avoient une grande & belle armée, dont le pape AN. 1382. Clement déclara capitaine le duc d'Anjou, lui recomandant l'interêt de l'église, c'est-à-dire la deftruction du pape Urbain. A la priere de ces deux princes, Clement fit un cardinal le trentiéme de Mai vendredi des Quatre--tems de la Pentecôte, favoir Thomas de Caffat ou Cafafte de l'Ordre des freres Prêcheurs, auparavant Inquifiteur en Lombardic. Il étoit de Piémont, déja avancé en âge, vertueux & fayant, quoi-qu'il ne fût pas doAteur en théologie. Le lendemain famedi dernier jour de Mai le duc d'Anjou partit d'Avignon, & marcha avec fon armée par les plaines de Lombardie & les terres de l'églife. Son droit chemin le menoit à Rome, mais il s'en détourna, & aïant traverfé la Tofcane, il entra au roïaume de Naples, & s'arêta à l'Aquila, qui tenoit encore pour le parti de la reine; car il fongeoit plus à fa conquête, qu'à faire ceffer le fchifme, en ataquant Urbain.Ce pape vit bien le péril; & le vingt-troifiéme d'Août il publiaune bulle par laquelle il prometoit l'indulgence Rain. n. de la croifade pour la Terre-fainte à ceux qui prendroit les armes pour la défenfe de l'églife & de la ville de Rome contre le duc d'Anjou, & qui ferviroient en cette guere pendant quatre mois. Enfuite il publia une autre bulle adreffée à Jourdain archevêque de Regio, où il dit en substance: Nous avons fait certaines procedures contre Loüis duc d'Anjou, Amedée comte de Savoïc, Pierre comte de Genève, & Foucher de Sault, fénéchal de Provence, qui ont fuivi le fchisme de Y y iij n.5.63 AN. 1382. l'antipape Robert,& font venus en Italie avec une grande multitude de gens armés, pour troubler la paix de l'églife, envahir fes terres & le roïaume de Sicile; & nous les avons déclarés fchifmatiques, apoftats & facriléges, criminels de léfe-majefté, & puniffables comme héretiques. En confequence de quoi, nous les avons excomuniés, dépofés de toute dignité & privés de tous fiefs & autres biens: enfin nous avons doné l'indulgence de la croifade à ceux qui marcheront contre eux. C'est pourquoi nous vous mandons de faire publier cette conftitu tion dans les provinces de Regio, de Cosence, de Roffanc & de faint Severin, & l'expliquer en langue vulgaire: y joignant des exhortations aux fideles de fe croifer pour la cause de l'église. La bulle eft datée de Rome le vingt-huitiéme de Septembre. XIII. Croifade en An ment. Le pape Urbain l'envoïa auffi à George archevêque d'Amalfi, avec ordre de la faire publier même par les freres des quatre Ordres Mandians. Il avoit fait venir au roïaume de Naples le capitaine Anglois Jean Agut avec les troupes; & pour leur folde il avoit mis une impofition fur le clergé du païs, mais ils refufoient de la païer. Sur quoi le pape écrivit aux archevêques de Naples & de Capoue, leur en faifant de grand reproches & leur reprefentant qu'il s'étoit lui-même épuisé pour leur défense. La letre cft du quatorziéme de Novembre. Jean de Gand duc de Lancaftre & oncle du roi gletere contre Cle d'Angletere, prétendoit au roïaume de Caftille, & s'étoit croifé pour en dépoffeder le roi Jean excomunié par le pape Urbain VI. mais ignorant quels étoient les droits & les privileges de la croisade, il Rain. 1383. n. 9. Sup. liv. LXXII. pria le pape de l'en inftruire, comme il fit par fa AN. 1383. bulle du huitiéme d'Avril 1383. Il le renvoïc à la conftitution du grand concile de Latran,ou plûtôt . 17. à la bulle d'Inocent III. donée en 1213. dont il raporte les principales clauses : mais cette croifade du duc de Lancastre ne fut pas executée, parce qu'au lieu d'aller en Espagne il fut obligé de marcher en valfing. p. 29+ Ecoffe. Cependant le pape Urbain avoit envoïé à Henri Spenfer evêque de Norvic des bulles pour prêcher la croifade contre la France & le pape Clement, lui acordant plusieurs grands pouvoirs à cette fin, en qualité de nonce apostolique; & l'évêque les notifia à tous les curés du diocéfe d'Iorc, par un mandement du neuviéme de Fevrier 1383. c'eft-à- p.29Ãà dire 1383. avant Pâques. Outre l'indulgence de la croifade le pape Urbain ordona la levée d'une décime entiere fur toutes les églifes d'Angletere : fachant bien que les gens de guerre nobles & autres ne marcheroient pas fans argent. Car,dit Froiffard auteur du temps, les d'armes ne vivent pas de pardons, & n'en font pas grand compte finon à l'article de la mort.. Or l'évêque de Norvic fut chargé du recouvrement & de l'emploi de la décime & du comandement de toute l'armée de cette croifade. gens Froiff. 