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neuvième de Juin, où il fut réfolu qu'elle fe join-AN. 1392. droit au corps du clergé dont elle faifoit partie pour défendre l'interêt comun. La dificulté fut d'avoir audiance du roi, & fur le refus qu'on leur en fit, ils cefferent les leçons, ce qui fit fortir de Paris grand nombre d'étrangers; & comme la cour ne parut pas en être touchée, l'univerfité s'affembla encore le quinziéme de Juillet, & fit une députation du re&teur avec vingt des plus notables, qui allerent trouver le roi à faint Germain fous pretexte de le complimenter fur fon voïage qu'il alloit faire. Ils n'eurent audiance qu'à grande peine; & l'aïant enfin obtenue, come le docteur chargé de porter la parorole començoit fa harangue, le chancelier Arnaud de Corbie fe leva & dit: Le roi eft affès informé du fujet qui vous amene, & veut vous épargner la peine de demander ce qu'il vous auroit déja acordé, s'il avoit été plûtôt inftruit de vos privileges. C'eft qu'on craignoit que ce docteur peu complaifant pour la cour ne dit des chofes défagreables au roi & à fes miniftres, touchant l'origine de l'autorité roïale fur le clergé. Le roi leur fit une douce réprimande fur la ceffation des leçons, & leur ordona de les continuer : ce qu'ils promirent, & se retirerent fort fatisfaits.

Froi 4. vol.

Le voïage auquel le roi fe préparoit étoit pour c. 38. 43. faire la guerre au duc de Bretagne qui protegeoit Pierre de Craon après que celui-ci avoit voulu affaffiner à Paris le conétable de Cliffon. Le roi étant forti du Mans & marchant par un jour très-chaud tomba en frénéfie, perdit conoiffance & pourfuivoit l'épée à la main fon propre frere & tous ceux Iii iij

AN. 1392.

LXII.

Chartreux cm

qu'il rencontroit. Cette maladie cut des intervales, mais il n'en revint jamais bien ; & fes trois oncles les ducs de Bourgogne, de Berri & de Bourbon reprirent le gouvernement de l'état.

Vers la fête de Noël deux Chartreux aporterent ploïés pour l'u- au roi Charles une lettre du pape Boniface pour

nion.

Bullar, to. I.

l'exhorter à concourir à la fin du fchifme. C'étoit peut-être ces mêmes Chartreux qui étoient allés à Rome foliciter l'exemption de leur Ordre, & qui l'obtinrent en éfet, come il paroît par la bulle de Boniface, où il dit : On nous a présenté de vôtre Bonif. conf. 3. part une fuplique contenant qu'encore que vôtre Ordre foit depuis long-tems réputé éxemt de la jurifdiction des Ordinaires, & foumis immédiatement au faint fiége : toutefois quelques-uns vous inquiétent, & veulent vous tirer à leur tribunal, vous détournant ainfi de la contemplation & du repos de votre Inftitut. C'est pourquoi vous nous aves fait fuplier de vous éxciter de nouveau, afin d'ôter tout prétexte de vous molefter à l'avenir : ce que nous avons acordé de nôtre grace fpéciale. Nous avons vu en fon tems que les Chartreux dans leur origine ne prétendoient aucune exemption,& qu'ils regardoient l'évêque de Grenoble come leur abbé. Spicil. to. 6. P. Ainfi leur premier titre d'éxemption eft cette bulle de Boniface IX. datée du feiziéme de Mars 1391.

Sup. liv. LXII.

n. 56.

$4.

La letre du même pape au roi eft du second jour d'Avril de l'année fuivante, & porte en fubstance: Nous favons que vous gémiffés du schisme qui déchire l'églife depuis fi long-tems, & de la négligence des princes qui devroient s'apliquer à rétablir l'union. Vous avés d'ailleurs tous les avan

LXIII.

