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aucun être capable d'exclure l'existence de l'étendue, il eft porté à croire que l'étendue exifte néceffairement, & c'est ce que j'ai avancé au n. 36.

(8) N. 35.

(b) N. 5.2.

53. L'étendue doit auffi nous paroître infinie, parcequ'en quelque lieu que notre efprit veuille fe représenter des bornes dans l'étendue, il faut qu'au-delà de ces bornes il fe repréfente ou de l'étendue ou un être qui exclue l'existence de l'étendue : or on ne peut concevoir au-delà de ces bornes, par une idée intuitive, aucun être qui excluc l'exiftence de l'étendue; (g) il faut donc que l'idée de l'étendue vienne fe préfenter à l'efprit. Chacun prend cette idée pour l'étendue elle-même; (b) & par conféquent c'eft une néceflité quenoftre efprit fe repréfente de l'étendue au-delà de quelques bornes que ce foit, & qu'il se la repréfente comme exiftante; on prouvera, par le même raisonnement, que l'étendue doit naturellement nous paroître éternelle. 54. Quoique nous ne voyions ni ne concevions par une idée intuitive (i) aucun être capable d'exclure l'exiftence de l'éten- n. 20. duc, nous ne voyons pas qu'il n'y en ait point, nous favons d'ailleurs que notre ef prit ett borné, & qu'il ne fait pas tout; nous favons qu'il y a un Dieu Tout-Puiffant qui a librement tout fait de rien, qui conferve avec la même liberté tout ce qu'il a fait, de la libre volonté duquel il dépend que tout retombe dans le même néant dont il a été tiré.

(i) Voyez le

55. Il s'enfuit delà, quoi qu'en 'dife un (k) M. Da. XXX Auteur dont j'ai déja parlé, (k) que nous goumer.

B

(1) N. 2 & 3.

aurions grand tort de conclure que l'éten duc exifte néceffairement, & qu'elle foit infinie & éternelle, de ce que nous ne pouvons nous reprefenter toute étendue dé

truite.

56. Je remarque encore, en confidérant l'étendue, que nous n'avons point d'idée qui nous repréfente aucun fujet de l'étendue par fon effence, c'eft-à-dire () qui nous le repréfente lui-même; & fi nous voulons en concevoir un, nous n'en pouvons rien dire finon que c'est quelque chofe, que ce quelque chofe a la propriété de fubfifter en foi-même, ou de n'être point la façon d'un autre être que foi, & qu'il eft le fujet de l'étendue; de forte que nous connoissons plutôt l'étendue à laquelle il fe (m) N. 20, raporte, que lui. D'où il s'enfuit (m) que nous n'avons point d'idée intuitive qui nous repréfente aucun fujet de l'étendue.

& 21.

. 20.

57. Mais il eft aifé de démontrer qu'il eft (n) Voyez le impoffible d'avoir une idée intuitive (2) d'un mode, c'est à dire d'un être qui n'eft que la maniere ou la façon dont un autre être que lui eft, fans avoir l'idée intuitive du fujet dans lequel ce mode fubfifte; car en effet la manière dont une chofe cft, fi nous en croyons les Thomiftes, n'est autre que la chofe même en tant qu'exiftante de cette maniére là, ou pour parler plus exatement, la maniére dont une chose est, renferme l'effence & la nature de la chofe qui eft de cette maniére ; & par conféquent l'idée intuitive qui repréfente l'eflence de cette maniére doit renfermer l'idée intuisive qui repréfente l'eflence de la chofe qui

eft de cette maniére là, c'est-à-dire du fujet dans lequel cette maniére fubsiste. D'où il s'enfuit que l'étendue n'eft point X la manière d'un autre être qu'elle, que l'étendue fubfifte en elle-même & cft unc véritable fubftance.

58. Une troifiéme remarque que je fais en confidérant l'étendue, dont j'ai une idée intuitive, () c'eft que deux étendues peuvent bien être différentes dans leur figure, ou en ce que l'une eft en mouvement & l'autre en repos; mais cette différence eft dans ce qu'elles ont, & non pas dans ce qu'elles font chacune précifément en foimême & dans fon effence. L'une a le mouvement, l'autre a le repos, l'une a une figure ronde, l'aurre en a une quarrée; mais l'une & l'autre confiderée en ellemême précisément felon ce qu'elle eft & non point felon ce qu'elle a, cft unc longueur, une largeur & une épaiffeur, & rien autre chofe.

