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AN. 1339.

Sup, liv.

pouvoirs fuffifans de l'empereur, du patriarche Grec ou des autres grands, afin que leur negociation ne fût pas illufoire, comme avoit été la réunion du conLXXXVI. n. 4. cile de Lyon. Les envoïés repondirent qu'ils n'avoient point de pouvoirs par écrit ; & toutefois le pape & les cardinaux defirant ardemment l'union, fe firent donner par écrit ce que les envoïés vouloient proposer : afin de voir fi l'on en pouroit tirer quelque utilité.

Rain. n. 20.

Barlaam donna donc sa proposition, qui porte en fubftance: On peut imaginer deux moïens de faire la réunion, la force & la violence, ou la perfuafion. Il faut abfolument renoncer au premier moïen, puifque vous en convenés vous même : le fecond eft encore double, l'un pour les fçavans, l'autre pour le peuple.Si trente ou quarante de nos fçavans viennent vers votre fainteté, je fuis affuré qu'ils s'accorderont trésfacilement avec vous: parce que vous agirés fans paffion, & ne chercherés que la verité. Mais quand les nôtres feront retournés en Orient, ils ne pouront ramener le peuple à croire ce que vous aurés accordé, & il fe trouvera des gens qui par envie, par vanité, ou peut-être croïant bien faire leur diront: Mes freres, prenés garde de vous laiffer feduire, ces gensci ont été gagnés par prefens, ou par flateries: ne changés rien à vos ufages. Ainfi les fçavans qui se seront accordés avec vous, ne pouront rien faire & seront eux-mêmes en peril.

Voici donc le moïen de vous réünir le peuple avec les fçavans. Le peuple a oui dire que l'on a tenu fix. conciles generaux; & que chacun à corrigé les erreurs qui étoient alors dans l'églife: ainfi le peuple eft perfuadé qu'il s'en faut tenir à ce qui eft decidé par un

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cóncile general. Si donc on en tient un à prefent fur vos differends avec les Grecs, tous les Orientaux recevront volontiers ce qu'il aura determiné. Si quelqu'un dit qu'on l'a déja fait au concile de Lion : il doit fçavoir qu'on ne perfuadera jamais au commun des Grecs de le recevoir fans un autre concile: parce que les Grecs qui affifterent au concile de Lion ne furent envoïés ni par les quatre patriarches, qui gouvernent l'église d'Orient, ni par le peuple, mais par l'empereur feul, qui s'efforça de faire l'union avec vous, non volontairement mais par violence. Si donc vous voulés tenir fur ce fujet un concile general, commencés par envoïer à l'églife d'Orient des legats craignants Dieu & remplis de l'efprit d'humilité & de patience avec des lettres pour inviter les patriarches de C. P. d'Alexandrie, d'Antioche & de Jerufalem, & les autres évêques à s'affembler avec vous en quelque lieu, y traiter charitablement les questions, decider ce que le S. Efprit vous infpirera. C'est le moïen de ramener le peuple & de réunir l'églife.

Barlaam vient enfuite à l'interêt temporel & dit: Depuis long-tems les Turcs ont conquis fur les Grecs quatre grandes villes de Natolie & en ont foumis par force les habitans à leur religion. Ceux-ci voulant revenir au Chriftianisme,ont fait dire à l'empereur mon maître de venir avec une armée, & qu'ils lui livreroient ces villes; mais l'empereur ne fe croïant pas affés fort avec les troupes feules, nous a

envoïés au roi de France demander du fecours pour ce fujet. Or fi nous avions repris ces villes, les Turcs perdroient toutes leurs forces maritimes, toutes les villes qui font entre nous, & ces quatre se livreroient à

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AN. 1339.

nous : & nous aurions une grande ouverture pour le paffage à la Terre-fainte. Nous vous fupplions donc que l'on envoïe du fecours en ces quartiers-là, avant que vos legats y aillent ou du moins en même tems: parce que les Grecs voïant votre fecours deja venu, feront mieux difpofés à écouter vos legats; & l'empereur pourra dire au patriarche & aux autres prelats: Voïés comme les Latins font bonnes gens & recherchent notre amitié non-feulement par les belles paroles, mais par les effets: nous devons donc auffi chercher à nous réünir avec eux. Secondement tant que l'empereur fera en guerre avec les Turcs, il ne pourra affembler les quatre patriarches & les autres évêques, ni affifter lui même au concile.

