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que par-là pour fe mettre les uns les autres en mouvement ou en repos : or le repos ne pourroit jamais être furpaffé, ni même égalé par le mouvement, comme il ) N. 479. vient d'être démontré (y), puifqu ils seroient de nature différente; & par conféquent dans le fyftême de Mr Defcartes il s'enfuivroit qu'un corps gros comme la Baftille, quand il iroit avec la rapidité d'un boulet fortant du canon, ne remueroit pas un grain de fable qu'il trouveroit en repos, ce qui eft faux & contre le fentiment même de Mr Defcartes.

481. Pour achever de démontrer notre () N467 propofition (2) contre les Cartéfiens, il faut remarquer qu'ils ne peuvent nier que fi deux corps font de maffe & de viteffe inégale, de telle forte cependant que la mafle du plus gros foit à celle du plus petit comme la viteffe du plus petit à celle du plus gros, ces deux corps foient de forces égales; & que par conféquent fi le raport de la viteffe du plus petit à celle du plus gros eft plus grand que le raport de la maffe du plus gros à celle du plus petit, le petit foit plus fort. Cela fe conclut de ce que dit Mr Defcartes dans fa feptiéme régle du mouvement; d'où il s'enfuit qu'un corps plus petit en mouvement peut être plus fort qu'un autre corps plus gros auffi en mouvement: or la force de ce plus gros en mouvement, fi lentement qu'il aille, eft plus grande qu'elle ne feroit s'il étoit (a) N. 262 en repos (a): car que l'on prenne un corps & 278. que l'on voudra, qui aille fi vîte ou fi lentement que l'on jugera à propos, que

tel

l'on partage fa viteffe en tant de dégrez
que l'on voudra. Par exemple en cinq
nous aurons cette progreffion arithmétique
→S. 4. 3. 2. 1. o. il eft certain que les
forces de ce corps diminuent à mesure que
fa viteffe diminue, qu'il eft moins fort
avec quatre dégrez qu'avec cinq, moins
avec trois qu'avec quatre, moins avec deux
qu'avec trois, moins avec un qu'avec deux,
& moins avec zero qu'avec un. Or ce
corps avec une viteffe égale à zero eft en
repos (b); par conféquent la force de ce
corps en repos eft moindre
que
ce même corps en mouvement (c); d'où il
s'enfuit que fi un corps plus petit que lui
a été plus fort que lui pendant que ce plus
gros étoit en mouvement, à plus forte
raifon ce plus petit fera plus fort que ce
plus gros lorfque ce plus gros fera en repos.

celle de

(6) Depuis le n. 250, juf qu'au 25.3.

(c) N. 32

482. Mais puifque les forces des corps doivent s'eftimer par leur maffe & par leur viteffe (c), puifque les Cartéfiens ne peuvent en difconvenir; puifqu'ils convien-, & 332. nent que le raport de la vitefle d'un plus petit corps à celle d'un plus gros étant plus grand que le raport de la maffe du plus gros à celle du plus petit, ce plus petit eft plus fort, & que ces raports étant egaux, les forces de ces corps font égales, puifque la vitefle d'un corps en mouvement, fi petite qu'elle foit, a toujours plus grand raport à celle du corps en repos que la maffe du plus gros à celle du plus petit (d), le corps en repos n'ayant point de viteffe & le corps en mouvement fi petit qu'il foit ayant toujours de la mafle, pourquoi ne reconnoîtront-ils

(d) N. 346

(e) Du n. 4:57.

pas qu'un corps en mouvement, fi petie qu'il foit, fi lentement qu'il aille, elt plus fort qu'un corps en repos, fi gros qu'il foit, & que celui la peut vaincre celui-ci.

483. Mais fi nous avons des raisons contre les Cartéfiens, ils ne manquent pas auffi d'en produire contre notre propofition (e), il eft jufte de les entendre & de voir fi elles font convaincantes. Si un moindre corps qui eft en mouvement, difentils, pouvoit en remuer un plus gros qui eft en repos, il faudroit qu'il lui communiquât une vitesse déterminée : or c'est ce qui ne fe peut. Car fuppofons le corps A en mouvement & le corps Ben repos, que B foit double de A, le corps A ne peut mouvoir le corps B fans faire aller B, après la rencontre, auffi vite qu'il ira lui-mêN. 471, me (f) or plus B eft pouflé fort par A, plus il réfifte, c'est-à-dire que plus A ira vîte, ou tâchera de pouffer vîte le corps B, plus B lui réfiftera; en forte que B s'étant une fois trouvé plus fort que le corps A, le fera toujours quelque dégré de viteffe que l'on fuppofe dans 4.