2. vol c.1320 Il fe mit en marche vers la fête de la Trinité, Vali.p.29%, qui cette année 1383. fut le dix-feptiéme de Mai avec une partie de fes troupes; & s'étant embarqué il ariva à Calais. Mais au lieu d'entrer en France & d'ataquer les Clementins fuivant le projet de la croisade”, il se détourna, & fit la guerre aux Fla- Froiss, c. 134. x5. . AN. 1383. mans, quoi qu'ils fuffent Urbanistes comme les Anglois. Le comte de Flandres s'en plaignit, le roi de France vint à son fecours, & l'évêque de Norvic fut obligé de retirer les troupes, & s'en retourner en Angletere. Naples. XIV. a Rain. 1383. n. 3. Le pas Urbain n'étoit pape content de Charles Urbain VI. à de la paix, qui à fon gré s'oposoit trop foiblement Th. Niem. c. 28. au duc d'Anjou, & tardoit trop à mettre en posfeffion des duchés de Capoue ou d'Amalfi François Prignano fon neveu. Il réfolut donc d'aller à Naples, coutre l'avis de fix ou fept de fes cardinaux, qui lui reprefenterent qu'il s'expofoit à de grands perils: mais il étoit ataché à fon fens, & ne vouloit pas être contredit. Il fortit donc de Rome fous prétexte de la mortalité qui y regnoit, & se retira à Tivoli le dix-neuviéme d'Avril. Au comencement de Septembre il paffa à Ferentino, d'où il manda aux cardinaux qui s'étoient oposés à son voïage, & qui etoient demeurés à Rome de venir auffi-tôt le trouver. Mais ils s'en excuferent fur leur pauvreté & fur les perils des chemins, à cause des Bretons logés à Anagni qui tenoient pour le pape Clement: Urbain prit cette réponse pour un figne de revolte, & publia contre eux des bulles fcandaleufes où il les chargeoit d'injures; & il fe propofoit de les priver de leur dignité, s'ils ne l'euffent fuivi bien-tôt après. Th. Niem. 6.19. Dès que la faint-Michel fut paffée, le pape Urbain entra dans le roïaume de Naples par la Campanie, malgré le roi Charles de la Paix. Ils fe rencontrerent près d'Averfe, où le roi le falia, & fit fonction de fon écurer marchant devant lui lorf qu'ils entrerent dans la ville. Le roi lui fit voir le château qui etoit beau & grand, bâti, comme l'on difoit, par l'empereur Frideric II. Le pape ne vouloit pas. y entrer, & alla loger ailleurs; mais les gens de fa fuite curent peine à trouver des logemens, & même à faire abruver leurs chevaux, parce qu'on ferma toutes les portes de la ville, dès qu'ils y furent entrez : ce qui leur parut de mauvais augure. AN. 1383 Rain. n. 4 Peu de jours après, c'est-à-dire le nenviéme d'Octobre, le pape & le roi vinrent à Naples, où le roi . 31. 32. fit loger le pape au château-neuf fous bone garde: fans toutefois l'enfermer ; enforte qu'il donoit audience à l'ordinaire à ceux qui fe prefentoient. Cependant les cardinaux folicitoient inftament le roi de mettre le pape en liberté, & s'acomoder avec lui: ce qu'ils obtinrent du moins en aparence. Le roi demanda publiquement pardon au pape avec larmes, & lui fit excufe de fa détention, dont il rendit des raisons que plufieurs ne jugerent pas mauvaises. Il fut donc reglé que le pape fortiroit du château-neuf, & logeroit, comme il fit, à l'archevêché où le roi & la reine Marguerite fon epoufe le vifiterent fouvent avec refpect. Le XV. ment VII. Clement de fon côte aïant perdu quel-pape ques-uns de fes cardinaux qui etoient morts, en fit dinaux de Cleneuf en une promotion le mecredi vingt-troisiéme de Decembre 1383. Le premier fut Pierre de 1301 Cros noble Limoufin d'une famille qui avoit cu déja deux cardinaux. Il fut premierement moine Bencdictin à faint Martial de Limoges; puis en 1351. abbé de Tournus, & dix ans après évêque de Tome XX. Zz C |