M. Chr. Belg.

tages néceffaires pour un fi grand defsein : l'antifi grand deffein : l'anti- AN. 1392. quité de vôtre maison, les exemples de vos ancêtres & les fervices qu'ils ont rendus à l'églife: vos qualités perfoneles, l'efprit, le courage, la force du corps, la jeunesse, la maturité du jugement; les richeffes, la réputation. C'eft pourquoi nous vous exhortons & vous conjurons par la mifericorde de J. C. d'entreprendre promptement la cause de Dieu & de la pourfuivre conftament. Mais le roi étoit bien changé quand les deux Chartreux aporterent cette lettre. Cependant on fit juftice à Utrect d'un impof- Evêque teur qui avoit long-tems paffé pour évêque. Il fe puni. nomoit Jaques de Juliers, & étant frere Mineur, il p. 325. fit croire moïenant une fauffe bulle qu'il étoit évêque, & Florent alors évêque d'Utrect le prit pour fon fufragant. En cette qualité il fit des prêtres, dona prefque tous les Ordres, fit des dédicaces d'églifes & toutes les autres fonctions épiscopales. Enfin la fauffeté de fa bulle fut découverte : ce qui fut caufe que plufieurs de ceux qui avoient reçu de lui la prêtrife ou d'autres Ordres facrés fe marierent & demeurerent en l'état laïque d'autres mieux confeillés fe firent ordoner de nouveau par de vrais évêques du confentement de celui d'Utrect, qui, en vertu d'une comiffion du pape, affembla à Utrect fept autres êvêques, & aïant fait prendre le fauffaire, le dégrada folemnelement en place publique le jour de faint Jerôme trentiéme de Septembre 1392. puis le livra au juge féculier, favoir au scultet & aux échevins de la ville, qui le condamnerent à la chaudiere : c'eft-à-dire à être

:

AN. 1392.

LXIV.

Suite de l'afaire de l union.

Labour. XII, c.

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plongé peu à peu dans de l'eau boüillante. Mais en confidération des Ordres facrés qu'il avoit reçus & de ce qu'il étoit frere Mineur, ils le retirerent aufsi-tôt de la chaudiere, & lui firent couper la tête. L'évêque Florent permit de l'enterrer

au cimetiere des freres Prêcheurs.

Les deux Chartreux que le pape Boniface envoïa en France étoient Pierre, Lombard de nation & prieur de la Chartreufe d'Aft qui prit pour compagnon Barthelemi prieur de l'île Gorgone. Le pape vouloit envoïer avec eux un fameux docteur en droit pour foûtenir la justice de fa cause : mais Pierre lui représenta, que les afaires de la religion fe devoient traiter plus fimplement & avec moins d'apareil, Les deux religieux vinrent premierement à Avignon, où étoit le duc de Berri, celui de tous les princes de France qui favorifoit le plus le pape Clement. Ils furent alarmés l'un & l'autre de cette députation de Boniface : ils reçurent affès mal les Chartreux, & après avoir refufé plufieurs fois de les entendre, ils les firent enfermer dans la Chartreuse de Villeneuve. Ils protestoient cependant qu'ils étoient porteurs d'une lettre du pape Boniface au roi, & on ne pût la leur ôter ni par menaces, ni par mauvais traitemens.

Le bruit de leur détention étant venu à Paris, l'université intercéda pour eux auprès du roi, & il écrivit en leur faveur au pape Clement qui n'ofa lui réfifter. Il délivra donc les deux Chartreux & leur dit en les renvoïant : Affûrés le roi que de nôtre part nous nous emploïerons férieufement à procurer l'union, quand il nous en devroit coûter nonfeulement

feulement nôtre dignité, mais la vie : l'évenement toutefois fit bien voir qu'il ne parloit pas fincerement. Ainfi les Chartreux étant partis de Rome vers le comencement d'Avril, come on peut juger par la date de la letre du pape, n'ativerent à Paris que vers la fin de Dcembre.

Ils furent reçus & écoutés favorablement par le roi & les grands, & on promit de faire réponse à la letre de Boniface: mais on trouva de la dificulté fur la forme de la réponse. On ofensoit Boniface fi on ne lui donoit pas le titre de pape, & fi on le lui donoit, on ofensoit Clement : il fut résolu de répondre de vive voix par les mêmes Chartreux que Boniface avoit envoïés. On les chargea de lui dire que le roi loüoit ses bons fentimens pour l'union de l'églife, & qu'il étoit prêt d'emploïer tout fon pouvoir à la procurer. Pour mieux témoigner la bone volonté du roi, on expédia des letres à tous les princes d'Italie, les invitant à concourir à l'union de l'églife. Les envoïés furent chargés de ces letres, & on leur joignit deux autres Chartreux, dont l'un étoit le prieur de Paris ; & tout ceci fe fit de l'avis de tous les princes, excepté le duc de Berri toûjours favorable au pape Clement.

AN. 1393.

Pour rendre graces à Dieu de ce confentement Spicil. to. 6.p. 58. des princes auquel on ne s'atendoit pas, l'univerfité alla en proceffion à faint Martin des Champs le jour de la converfion de faint Paul vingt-cinquiéme de Janvier 1393. Gui de Monceaux abé de faint Denis y célébra la mcffe du faint Esprit; & le prieur de l'abaïe Guillaume Varrant docteur en théologie y fit un fermon, où il releva la bone inTome XX. Kkk

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