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l'existence continuée de ce mouvement: or ce mouvement étant tout entier dans une minute, ayant dans cette minute toute fon existence & toutes fes parties rangées les unes après les autres, & d'une maniére propre à mefurer la durée, auffi bien que dans l'efpace de douze heures ; qui pourra dire qu'il n'a pas en effet fa même durée toute entiére, réellement & abfolument auffi grande dans l'efpace d'une minute comme dans l'efpace d'une heure, & qu'une même durée demeurant toujours la même en foi fans augmentation ni diminution intérieure, ne peut pas changer de mefure relative & devenir plus ou moins grande par rapport aux durées des êtres

étrangers.

194. Mais fi cela eft, ne pourra-t-on point dire le même de l'étendue ? une longueur de cent pieds demeurant toujours la même en foi, fans y rien ajoûter, & fans en rien retrancher, ne pourra-t-elle point devenir longueur d'un pouce ou d'une ligne par rapport aux autres longueurs : car enfin qu'y a-t-il dans une longueur de cent pieds pour l'empêcher de devenir longueur d'une ligne, qui ne fe trouve dans le mouvement de douze heures pour l'émpêcher de devenir mouvement d'une minute? Unc longueur de cent pieds a des partics qui doivent être les unes hors les autres bien rangées, fans fe pénétrer les unes les autres; elle a deux bouts à cent pieds l'un de l'autre, entre lefquels toutes ces parties doivent tenir rangées fans confufion. Le mouvement de douze heures n'a-t-il pas

auffi des parties qui doivent être les unes hors des autres par rapport au tems, c'està-dire les unes après les autres, fes deux bouts, c'est-à-dire fon commencement & fa fin ne font-ils pas à douze heures l'un de l'autre ; toutes les parties de ce mouvement ne doivent-elles pas fe trouver rangées fans confufion les unes après les autres entre ces deux bouts? Pourquoi donc les deux bouts de ce mouvement pourront-ils fe rapprocher l'un de l'autre, n'être plus diftans que d'une minute; contenir entr'eux tout ce qu'ils contenoient auparavant & auffi bien rangé l'un après l'autre & fans confufion qu'il l'étoit, pendant que la même chose ne pourra arriver à proportion dans une longueur de cent pieds.

195. Le mouvement, dira-t-on, n'est qu'une manière d'être & l'étendue est une fubftance; mais que cela peut-il faire à notre difficulté. Ce mouvement tout mode ou maniére d'être qu'il eft, n'eft-il pas compofé de plufieurs mouvemens, plus petits en durée & en efpace parcouru les uns que les autres à l'infini, comme la longucur eft compofée de plufieurs longueurs plus petites les unes que les autres à l'infini? tous ces mouvemens ne doivent-ils pas être les uns après les autres comme toutes ces longueurs, les unes hors les autres ou à côté des autres ? tous ces mouvemens ne doivent-ils pas être contenus entre les deux bouts ou entre le commencement & la fin du mouvement total, comme toutes ces longueurs entre les deux

bouts de la longueur entiére & totale. Que fait donc ici la qualité de mode ou de fubftance, pour que les deux bouts de l'un éloignez l'un de l'autre de douze heures puiffent fe rapprocher, n'être qu'à une minute l'un de l'autre fans ceffer de contenir entr'eux tout ce qu'ils contenoient auparavant, & auffi bien rangé qu'il l'étoit, & que les deux bouts de l'autre éloignez de cent pieds ne puiffent pas fe rapprocher à une ligne l'un de l'autre, fans cefler de contenir tout ce qu'ils contenoient, rangé comme auparavant.

