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AN.1340.

Rain. 1341; n.

avoit donné l'antipape. Ces deux freres envoïerent donc au pape Guidole de Galice, cioïen de Milan, le même qui avoit negocié l'accomodement de Bologne, & des autres villes de Lombardie. Il étoit chargé de la procuration de Jean, & Luquin Visconti, Ughell. p. 350. & fit en leur nom les mêmes déclarations & les mêmes promeffes: foûmission & obéïffance au pape, reconnoiffant qu'il ne peut être déposé par l'empereur, promeffe de ne jamais adherer à Louis de Baviere, ni à aucun empereur qui ne foit aprouvé par le pape: de païer au pape & aux cardinaux cinquante mille florins d'or en dedomagement de tous les torts faits par eux & leur famille aux légats & aux nonces du pape. Enfin il reconnurent que pendant la vacance de l'empire, comme il vaquoit alors, le pape en avoit l'administration; & en consequence qu'ils vouloient tenir du pape & de l'église Romaine le gouvernement de Milan & de fes dépendances. Au fond il importoit peu aux Visconti & aux autres petits feigneurs de Lombardie de se foûmettre de paroles au pape ou à l'empereur pourvu qu'en effet ils demeuraffent maîtres des villes dont ils étoient en poffeffion.

Aprés ces déclarations & ces promeffes faites en confiftoire, le pape accorda aux deux freres, leur vie durant, le gouvernement de la ville de Milan : Ughell p. 305. & de fon territoire avec toute jurisdiction & toute

12. 26.

puissance temporelle, comme vicaires de l'église Romaine pendant la vacance de l'empire; & pour reparation des fautes paffées, il impofa à la ville de Milan la penitence fuivante: Vous ferés bâtir deux chapelles en l'honneur de faint Benoist, l'une en la grande église, l'autre en l'église de saint Ambroise,

en chacune desquelles un prêtre celebrera tous les jours la meffe,recevant pour revenu trente florins d'or, & le jour de S.Benoift vous ferés l'aumône à deux mil pauvres, en donnant à chacun un pain de douze onces. A ces conditions fut levé l'interdit & toutes les autres cenfures. La bulle eft du quinze de Mai 1341.

AN. 1341.

IX. Quetiftes du

Sup. n. 1.

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L'abbé Barlaam à fon retour d'Avignon revint à Theffalonique, où il avoit déja paffé quelques années; & il y eut de grandes difputes avec des moines du ment Athos. mont Athos, qui prétendoient avoir pouffé la perfection de l'oraison jufques à voir des yeux corporels une lumiere qui étoit Dieu même, & être arrivés à l'état de la fublime quietude. Barlaam les accufoit de renouveler l'herefie des Maffaliens condamnés à Antioche vers la fin du quatriéme fiecle; & les .25.26. nommoit Omphalopfyques, c'est-à-dire, aïant l'ame au nombril. Or le fondement de ce reproche étoit la posture où ces prétendus Quietistes fe mettoient pour prier, & qui eft décrite dans un traité fpirituel de Simeon abbé du monaftere de Xerocerque Cave, p. 42 si à C. P. vers le milieu de l'onzićme fiecle. Voici fes paroles: Etant feul dans ta cellule, ferme ta porte, & t'affis dans un coin. Eleve ton efprit au-deffus de toutes les choses vaines & paffageres: enfuite appuïe Allar. de Confe ta barbe fur ta poitrine : tourne les yeux avec toute 7. 829. ta pensée au milieu de ton ventre, c'est-à-dire, au nombril. Retiens encore ta refpiration, même par le nés; cherches dans tes entrailles la place du cœur, où habitent pour l'ordinaire toutes les puiffances de l'ame. D'abord tu y trouveras des tenebres épaiffes & difficiles à diffiper; mais fi tu perfeveres continuant cette pratique nuit & jour, tu trouveras, mer

AN. 1341.

hij. c. I.

Boiv. vitai
Nic. G.

veille furprenante, une joïe fans interruption. Car fi-tôt que l'efprit a trouvé la place du cœur, il voit ce qu'il n'avoit jamais fçû; il voit l'air qui eft dans le cœur, & fe void lui-même lumineux & plein de difcernement. Telle étoit la methode d'oraifon de ces Quietiftes ou Hefycaftes, car on les nommoit encore ainfi.

