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Apolog. 1. p. 50. · A. edit. 1615.

XXXVII.

de S. Juftin.

ardent pour les prophetes & pour les amis de J. C. & il connut que cette doctrine étoit la feule philofophie feure & utile.

Il dit encore ailleurs: Moi-même aimant la doctrine de Platon; comme j'entendois calomnier les chrétiens, & voyois qu'ils ne craignoient point la mort ni tout ce qui est estimé le plus terrible : je compris qu'il eftoit impoffible qu'ils vêcuffent dans le vice & dans l'amour de la volupté. Car,difois-je, qui eft l'homme volupteux, ou intemperant, jusques au point d'être friand de chair humaine: qui cherche la mort pour se priver luimême de fes biens ? Et qui ne cherche pas plûtôt à vivre toûjours en ce monde & à fe cacher aux magistrats, loin de se dénoncer lui-même, & être mis à mort ? C'eft ainfi que S. Justin raporte les motifs de fa converfion. Il ne ceffa pas étant chrétien, de garder l'habit de philofophe comme plufieurs autres.

pour

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Il compofa une apologie pour les chrétiens Premiere apoiogie l'an de J. C. cent cinquante, & y mit hardiment ce titre : A l'empereur Titus Elius Adrien Antonin, pieux augufte, Cefar: & à fon fils Veriffime philofophe. Et à Lucius philofophe, fils de Cefar felon la nature & de l'empereur par adoption, amateur de la science : & au facré fénat, & à tout le peuple Romain. Pour les perfonnes de toutes conditions qui font haïs & maltraitez injustement. Justin fils de Prifcus Bacchius natif de Flavia, ou Naples de Pales

tine,

tine, l'un de ces persecutez,présente cette requête. S. Justin nomme ici d'abrod l'empereur qui étant fils adoptif d'Adrien, en portoit les noms: puis il nomme les deux fils adoptifs de l'empereur. Le premier étoit Marc Annius Verus: que l'empereur Adrien nommoit Veriffime,& qui prit auffi les noms d'Aurele & d'Antonin, depuis qu'Antonin le pieux l'eut adopté. Son autre fils adoptif étoit Lucius Ceïonius Elius Commodus Verus Antonin; fils de Lucius Cebonus Commodus Verus, qu'Adrien avoit adopté, & l'avoit nommé Elius Verus. Les empereurs, principalement depuis Adrien, fe piquoient de philofophie & de litterature & tenoient à honneur le titre de philofophes. C'est pourquoi S. Juftin commence ainfi fon apologie.

La raifon nous enfeigne, que ceux qui font véritablement pieux & philosophes, n'estiment & n'aiment que la verité: fans s'arrêter aux opinions des anciens, fi elles font mauvaifes. On vous nomme par tout pieux & philofophes on dit que vous gardez la juftice, & que vous aimez la doctrine, l'effet montrera ce qui en est. Car nous ne prétendons pas vous flatter par cet écrit, mais vous demander justice fuivant la plus exacte raifon: & vous prier de n'écouter, ni les préjugez, ni la complaifance pour les fuperftitieux, ni la paffion, ni les faux bruits femez depuis longtemps, pour rendre des jugemens qui vous nuiroient à vous-mêmes. Pour nous, nous fommes Tome 1,

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54.C.

perfuadez que perfonne ne nous peut faire du mal, tant que l'on ne pourra nous convaincre d'être des malfaicteurs. Vous pouvez nous faire mourir, mais vous ne pouvez nous nuire. Et afin que l'on necroye pas, que ce difcours eft temeraire; nous prions que l'on informe exactement des crimes que l'on nous objecte. S'ils font prouvez, qu'on nous puniffe comme ils meritent,& même plus rigoureufement: fi on ne trouve en nous rien à reprendre, la droite raifon ne veut pas que vous maltraitiez des innocens, à caufe d'un faux bruit: ou plûtôt que vous vous faffiez tort à vous-même, en puniffant par paffion, & non par juftice. La forme légitime des jugemens eft, que les fujets rendent un compte fidele de leur vie & de leurs difcours: & que les princes jugent, non par violence & par tyrannie, mais fuivant la pieté & la fageffe.. C'est donc à nous à expofer à la veûe de tout le monde nôtre vie & nôtre doctrine, de peur que nous n'ayons fujet de nous imputer les crimes, que l'on commet contre nous, par ignorance. C'est à vous à nous montrer, que vous êtes de bons juges. Car, fi aprés cette inftruction, vous n'agiffez pas justement, vous n'aurez plus d'ex

cufe devant Dieu.