196. On conçoit, dira quelqu'un, la viteffe & la lenteur dans le mouvement, & on ne conçoit rien de femblable qui puiffe changer une même longueur fans y ajoûter & fans en ôter; mais cette viteffe & cette lenteur font la chofe même en question. Cette vitefle confifte précisément en ce que ce mouvement eft tout entier en peu de tems fans confufion de fes parties; cette lenteur confifte précisément en ce que ce même mouvement fe trouve remplir un grand efpace de tems fans interruption de parties. Si l'expérience nous avoit fait voir des étendues s'alonger & fe racourcir fans y rien ajoûter & fans en rien ôter, fans augmenter la largeur ni l'épaiffeur, nous aurions donné un nom à ce changement, comme nous en avons donné aux changemens de durée d'un même mouvement; mais ce nom donné ne rend pas la chose plus intelligible d'un côté que de l'autre.

197. Que de conféquences s'enfuivent

de tout ceci que de folides réponses fe
préfentent pour fatisfaire ceux qui pour
prouver le vuide, veulent fuppofer tout
l'efpace détruit entre trois globes, fans
qu'il y rentre d'autres corps! qui deman-
dent fi les furfaces de ces globes fe touche-
ront entièrement par les côtez qui étoient
tournez les uns vers les autres, & fi ce
fera avec mouvement ou fans mouvement;
qui difent
que ce ne peut être avec mou-
vement, puifqu'il ne refte plus d'efpace
entr'elles à parcourir ; & que fi c'eft fans
mouvement, aucun point de ces furfaces
ne s'éloigne du centre du globe auquel il
appartient d'où il s'enfuit que tous les
points de ces furfaces demeurent toujours
également éloignez du centre de leur glo-
be & que ces furfaces reftent fphériques,
& par conféquent ne peuvent fe toucher
tout-à-fair, mais feulement par trois points;
d'où il s'enfuit qu'il refte de l'efpace entre
ces trois globes, que l'efpace ne peut être
détruit & qu'il n'eft pas corps.

(n) Fin du

198. Ne voit-on pas, dis-je (2), 1o. Que nous ne concevons point par une idée in- n. 35. tuitive la deftruction de l'espace ni d'aucune de ces parties; que nous ne pouvons par conféquent répréfenter par des idées intuitives les fuites de cette deftruction. 20.(0) Qu'il ne s'enfuit pas delà que l'efpace ne puiffe pas être détruit. 3o. Qu'en ce cas en raifonnant fur les idées abstractives que nous pouvons avoir de cette deftruction, il faut dire que les furfaces de ces globes fe toucheront entièrement par le côté par où elles étoient tournées les unes vers les

(0) Par le n.

4. & 55.

autres, qu'elles cefferont d'être fphériques, que toutes les lignes tirées de chacun des points de ces furfaces au centre du globe dont elles font, demeureront les mêmes en elles-mêmes, puifque ces points ne s'écarteront du centre par aucun mouvement (p) N. 184. de la quatriéme forte (p); mais qu'elles feront cependant inégales entr'elles, & que leur grandeur abfolue demeurant toujours la même, leur grandeur relative se trouvera entiérement changée.

199. Mais fans m'arrêter à ces réponses, qui font folides, quoiqu'abftraites & difficiles à entendre, & me tenant à celle 49) N. 178. dont j'ai parlé ci-deffus (q); je remarque encore que ce feroit à grand tort que les hommes refuferoient de croire le mystere de nos autels, & de reconnoître que le corps du Sauveur tout entier tel qu'il étoit fur la Croix & tel qu'il eft au Ciel, fans en rien retrancher, peut être contenu fous la moindre petite particule fenfible de l'Hoftie, avec fes parties auffi bien rangées que dans fa grandeur naturelle. Qu'ils ne refufent point de croire dans un miracle de la main toute-puiffante de Dieu, un effet femblable à celui qu'ils font obligez d'admirer tous les jours dans les effets de la nature, c'est-à-dire dans un mouvement qui contient la durée d'un jour, & qui peut fans rien perdre, fans rien retrancher de ce qu'il eft, être contenu dans l'efpace d'une minute.

200. Revenons préfentement à notre *) Du a. ̈sujet (*), & convenons que quoique l'ex

190.

périence nous montre la quatrième espéce

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