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CHAPITRE

VIII.

DES ESPALIERS (*).

LE mot Espalier eft formé de l'Italien Spagliera ou Spalliera, qui fignifie dans notre langue efpalier, treille, tapiferie; ou dù latin palare, échalaffer, parce qu'avant l'invention des treillages, des loques & des autres expédiens qui font en ufage, on attachoit les arbres à des échalas, pour les former, comme il se pratique encore affez fréquemment pour les contre-efpaliers, paliffades & éventails.

La culture des arbres en efpalier eft une partie du Jardinage inconnue aux Anciens & affez récente pour nous, qui procure à nos jardins leur plus bel ornement. Elle couvre les murs de tapis femés de fleurs, garnis d'une verdure brillante, enrichis de fruits nombreux. Dans la faifon même où la nature eft dépouillée

(*) La plupart des règles de la taille, de la conduite & de la culture des arbres en efpalier qui vont être exposées, appartiennent également & s'appliquent aux arbres en contre-efpalier, éventail, &c.

de toute fa beauté, la difpofition régulière des branches d'un arbre en efpalier en fait un objet agréable à la vûe.

Mais s'il eft rare de trouver des arbres en efpalier qui donnent à leur maître une fatisfaction complette, & qui le dédommagent de fes dépenfes, c'eft que la plupart font mal. plantés, mal taillés, mal conduits. Sans m'arrêter à reprocher aux Jardiniers leurs mauvaises: pratiques, je vais continuer à en expofer qui font fondées sur l'expérience & la raison.

CHAPITRE

I X.

FORME DES ARBRES EN ESPALIER.

LA

A différence entre un arbre en espalier & un arbre en plein vent, eft que celui-ci élève fa tige & fa tête en liberté, étend de tous côtés, multiplie, difpofe, dirige fes branches & toutes fes productions, fans être affujetti à d'autres loix que celles que la nature a prefcrites à son espece: au lieu que l'arbre en efpalier, fans tige, ou avec une tige dont la longueur eft bornée à la naiffance des premières branches, ne peut avoir que des branches la

térales, dont le nombre & l'étendue font décidés par la furface du mur, la difpofition & la direction foumifes aux régles de l'art. Toutes attachéés parallelement au mur, pour le couvrir d'un tapis fans vuides & fans confufion, elles doivent être tellement fécondes, que leur petit nombre foit compenfé par l'abondance & la beauté de leurs fruits. L'arbre qui n'a que la régularité, n'eft qu'agréable; l'arbre qui n'a que la fécondité, n'eft qu'utile; celui qui réunit les deux qualités, eft parfait.

I. Pour former un arbre régulièrement, il faut rabattre fa tige, comme il a été dit cidevant; & des branches qui font fur fes côtés parallèles au mur, ou qui y reperceront, choifir les deux plus vigoureufes & les plus oppofées, l'une fur un côté, l'autre fur l'autre. (*) Ces deux branches feront comme les meres de toutes les autres, & la bafe de tout F'arbre, qui au heu d'une tige verticale, dont le canal direct porteroit la plus grande partie

!

(*) Lorsqu'un arbre ne reperce que d'un côté, on reperce inégalement, on n'obtient ces deux branches que la deuxième ou la troifiéme année, en rabattant à deux ou trois yeux le bourgeon fe plus fort, & fupprimant les

autres.

de la feve vers le haut, aura comme deux tiges ou deux canaux obliques qui partageront entr'eux toute la maffe de la feve, pour la diftribuer fur les deux côtés.

On les paliffe à-peu-près à quarante-cinq dégrés d'inclinaifon, de forte qu'elles faffent un angle prefque droit au fommet de la tige. D'année en année, on attachera dans la même direction le principal bourgeon fur lequel on taillera, afin que cette fuite de tailles ne faffe qu'une branche-mere fur chaque côté de l'arbre. Cependant on dirige verticalement les bourgeons qui fortent du côté fupérieur de ces deux branches-meres, & horizontalement ceux qui naiffent fur le côté inférieur (*).

Cette difpofition de branches (dont la Planche III présente un modèle qu'il faut imiter le plus qu'il eft poffible ), adoptée par les plus célèbres Cultivateurs, fimple, naturelle,

(*) Quelques Amateurs épris de cette forme d'arbres l'ont réduite en plan géométrique dans un petit Ouvrage, peut-être trop férieux, imprimé chez Delatour en 1773. Quelque confiance que méritent leurs obfervations, peut-on efpérer que la Nature, libre dans fa conduite, ennemie de la contrainte & de la fymmétrie, se soumettra aux règles de la Géométrie, & fera fes opérations & fes productions à l'équerre & au niveau ?

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eft raisonnée; ayant pour but de déterminer fur les côtés de l'arbre l'action & l'abondance de la feve, pour leur affurer la force & l'étendue, au lieu de l'abandonner à fon emportement sur le haut, qu'elle ne laissera jamais foible & dégarni. Mais (comme il fera dit), les yeux du côté fupérieur d'une branche inclinée s'ouvrant en plus grand nombre, & produifant des bourgeons plus vigoureux que ceux du côté inférieur; & les branches qui s'élèvent verticalement prenant beaucoup plus de force que celles qui font inclinées, comme on le voit dans la même figure: il arrive que ces branches droites ou verticales tirent la principale force de l'arbre, pendant que les branches horizontales trop peu nombreuses & trop foibles garniffent mal le bas du mur, & fouvent périffent en peu d'années. Pour leur afsûrer plus de force & de durée, j'ai pratiqué la méthode fuivante.

II. Un jeune arbre ( Planche IV, fig. 1) étant pourvû de deux bons bourgeons, je les taille à une longueur convenable à leur force, pour leur faire produire deux ou trois bourgeons, comme a, b, c, fig. 2; donc a & b font effentiels.

L'année fuivante, je taille court le bourgeon

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