(0) N. 28.

59. Que fi l'on dit quelquefois que l'une de ces étendues eft ronde & que l'autre cft quarrée, on n'exprime pas pour cela (p) N. 11. ce qu'elles font précisément en elles-mêmes & dans leur effence précife, mais ce qu'elles ont, puifque les noms concrets rond, quarré fignifient: qui a la figure ronde, ou qui a la figure quarrée.

60. Il eft vrai que quelques Philofophes xxx imaginent deux fortes d'étendues; l'une divisible, mobile, folide & impénétrable, qu'ils nomment corporelle; l'autre indivifible, immobile & pénétrable, qu'ils difent être fpiritucile. Ils foutiennent que

$7.

ces deux étendues font différentes par leur ellence, que l'une eft dans un fujet fimple qui n'a point de parties, l'autre dans un fujet compofé de partics. La briéveté que je dois me propofer dans un Traité tel que celui que j'entreprens ici, ne me permet pas de les réfuter au long, je le réserve pour un autre Ouvrage, mais je peux leur dire ici en paffant que quand même je n'aurois pas (q) N. 56 & fuffifamment prouvé (q) que l'étendue n'a point d'autre fujet qu'elle-même ; & par conféquent qu'il eft contre la raifon de dire que l'une de ces étendues foit dans un fujet fimple & l'autre dans un fujet.compofé; ces différences, qu'ils imaginent entre ces deux étendues, ne fe trouvent point dans ce qu'elles font, mais feulement dans leurs raports; l'une a un raport d'aptitude & l'autre un raport d'oppofition à la féparation de fes parties, ce qui fait nommer l'une divifible & l'autre indivifible; l'une a raport à un fujet fimple & l'autre à un fujet compofé, mais ce n'eft point-là ce que chacune eft précisément en elle-même. L'une & l'autre est une vraie longueur, largeur & épaiffeur : elles différent par ce qu'elles ont, l'une ayant le pou voir & l'autre l'impuiflance d'être divifée, d'être pénétrée, d'être mife en mouvemais elles ne différent point par ce

ment;
qu'elles font,

61. On a beau même confidérer ces étendues, & les tourner en tout fens, on ne voit aucun fondement de ce raport d'op pofition à la divifion ou féparation d'es parties dans l'une plus que dans l'autre,

On ne conçoit point, par une idée intuitive (r) ce fujet fimple (s) ni ce fujet compofé dans lefquels on fuppofe qu'elles font, on fuppofe ces fujets fans les connoître; & quand même ces fujets feroient véritables, on ne voit pas qu'ils fiffent de différence dans l'effence de ces deux étendues, puifque la différence ne feroit point dans ce qu'elles font précisément, mais feulement dans le fujet auquel elles auroient raport.

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62. De ce que nous ne trouvons aucune différence dans l'effence de deux étendues, () il s'enfuit que nous ne concevons rien () N. 58. dans l'effence d'aucune étendue qui attache néceffairement une de fes parties à celles qui la touchent & qui l'environnent immédiatement, plûtôt qu'à d'autres parties de cette même étendue; parceque ne concevant point de diverfité dans l'effence de deux étendues, on ne peut en concevoir dans leurs propriétez; & fi-tôt que l'on ne conçoit point les parties de l'une incapables d'être féparées les unes des autres, on ne peut point concevoir les parties d'une autre étendue incapables de cette féparation.

(u) M. Da

goumer & fes Sectateurs, & mue, M. l'Hermi

63. Quand donc certains Philofophes (*) foutiennent qu'il y a une étendue immobile, dont aucune partie ne peut être ni par conféquent féparée de celles qui l'environnent & la touchent immédiatement, pour être enfuite environnée & touchée par d'autres je doute qu'ils puiffent avancer que cela vienne de l'effence de cette étendue, où ils d'avancent fans le conce

nier.

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