484. Je répons en premier lieu que B en repos ne peut résister à recevoir du corps A la viteffe qui lui eft néceflaire pour que ces deux corps aillent enfuite avec une même viteffe vers un même côté, en diminuant à proportion celle de A. Les Cartéfiens n'ont jamais prouvé la propofition contradictoire, & cette propofition contradictoire n'eft pas claire par elle-même fans avoir befoin de preuve, au contraire on conçoit que B étant en repos eft hors

d'état

d'état de réfifter & encore plus d'augmenter fa résistance. Il cft vrai que fi B en repos s'étoit une fois trouvé plus fort que A en mouvement, il le feroit toujours (g); mais il n'est & ne fera jamais fi fort (h), bien loin de l'être plus.

485. Mais quand on accorderoit que le corps B en repos réfifte & qu'il résiste plus à un mouvement plus prompt qu'à un plus lent, que s'enfuivroit-il? & c'eft ̈ici ̄ma feconde réponse. Il s'enfuivroit feulement que par cette réfiftance il devroit retarder le corps qui le meut & lui faire perdre d'autant plus de vitesse qu'il en avoit plus avant la rencontre de B.

486. Mais, difent les Cartéfiens, fi le corps A a trois dégrez de viteffe, il ne peut mouvoir le corps B & le pouffer devant lui fans lui en communiquer deux & en retenir un pour lui; s'il en a 30, il faut qu'il en communique 20 ; & s'il en a 300, il faut qu'il en communique 200. Or B réfifte dix fois plus à recevoir du corps A 20 dégrez de vitefle & cent fois plus à en recevoir 200 qu'à en recevoir 2. De plus la perte feroit trop grande pour le corps A, & l'acquifition trop grande pour le corps B, puifque le corps A donneroit à B une fois plus qu'il ne garderoit pour

lui.

487. Je répons en premier lieu qu'à la vérité le corps A diminue fa viteffe de deux dégrez, mais il ne fait pas aller B avec deux dégrez de viteffe, il ne le fait aller qu'avec un feul dégré, puifqu'il ne le fait pas aller plus vite qu'il va lui-même (i),

I

(g) N. 479. & 480.

(h) N. 346 & 347.

(i) N. 457 & 471.

(4) Depuis len. 229, juf

qu'au 232.

(1) Depuis le n. 494 jufqu'au 500.

& qu'il ne va plus qu'avec un feul dégré ;
ainfi les deux dégrez de viteffe du corps A
partagez aux deux moiticz du corps B ne
font plus deux dégrez (k):or je ne voi
pas pourquoi les Cartéfiens veulent que
cette perte & cette acquifition foient trop
grandes.

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488. Je répons en fecond lieu que B ne
réfifte pas plus à recevoir 200 ni 20 dégrez
de viteffe quand la caufe eft proportionnée
pour lui en donner 200 ou 20, qu'à en
recevoir 2, quand la caufe n'eft porpor-
tionnée qu'à lui en donner 2 il faudroit
donc montrer que le corps A avec 3 dé-
grez de viteffe n'eft pas une caufe propor-
tionnée pour en donner 2 au corps B, avec
30 pour lui en donner 20, ni avec 300
pour lui en donner 200: nous montrerons
bien-tôt cette proportion (/).

489. Mais il eft bon de faire auparavant
obferver que fi un corps plus grand en re-
pos ne peut être mis en mouvement par
un plus petit, & que fi ce plus gros réfifte
plus à recevoir le mouvement que le plus
petit ne fait d'effort pour le lui communi-
il s'enfuit qu'un corps égal ne pourrą
être mû par fon égal, parceque le corps
en repos réfiltera autant à recevoir le mou
vement que l'autre fera d'effort
pour le lui
communiquer ; de même que le plus gros
réfilteroit plus: or ce qui fait une résistance
égale ne peut être vaincu.

quer;

490. Cette conféquence eft jufte, & il y a long-tems qu'on la voit bien. Le Pere Poiffon Cordelier n'avoit don ́ zien trouvé d'extraordinaire lorfqu'il ftoit publi

11

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C

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