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Deut.XXVIII.

53.

Luc. XXIII. 9.

XL.

Le temple pris & brûlé.

mere. Ils fortirent de la maifon en tremblant : & le bruit de cette abomination se répandit bientôt par toute la ville. Chacun en eut horreur,commeli lui-même l'eût commife, & envia la condition de ceux qui étoient morts, avant que de voir un tel défaftre. Les Romains curent peine à le croire, quelques-uns en eurent pitié, la plûpart en furent plus animez contre cette malheureuse nation. Tite protesta encore devant Dieu : que c'étoit eux, qui avoient voulu la guerre, & qui avoient refufé la paix & l'amniftie qu'il leur offroit. Ainfi fut accomplie la menace que Dieu avoit faite par Moïfe à tout fon peuple en general : & la prophetic particuliere de J. C. aux femmes de Jerufalem: qu'un jour viendroit où l'on estimeroit heureux les ventres ftériles, & les mammelles qui n'auroient point alaitté.

Le huitième d'Août les Romains attaquerent la feconde enceinte du temple: ils ne purent Jof. v1.Bell.c.9. abattre les murs avec leurs beliers, ni déraciner les feüils des portes, à caufe de la grandeur des pierres, & de la force de leurs liaifons: ils ne purent auffi efcalader les galeries, à caufe de la résistance des Juifs. Tite fut donc contraint de faire, ce dont le refpect du lieu l'avoit détourné jufques alors: & ce même jour fit mettre le feu aux portes de la feconde enceinte du temple. Le feu gagna les galeries; qui brûlerent le refte de ce jour là, & toute la nuit suivante. Tite, & fes capitaines, vouloient conferver le

corps du temple:mais le dixiéme d'Août les Juifs qui gardoient le temple ayant fait une fortie fur les Romains qui travailloient par ordre de Tite à éteindre le feu de la feconde enceinte; furent repouffez dans le corps du temple. Alors un fol- vII. Bell. c. xos dat Romain, fans attendre l'ordre, mais pouffé comme d'un mouvement furnaturel; prit un ti fon à ce feu, & foulevé par un autre foldat, le jetta dans une des fenêtres dorées des cabinets, qui tenoient au temple du côté du feptentrion, Le feu prit auffi-tôt : Tite y accourut lui-même. Mais le tumulte étoit tel, qu'il ne pût fe faire obéïr : le feu penetra au dedans même du temple, & le confuma entierement: quelque foin que prit Tite pour le faire éteindre. Ainfi fut accomplie la Matth. xxiv. 2. prophetie de J. C. qu'il n'y refteroit pas pierre fur pierre. Ce fecond temple fut brûlé le même jour du même mois que le premier avoit été brûlé par Nabucodonofor : c'est-à-dire le dixième du mois Judaïque nommé Ab; qui eft le cinquiéme, depuis le mois de la pâque nommé Nifan. Comme ces mois font purement lunaires, il eft difficile de les ajuster aux nôtres : mais j'ai fuivi l'ancien interprete de Jofeph, qui exprime par les mois Romains, les mois Macedoniens dont Jofeph a pris les noms: quoique Jofeph ait en effet voulu matquer par ces noms les mois Judaïques, qui y répondent à peu prés.

Jerem. 111. 12.

Tout ce qui le trouva dans le temple fut maf- Jof.v1.Boll.c.3mi sacré, sans distinction d'âge, de fexe, de condi

ibid. c. 40.

An. 70.

tion : l'autel étoit environné de corps entassez : le pavé ne paroiffoit point, tant il étoit couvert de fang & de carnage. Il n'y eut que les féditieux qui s'échaperent l'épée à la main, & gagnerent le mont de Sion. Entre le peuple qui périt dans le temple, il y avoit fix mille perfonnes, hommes, femmes, enfans, qu'un faux prophete avoit abufez, & y avoit fait monter de la ville: difant que Dieu l'ordonoit, & qu'ils y recevroient de fa part des fignes de falut. Il y avoit plufieurs impofteurs femblables, dont les tyrans fe fervoient pour retenir le peuple, & l'empêcher de paffer vers les

Romains.

