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que nous n'avons pas apris, ni la force du ftile, ou l'ornement des paroles. Mais recevez avec charité, ce que nous vous écrivons avec charité, fimplement & veritablement ; & que vous faurez bien augmenter, étant plus capable que nous. On ne fçait pas le nom de celui à qui S. Irenée adresse fon ouvrage : mais on ne peut prefque douter, que ce ne fût un évêque, par la maniere dont il lui parle, comme à celui qui devoit inftruire les autres. Lion, dont S. Irenée étoit évêque, étoit capitale de la Gaule Celtique : & la langue barbare qu'il parloit étoit le gaulois, ou même le latin; que les Grecs regardoient comme tel. Car pour lui, qui étoit venu d'Asie, sa langue naturelle étoit le grec, Auffi avoit-il écrit en grec cet ouvrage : mais nous n'en avons plus qu'une ancienne verfion latine, avec quelques fragmens de l'original. Il eft divifé en cinq livres. Le premier contient l'expofition de la doctrine des Valentiniens,dont il explique le fyftême tout

au long. Il met à la fin le dénombrement de tous zb. 1. c. 20. 11 ̧ les heretiques, qui avoient paru jusques alors :fui- &c. vant l'ordre des tems, depuis Simon le magicien jusques à Tatien.

Lib

c.

Il commence dans le fecond livre à les refuter. 11. 1o. & Et comme ils s'appuyoient principalement fur les & 46. paraboles de l'évangile, en leur donnant des explications arbitraires : il donne des principes,pour F'intelligence de l'écriture. S'attacher principalement à ce qui nous eft mis clairement devant les

Yyy iij

C. 40. 42. 43.

yeux: par des paroles propres ; comme : qu'il n'y a qu'un Dieu, & qu'il eft créateur de toutes chofes: puis fe fervir de ces paffages clairs, pour expliquer ceux qui font obfcurs: au lieu que les heretiques expliquoient les énigmes, par d'autres plus grands énigmes. Il montre l'abfurdité des mysteres qu'ils trouvoient dans les nombres, & dans les lettres greques qui les marquent ; parce que ces rapports font arbitraires. Il demeure d'accord que Dieu ne fait rien au hazard, & que tout ce que nous lifons dans l'écriture, a des raifons profondes : mais il foutient qu'il n'est pas donné aux hommes de les penetrer; & qu'il ne faut pas former la regle de la foi fur des nombres: mais expliquer les nombres, fuivant la régle de la foi : & donner des bornes à la curiofité. J. C. a dit, que M.th. z. 30.645. les cheveux de nôtre tête font comptez. Faut-il donc entreprendre d'en fçavoir le nombre, & les raifons pour lesquelles une tête en a plufieurs milliers plus que l'autre ? On trouveroit des myfteres, fi l'on vouloft, fur le nombre des étoiles, ou des grains de fable.

XXIV.

pheties.

c. so.

Il oppofe aux vains preftiges des heretiques, les Miracles & pro- vrais miracles, qui étoient encore alors frequens dans l'églife. Ils ne peuvent, dit-il, donner la vûë aux aveugles; ni l'oüie aux fourds, ni chasfer les démons, fi ce n'eft ceux qu'ils envoyent eux-mêmes ; tant s'en faut qu'ils réfufcitent un mort; comme le Seigneur a fait, & les apôtres. Et entre les freres fouvent, pour quelque néces

fité, toute l'églife d'un lieu l'ayant demandé,avec beaucoup de jeûnes & de prieres, l'efprit d'un mort eft retourné dans fon corps; & la vie d'un homme a été accordée aux defirs des Saints. Ils font fi éloignez de le faire, qu'ils ne le croyent pas même poffible : & appellent réfurrection leur prétendue connoiffance de la verité. Il ajoûte,que dans l'église, non seulement ces miracles fe faifoient gratuitement, mais fouvent l'on donnoit encore l'aumône à ceux que l'on avoit gueris. Et enfuite parlant des heretiques:

Leurs prétendus miracles n'ont aucune utilité. Mais ils font venir de jeunes enfans, & trompent les yeux en montrant des phantômes qui cessent auffi-tôt & ne durent pas un moment; par où l'on voit, qu'ils reffemblent non à N. J. C. mais à Simon le magicien. Et enfuite parlant de J. C. Ceux qui font veritablement fes difciples, ayant reçû de lui la grace, opérent en fon nom, pour le bien des autres hommes: chacun fuivant ce qu'il leur a donné. Les uns chaffent les démons furement & véritablement : en forte que fouvent ceux qu'ils en ont délivrez, embraffent la foi & demeurent dans l'églife. Dautres ont la science des chofes futures, des vifions, & des difcours prophetiques. D'autres guérissent les malades par l'impofition des mains, & leur rendent la fanté parfaite. Nous avons déja dit, que des morts font réfufcitez & ont demeuré avec nous plufieurs années. Enfin on ne peut dire le nombre des

C. 57:

lib. v. c. 6.

lib. 111. c. I.

Eufeb. v. hift.c. 8.

merveilles que l'églife opere chaque jour, par tout le monde, pour l'utilité des nations: au nom de J. C. crucifié fous Ponce Pilate. Et elle le fait fans artifice & fans intérêt; car comme elle a reçû de Dieu gratuitement ce pouvoir, elle l'exerce gratuitement. Sans ufer d'invocation des anges: il entend les invocations fuperftitieufes des heretiques; ni d'enchantemens, ni d'aucune mauvaife curiofité: mais purement & à découvert, elle adreffe fes prieres à Dieu créateur, & invoque N. S. J. C. Son nom attire ces graces,& non ceux de Simon, de Menandre, de Carpocrate, ou de quelqu'autre. Il dit encore ailleurs: Nous aprenons que plufieurs freres dans l'églife ont des graces profétiques : parlant toutes fortes de langues ; par la vertu du S. Efprit: découvrent aux hommes, pour leur utilité, ce qu'ils ont de plus caché, & expliquent les myfteres de Dieu.

Dans le troifiéme livre, S. Irenée prouve la doctrine de l'églife catholique, par l'écriture & par la tradition. Il dit que les apôtres n'ont préché qu'après avoir reçû la connoiffance parfaite, & ajoûte : Mathieu a donné aux Hebreux l'évangile écrit en leur langue, tandis que Pierre & Paul préchoient à Rome, & y fondoient l'églife. Aprés leur fortie, Marc difciple & interprete de Pierre, nous a auffi donné par écrit, ce que Pierre avoit prêché. Et Luc qui fuivoit Paul, a mis en un livre l'évangile, que Paul avoit enseigné. Enfuite Jean, le difciple du Seigneur, qui avoit repofé

ibid. p. 159.

6. 2.

repofé fur la poitrine: a auffi donné fon évangile, demeurant à Ephefe en Afie. Il ajoûte, que S. Jean lib.3.c. 2. p.256. Aò écrivit fén évangile contre les erreurs de Cerinte & des Nicolaïtes. Il dit: Qu'il ne peut y avoir ni plus ni moins de quatre évangeliftes, & applique aux évangeliftes le myftere des quatre animaux de l'apocaly fe. Il marque l'artifice des heretiques, qui étant preffez par l'écriture, avoient recours à la tradition : & convaincus par la tradition revenoient à l'écriture; accufant les apoftres d'avoir mêlé le judaïsme au christianisme, & deguilé leur doctrine, pour l'accommoder à leurs auditeurs.

6. Sa

XXV. Tradition de l'è

lib. 1 1 1. 6. 3.

Il prouve la tradition par la fucceffion des évêques. Nous pouvons compter dit-il, ceux que les glife romaine. apoftres ont établis évêques dans les églifes, & leurs fucceffeurs jusques à nous, qui n'ont enseigné rien de femblable à ces réveries. Car fi les apoftres euffent fçû des myfteres, qu'ils n'euffent enfeignez qu'aux parfaits: ils les euffent principalement enfeignez à ceux, à qui ils confioient les églises mêmes. Car ils choififfoient les plus parfaits, pour en faire leurs fucceffeurs, & leur laiffer la charge d'enfeigner à leur place ; fachant de quelle importance feroit leur bonne ou leur mauvaise conduite. Mais parce qu'il feroit trop long de compter les fucceffions de toutes les églifes; nous nous contenterons de marquer la tradition de la plus grande & la plus ancienne églife connuë de tout le monde, fondée & établie à Rome, par Tome 1. Zzz

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