Il montre ensuite l'injustice qu'il y a de condamner les chrétiens fur le feul nom : en forte qu'il fuffit de l'avouer, pour être reputé convaincu, & de le nier pour être abfous, quoique pluGeurs portaffent à tort ce nom : ne fuivant point

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les préceptes de J.C. comme il y avoit plufieurs
philofophes, qui ne l'étoient que de nom. Il dit
que les démons, auteurs de l'idolatrie, ont pro-
curé la mort de Socrate, qui les combattoit par
la raifon : & perfecutent de même les chrétiens,
difciples de la raifon incarnée,qui eft J. C. Il ajoû
te: Parce que nous n'adorons pas cès démons,
on nous nomme athées, & nous demeurons d'ac
cord de l'être à l'egard de tels Dieux : mais non à
l'égard du vrai Dieu, pere de la justice, de la
chafteté & de toutes les autres vertus, fans mé-
lange d'aucun vice. Avec lui nous honorons &
adorons le fils qui eft venu de lui, & nous a en-
feigné toutes ces veritez & l'efprit prophetique.
Il marque que la vie éternelle en la compagnie
de Dieu, eft leur unique efperance, & qu'ils at-
tendent un jugement aprés la mort: qui fera
exercé; non par Radamante & Minos, comme
Platon avoir dit: mais par J. C. devant qui les
hommes feront prefentez en corps & en ame, &
les coupables punis d'une peine éternelle. Il al-
legue fouvent les philofophes & les poetes, à cau-
fe de la grande autorité qu'ils avoient chez les
payens leur montrant ainsi, que la doctrine de
J.C. n'étoit pas abfurde ou incroyable.

Il dit encore: Quand on vous dit, que nous ́attendons un roïaume: vous croyez fans difcernement, que nous parlons d'un roïaume humain: au lieu que nous parlons de celui de Dieu. Ce qui est clair par la confeffion que nous

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faifons du chriftianisme, sachant qu'il y va de la vie. Si nous attendions un roïaume terreftre, nous nierions, nous nous cacherions, pour nous conferver & en jouir, mais comme nos efperances ne font pas pour cette vie : nous ne nous foucions pas d'être tuez, sachant qu'il faut to ̈jours mourir, De tous les hommes nous fommes les plus propres à concourir avec vous pour la paix, étant perfuadez qu'il eft impoffible que personne fe cache de Dieu, ni le méchant, ni l'avare, ni le traître, ni l'homme de bien: & que chacun marche à un fupplice ou à un falut éternel, felon le merite de fes actions. Car fi tous les hommes connoiffoient ces veritez: perfonne ne choifiroit le vice pour un peu de temps, fachant qu'il le conduiroit au feu éternel; mais il n'y auroit rien qu'il ne fit, pour fe contenir & acquerir la vertu: afin d'obtenir les biens qui viennent de Dieu.. Ni vos loix ni vos fupplices ne retiennent point les méchans: ils favent que l'on peut fe cacher de vous, qui n'êtes que des hommes: mais s'ils étoient perfuadez qu'il y a un Dieu, à qui il est impoffible de rien cacher, non-feulement de nos actions: mais de nos penfées: vous conviendriez vous-mêmes, que la crainte au moins les rendroit fages. Mais il femble que vous craigniez que tout le monde ne vive bien, & que vous n'ayez plus perfonne à punir. Pensée plus digne de Bourreaux que de bons princes.

Il explique la doctrine des Chrétiens, disant

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