Le temple étant brûlé, les Romains planterent leurs enfeignes devant la porte orientale, & leur facrifierent à la place même; c'est-à-dire aux idoles, dont leurs enfeignes étoient chargées. Les féditieux avoient gagné la ville haute. Tite les fomma de fe rendre à difcretion, la vie fauve : mais il demanderent qu'il leur permît d'aller dans le defert, avec leurs femmes & leurs enfans. Tite irrité de leur infolence, fit brûler toute la ville baffe, & attaqua la ville haute: où les Romains entrerent par la breche, le huitiéme de Septembre ou Gorpiée, jour du fabat, la feconde année de Vefpafien, foixante & dix de J. C. & y mirent tout à feu & à fang. Tite acheva de faire abattre ce qui reftoit du temple, & de la ville, & y fit paffer la charue. Il referva feulement une partie de la muraille à l'occident; avec trois tours, Hip

pique, Phafael & Mariamne: afin que leur beauet voir la pofterité un échantillon de cette malheureufe ville, auparavant fi magnifique. Le butin fut fi grand, que l'or diminua de la moitié de fon prix e Syrie.

:

lib.6.c. 14.

On trouva dans les égouts foûterrains environ deux mille corps de Juifs morts de faim, ou de maladie ou qui s'étoient tuez les uns les autres, plûtôt que de fe rendre aux Romains. Les deux tyrans Jean & Simon, qui s'y étoient cachez, fe v.1.Bill.c.7. rendirent à la fin, & furent gardez pour le triomphe. On compte jufques à onze cens mille Juifs morts en ce fiege, & quatre-vingt-dix-sept mille vendus; mais à peine vouloit-on les acheter. Tite refufa des couronnes, que les nations voifi- Philoftr. Apollo nes lui offroient, pour honorer sa victoire. Il dir, que ce n'étoit point fon ouvrage : & qu'il n'avoit fait que prêter fes mains à la vengeance de Dieu irrité contre les Juifs. Pour garder les ruïnes de Jerufalem, il y laiffa une légion : & avec deux Jovi. Bell-e autres retourna à Cefarée, où il affembla tous les 4.6. captifs, & tout le butin ; & y demeura le refte de l'année foixante & dix: attendant le temps propre pour le mettre en mer, & paffer en Italie. A la fête de la naiffance de fon frere Domnitien, ibid. c.8. qui étoit le 30. de Decembre, il y eut plus de deux mille cinq cens Juifs qui perirent : foit par le feu, foit par les bêtes aufquelles ils furent expofez:foit les uns par les mains des autres, comme gladiateurs. Il perit encore un grand nombre de ces miferables

An.71. Bid. c. 9.

ibid.c.16.17.

captifs, aux jeux que Tite fit à Beryte en Phenicie, pour celebrer l'anniversaire de l'avenement de fon pere à l'empire:qui fut le premier de Juillet de l'année fuivante foixante & onze de J. C.

Tite alla enfuite à Antioche:où les Juifs étoient accufez d'avoir brûlé la place carrée, les archives, legreffe & les bafiliques. On eut bien de la peine à retenir le peuple, qui les vouloit massacrer:mais il fut verifié, que c'étoit des gens oberez, qui avoient commis ce crime: pour fe délivrer des pourfuites de leurs creanciers. Tite y étant venu, les citoyens le prierent d'en chaffer les Juifs : ou du moins, de leur ôter leurs privileges. Mais il refufa l'un & l'autre : & les Juifs demeurerent à Antioche comme devant. Tite vifita les autres villes de Syrie, puis il revint par la Judée & par Jerufalem en Egypte : & s'embarqua à Alexandrie. Aprés qu'il fut arrivé à Rome, il triompha de la Judée avec fon pere.

En ce triomphe furent menez Jean & Simon chefs des féditieux, avec fept cens Juifs, des plus forts & des mieux faits. Simon, comme chef des ennemis, fut executé à mort, fuivant la coûtume. En ce même rriomphe fut porté la table, le chandelier d'or à fept branches, & ce que l'on avoit confervé des vaiffeaux facrez du temple: princiJof.B..19. palement le livre de la loi, qui fut gardé dans le palais, avec les rideaux de pourpre du fanctuaire. Velp. to. 2. p. On voit encore à Rome l'arc qui fut bâti pour ce triomphe, où paroiffoient en bas relief de marbre

5-7.

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