Le chef de ceux que combatoit Barlaam, étoit Nic. Greg. XIX. Gregoire Palamas, à qui Nicephore Gregoras avoit oui dire qu'il voïoit de fes yeux l'effence divine. Nicephore disoit l'avoir oui dire à Palamas & à Drimyr fon compagnon, en prefence de plufieurs perfonnes, avant que Barlaam vînt en Grece, c'est-à-dire, avant l'an 1328. Il les avoit dès lors vivement repris, & en avoit averti le grand Logothete & quelques fçavans prélats, qui dirent que c'étoit l'herefie des Maffaliens, & lui ordonnerent de fuir la compagnie de ces gens-la. Palamas fe trouvant donc à Thessalonique, lorfque Barlaam y revint, foûtint que cette lumiere divine dont il s'agiffoit, avoit apparu à Cantac. lib. 11. plufieurs faints : comme aux martyrs, pendant les perfecutions, & au grand faint Antoine. Et pour remonter plus haut, ajoûtoit-il, & jufques au premier exemple, c'est cette lumiere que les apôtres virent fur le Thabor à la transfiguration; & dont ils ne purent foûtenir l'éclat. Si donc étant encore des hommes imparfaits, ils ne laifferent pas de voir cette lumiere divine & incréée. Faut-il s'étonner que les faints éclairés d'en-haut la voïent encore à present.

6. 39. P. 332.

P.333.

A ces mots Barlaam s'écria: Quelle abfurdité! La lumiere du Thabor incréée. Elle eft donc Dieu felon vous: car rien n'est incréé, fi ce n'eft Dieu

Si

Si donc cette lumiere n'eft ni une créature ni l'effence de Dieu, car perfonne n'a jamais vu Dieu, que refte-t'il, finon d'adorer deux dieux, l'un créateur de tout, & invisible, l'autre visible felon vous, c'està-dire cette lumiere incréée? Pour moi je ne soufrirai jamais que l'on nomme incréé rien qui foit diftingué de l'effence de Dieu.

Ensuite Barlaam passa à C.P. & mit entre les mains du patriarche Jean d'Apri, ce qu'il avoit écrit contre les moines Quietistes; & le pria d'assembler un concile, pretendant les y convaincre d'erreurs contre la foi. Le patriarche manda les moines qui étoient à Theffalonique; & l'empereur revenant de la guerre arriva en même tems à C. P. Il voulut d'abord impofer filence aux deux partis, & les reconcilier: mais n'y pouvant réüffir, il permit de tenir le concile. On le tint à fainte Sophie le onzième de Juin 1341. & l'empereur Andronic y préfida avec le patriarche Jean, les évêques, les fenateurs & plusieurs personnes conftituées en dignité. On fit parler Barlaam le premier comme étant l'accufateur & on ne traita que deux articles: celuy de la lumiere du Thabor, & celui de la priere. Ce fut fur ces deux articles que Barlaam fut condamné ; de quoi n'étant pas content, il fe retira & retourna en Italie.

,

L'empereur qui étoit déja malade, fit un effort pour affifter à ce concile, & y harangua avec tant de vehemence, que fon mal en étant augmenté, il mourut quatre jours aprés, fçavoir le vendredy quinzićme de Juin 6849. felon les Grecs 1341. felon nous: il étoit agé de quarante cinq ans, & en avoit regné douze, & telle fut la fin d'Andronic Paleologue le Tome, XX.

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AN.1341

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III. C.

jeune. Il laiffa deux fils, Jean âgé de neuf ans, & Michel de quatre; sous la conduite de l'imperatrice Anne leur mere.

Alors le patriarche Jean d'Apri pretendit à la conNiceph. lib. duite des affaires en vertu d'un écrit de la main de Cantac. lib. l'empereur Andronic, par lequel allant autrefois à la guerre, il l'avoit chargé avec les évêques qui étoient auprés de lui, de prendre foin, de l'imperatrice fa femme & de fes enfans. Car il eft jufte & neceffaire, difoit ce patriarche, que l'église soit unie à l'empire comme l'ame au corps.

Nic. c.3.

c. 4.

C. 12.

Mais le grand domestique Jean Cantacuzene foûtenoit que la tutele des jeunes princes, & la regence de l'empire luy appartenoit. tout le monde fçait, disoit -il, la part que le défunt empereur me donnoit au gouvernement des affaires, & l'entiere confiance qu'il avoit en moy: jufqu'à me donner les ornemens imperiaux, & me faire regner avec luy, fi jeuffe voulu l'accepter. L'imperatrice Anne eft temoin qu'il m'a recommandé plufieurs fois de prendre aprés fa mort le foin des affaires de fa famille & de l'empire. Quant à l'écrit que le patriarche raporte à present, c'étoit une précaution prife pour un tems, afin qu'il reftât quelqu'un à C. P. avec autorité, pendant que j'étois à la guerre avec l'empereur. Nonobftant cette remontrance, le patriarche l'emporta pour lors; & il demeura auprés de l'imperatrice, afin de l'aider de fes confeils. Cantacuzene toutefois ne fe défifta pas de fa pretention, il eut un parti puissant; & se voïant pouffé, il fe crut obligé pour fa fûreté, de prendre les ornemens imperiaux, comme il fit le jour de faint Demetrius vingt-fixiéme d'Octobre,

a

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