiére fois dans l'un que dans l'autre de ces lieux ; de même pendant le premier moment, le corps étant une fois produit en A, Dieu eft le maître de le produire ou ne le point produire du tout au fecond moment ; & par confequent également maître de le produire en A ou en B d'où il s'enfuit qu'il ne lui faut pas plus de force pour le produire au fe

cond moment dans l'un que dans l'autre de ces deux licux. Or le produire au fecond moment en A, c'eft le faire repofer; & le produire au fecond moment en B, c'eft le mouvoir: il ne faut donc pas plus de force pour produire un corps en mouvement qu'en repos, & toute la dé penfe confille à le produire.

que

278. Je demanderois volontiers à ceux qui font ce beau raifonnement, fi un corps qui va plus vite, n'a point plus de force qu'il n'en auroit s'il alloit plus lentement, S'ils répondent qu'un corps en mouvement qui va plus vite, a plus de force s'il alloit plus lentement, on leur montrera que cela eft contre leur propre fentiment. Car fi un corps en mouvement, quelque vite qu'il aille, n'a pas plus de force que s'il étoit en repos, ainfi qu'ils le foutiennent, les forces de tous les dégrez de viteffe d'un corps feront toutes égales entr'elles, étant les mêmes que les forces de ce même corps en repos, lefquelles font toujours uniformes & égales à elles-mêmes. S'ils répondent qu'un corps allant plus vite, n'a pas plus de force que s'il allit plus lentement, cette réponse s'oppofe aux idées que la nature nous a données des chofes. Il s'enfuivra qu'il est inutile de donner des régles de mouvement dans la Physique, comme les Cartéfiens en donnent, & de déterminer, comme ils font, ce qui doit arriver dans les différens felon les grofleurs & les viteflès des corps. Nous ne devons pas plus craindre un boulet fortant avec impétuofité du ca❤

cas

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