Quant à ce que difent quelques-uns d'entre vous: Il faut que les Grecs commencent par se réünir avec nous, & alors nous marcherons contre les Turcs: Je ne puis être de leur avis pour plufieurs raisons. Premierement les Turcs n'attaquent pas feulement les Grecs, mais encore les Armeniens, les Cypriots & les Rodiens, qui nous sont soûmis, & tous les infulaires: ainfi vous devriés envoïer du fecours au moins pour eux. Les Turcs n'attaquent pas les Grecs comme Grecs ni comme divifés d'avec vous, mais comme chretiens ainfi marchant contre les Turcs, vous n'irés pas proprement au fecours des Grecs mais de la religion. Tant que l'empire Grec fubfiftera il vous fera trés-facile d'abatre les Turcs vous joignant à l'empereur Grec, parce que les Grecs connoiffent la maniere dont les Turcs font la guerre. Dans toutes les terres des Turcs & des Sarrafins il y a grand nombre de chrétiens & de renegats fort affectionnés a la domi

nation des Grecs. Mais s'il arrivoit, ce qu'à Dieu ne AN. 1339. plaife, que les Turcs renverfaffent l'empire des Grecs ils deviendroient fi forts, qu'il vous feroit trés-difficile de les abattre. Agiffés donc maintenant, fans attendre le tems où vous fongerés, non pas à les attaquer mais à vous défendre d'eux.

Si les Turcs venoient vous prier de vous joindre à eux pour détruire les Tartares & les Sarrafins, vous les écouteriés : parce qu'il vous feroit plus avantageux de faire la guerre avec les Turcs, les Tartares & les Sarrafins, que de les attaquer tous trois vous feuls. Il en eft de même de vous joindre aux Grecs, plûtoft que d'attaquer feuls les Grecs & les Turcs. Sachés encore & certainement, que ce n'eft pas tant la difference des dogmes qui aliene les Grecs de vous, que la haine qu'ils ont conçûë, à caufe des grands maux que les Latins leur ont faits en divers tems & leur font encore tous les jours; & l'union ne fe peut faire, fi on ne commence par faire ceffer cette haine par quelque grand bien fait de votre part : fans quoi ils ne voudront pas même vous écouter. Sachés enfin que ce n'eft pas le peuple des Grecs qui m'a envoïé vers vous, mais l'empereur feul & fecretement: enforte que on ne lui envoïe auparavant du secours, il n'ofera declarer qu'il defire l'union avec vous.

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Le pape & les cardinaux aïant vû & soigneusement examiné cette propofition de Barlaam repondirent : Il n'est pas à propos de paroître maintenant revoquer en doute ce qui a été décidé folemnellement au concile d'Ephese, en ceux de Tolede & de Lion & en plufieurs autres, que le S. Efprit procede du Pere & du Fils comme d'un feul principe. Ce que les Grecs

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AN. 1339.

n.22 5.

fert. 1. Damfac.

1000.

pape

Hormif

ont profeffé expressement du tems du
da, de Jean patriarche de C. P. & de l'empereur Juf-
tin; & long-tems aprés un autre patriarche Jean &
l'empereur Michel Paleologue, par la lettre fynodi-
que envoïée au pape Jean XXI.

Il faut expliquer ces citations. Le concile d'Ephese ne traita directement que du myftere de l'incarnation contre l'heresie de Neftorius, & ce ne fut qu'incidemment qu'on y parla de la proceffion du S.Efpric Sup. liv. xxv. à l'occafion du neuviéme anathême de S. Cyrill e& Lequien dif- du faux fymbole denoncé par le prêtre Charifius. On y voit toutefois affés clairement que S. Cyrille & tout To. 5 Conc. p. le concile croïoient que le S. Efprit procede du Fils. Sup. liv XXXIV. Le concile de Tolede, dont il eft ici parlé, est le troifiéme tenu l'an 589. où se trouve pour la premiere fois To. 4. Conc. p. l'addition filioque. Quant au pape Hormifda nous avons une lettre de luy écrite à l'empereur Juftin en 521. où SXXXVI. n. 44 il dit expreffement: Il eft propre du faint Efprit de proceder du Pere & du Fils. Sans que les Grecs fe foient plaints alors de cette expreffion. Le concile de Lion est celui de l'an 1274. où le fit la réunion procurée par Michel Paleologue.

n. 56 lim. XLV.
n.48.

153. B.

Sup. liv.

Rain. n. 26.

Les envoïés de l'empereur Andronic aïant vû la reponse du pape dirent: Si on ne peut perfuader aux Grecs de profeffer l'article du fymbole comme les latins, que chacun demeure dans fa créance, fans préjudice de l'union. On leur répondit: Cela ne fe peut fouffrir. L'église catholique n'a qu'une feule créance; & ne refiftant pas à l'erreur elle fembleroit l'approuver. Toutefois le pape voulant toûjours faciliter l'union dit aux envoïés: Que votre patriarche & votre empereur assemblent en concile les prétendus patriar

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