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l'arbre, continue à en tirer de la nourriture, ce qui facilite fon union avec le fujet, & fon accroiffement. On ne le fevre, c'est-à-dire, on ne le coupe (au deffous de la ligature qu'on retire enfuite) que lorsqu'on eft affuré qu'il eft bien uni avec le fujet.

OBSERVATIONS.

I. J'AI repété, jufqu'à l'ennui, qu'il faut faire coïncider, rapporter exactement, placer de niveau, dans la même direction, &c. les libers de la greffe & du fujet. C'eft que de ce point dépend le fuccès de l'opération. Pour le comprendre, il faut fe fouvenir que la tige, les branches & les racines des arbres, ne font formées que de cylindres ligneux appliqués les uns fur les autres: Que chaque année il fe forme un nouveau cylindre: Que l'accroiffement d'un arbre n'eft qu'une addition de nouveaux cylindres: Que ces cylindres fe forment entre le bois & l'écorce intérieure ou liber de l'arbre : Que lorfqu'on place un écuffon ou autre greffe corticale fur la furface ligneufe d'un fujet, il fe forme de la feve de la greffe un feuillet ligneux entre cette furface ligneufe du fujet & le liber de la greffe, qui fe joint & s'unit à un feuillet

ligneux qui fe forme en même tems entre le bois & l'écorce du fujet : or, ces feuillets ligneux de la greffe & du fujet ne s'uniffent, que parce qu'ils fe trouvent parfaitement de niveau & coïncidents: Que de même, entre le bois & le liber des greffes en fente & en couronne, il se forme un feuillet ligneux, & qu'il en fort un pareil des bords de la fente du sujet, entre fon bois & fon liber; mais ces feuillets, pour fe rencontrer, se joindre, s'unir & former le nouveau cylindre ligneux, doivent se trouver dans un rapport, une correfpondance, une coïncidence parfaite, comme en A, C, fig. 3, & fi l'entre-deux du bois & du liber de la greffe n'eft pas placé exactement vis-à-vis de celui du fujet, comme en B, D, la greffe périt, parce que fes productions ne peuvent se joindre & s'unir à celles du fujet.

II. LES Végétaux, comme les Animaux, rejettent les alliances étrangères, & n'en forment de folides & de durables qu'avec les individus de leur efpece & de leur famille: ainfi greffer un Pêcher fur un Saule, un Poirier fur un Orme, un Cerifier fur un Chêne, &c. c'eft perdre fon tems & fa peine. Pour que l'union de la greffe avec le fujet foit sûre, facile & durable,

il faut qu'il y ait entr'eux reffemblance, rapport, analogie, non-feulement dans la conftruction & la difpofition des organes; mais dans les qualités de la feve, la faifon & la durée de fon mouvement. Un Poirier & un Pommier fe greffent mal l'un fur l'autre, parce que la conformation des organes & la qualité des humeurs font différentes. Le Pêcher réuffit bien fur le Prunier & fur l'Amandier; mais le Prunier & l'Amandier ne peuvent fubfifter long-tems l'un fur l'autre, parce que la feve de l'Amandier femet beaucoup plus tôt en mouvement, s'arrête beaucoup plus tard, & par conféquent dure beaucoup plus long-tems que celle du Prunier. Tous les Abricotiers s'accommodent bien du Prunier; quelques variétés, qui tiennent du Pêcher, réuffiffent fur l'Amandier; mais leur union eft fi peu adhérente, que le moindre coup de vent les décolle. L'union du Cerifier avec le Merifier fauvage à fruit noir, n'eft pas plus folide, parce que la feve de ce Merifier eft trop âcre, &c.

III. IL faut encore proportionner les greffes aux fujets, la force & la grandeur naturelle des fujets à celles des arbres francs dont on prend les greffes. Un bourgeon fort fera une mauvaise

greffe fur un fujet foible & chétif, qui ne pourra lui fournir une nourriture fuffifante. Un bourgeon foible & chiffon fera fuffoqué par l'excès de la feve d'un fujet vigoureux. Un Cerifier précoce réuffit mal fur un Merifier. Un Pommier greffé fur Paradis demeurera nain. Un Poirier greffé fur l'Aubépine ou le petit Coignaffier, ne deviendra qu'un arbre moyen, & même il ne pourra y fubfifter, fi c'est une variété très-vigoureufe, telle que l'Impériale à feuille de chêne, l'Ambrette, &c.

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DU CHOIX Des Arbres, et des especES ET VARIÉTÉS.

JE

E commencerai ce Chapitre par une reclamation contre un abus auffi oppofé à la raison qu'aux intérêts des Propriétaires.

On fait la dépense de conftruire, chaperonner, crépir des murs, de les couvrir de treillages, de défoncer & d'amender les terres ; pour y planter de petits avortons, dont les uns périront auffi-tôt ; d'autres languiront pendant quelques années; les autres, reperçant

mal, ne deviendront que des arbres eftropiés, mal tournés, informes: quelques-uns, fuivant l'efpece & la façon dont ils feront conduits, pourront donner quelques fruits la quatrième ou cinquième année, & les Poiriers la dixième ou douzième ; c'eft-à-dire, lorfque les murs & les treillages commenceront peut-être à avoir befoin de reparation. Le Pere de famille qui calculera fes avances, leurs intérêts & les frais de culture, avec le produit tardif de fes arbres, fera obligé de convenir que fon économie eft défectueuse.

Mais s'il plante des Pêchers, Abricotiers, Pruniers, de trois ans de greffe, des Poiriers & des Pommiers de quatre ou cinq ans, préparés, taillés, dreffés, formés dans la pépinière (*), il fera affuré du tempérament, de la forme de la régularité de fes arbres, qui fe mettant à fruit dès la première année, lui donneront le plaifir de la jouiffance, & lui paieront l'intérêt de fes dépenses.

Objection. Des arbres de cet âge, fur-tout des Pêchers, garnis d'un grand nombre de branches, peuvent-ils reprendre aifément? & leur perte

(*) C'est pour cette raison que j'ai prefcrit de grands intervalles entre les fujets en pépinière.

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