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In triviis fixum cum fe demittit ob affem

Non video: nam qui cupiet, metuet quoque porro.
Qui metuens vivit, liber mihi non erit unquam.
Perdidit arma, locum virtutis deferuit,
Semper in augendâ feftinat & obruitur re. Hor. l. 1.
Ep. 17.

qui

L'avare oublie ce qu'il doit à Dieu, quand il trouve l'occafion de gagner.

Si lucri quid detur: potius rem divinam deferam. Plaut.

Ffeud.

Il fe parjure pour le moindre interêt.

Falfus erit teftis: vendet perjuria fumma
Exigua, Cereris tangens aramque pedemque.

Et qui pis eft, c'eft qu'il donne des leçons d'avarice à son fils, en lui inspirant le defir d'augmenter fon bien, & en lui repetant fouvent qu'on le diminuë quand on en fait part à fon ami : ou qu'on foulage un pauvre dans fa mifere. Rempli de fi beaux preceptes,un jeune homme eft fi occupé du foin de s'enrichir qu'il employe toute forte de moyens pour y parvenir; & comme on ne croit jamais porter le mal auffi loin qu'on l'avoit permis, il arrive que le fils d'un avare devient encore plus avare que fon pere. La comparaifon du chariot qu'on ne peut plus retenir, quand on l'a pouffé avec violence, eft admirable pour faire voir combien il eft dangereux de lâcher la bride au vice.

Nam quifquis magni cenfus præcepit amorem
Et lavo monitu pueros producit avaros
Et qui per fraudes patrimonia conduplicare
Dat libertatem, & totas effudit habenas
Curriculo: quem fi revoces, fubfiftere nefcit
Et te contempto rapitur, metifque relictis.
Nemo fatis credit tantum delinquere, quantum
Permittas: adeo indulgent fibi latius ipfi.
Cum dicis juveni, Stultum, qui donet amico,
Qui paupertatem levet, attollatque propinqui :
Et fpoliare doces & circumfcribere, & omni
Crimine divitias acquirere, &c. Juv. Sat. 3.

Un autre avare inftruit ainfi fon fils dans Defpreaux.

Veux-tu voir tous les grands à ta porte courir?
Dit un pere à fon fils, dont le poil va fleurir;
Prens moi le bon parti. Laiffe la tous les livres
Cent francs au denier cinq combien font-ils ? ving

livres.

C'est bien dit. Va tu fçais tout ce qu'il faut fçavoir.
Que de biens, que d'honneurs fur toi s'en vont pleuvoir
Exerce toi, mon fils, dans ces hautes fciences;
Prens au lieu d'un Platon, le Guidon des Finances,
Scache quelle Province enrichit les Traitans;
Comb en le fel au Roi peut fournir tous les ans.
Endurci toi le cœur. Sois Arabe, Corfaire,
Injufte, violent, fans foi, double, fauffaire.
Ne va point fortement faire le genereux.
Engraiffe toi, mon fils du fang des malheureux,
Et trompant de Colbert la prudence importune,
Va par tes cruautez meriter la fortune*
Auffi tôt tu verras Poëtes, Orateurs,

Rheteurs, Grammairiens: Aftronomes, Do&teurs;
Dégrader les Heros pour te mettre en leurs places.
De tes titres pompeux enfler leurs dedicaces,
Te prouver à toi même en Grec, Hebreu, Latin,
Que tu fcais de leut art & le fort & le fin.
Quiconque eft riche eft tout, fans fagefle il eft fage
Il a fans rien fçavoir la fcience en partage.
Il a l'efprit, le cœur, le merite, le rang,
La vertu, la valeur, la dignité, le fang
11 eft aimé des Grands, il est cheri des belles,

Jamais Surintendent ne trouva de cruelles.

L'or même à la laideur donne un teint de beauté
Mais tout devient affreux avec la pauvreté.

Horace avoit dit L. 1 Ep. 6.

Scilicet uxorem cum dote, fidemque & amicos;
Et genus & formam Regina pecunia donat
Ac bene nummatum decorat Suadela, Venufque.

Que les avares & les ambitieux d'aujourd'hui, viennent apprendre d'un Philofophe payen s'il eft permis de s'enrichir aux dépens d'autrui.

La mort, dit-il, la pauvreté la douleur & les autres accidens qui peuvent arriver, foit au corps, foit aux chofes qui font hors de nous ne font pas tant contre la nature, qu'il eft contre la nature d'ôter à quelqu'un ce qui lui appartient car la focieté humaine qui eft la chofe du monde la plus felon la nature, se trouve anéantie par cela feul, puisqu'il eft clair que nulle focieté ne fçauroit fubfifter dès que chacun fera dans la difpofition de faire violence aux autres & de les dépouiller de leurs biens pour en profiter. Cic. des Offic. L. 3.c.5.

Il ajoûte que ce que la nature nous dicte là-deffus eft une loi divine & humaine, c'en eft une en effet, puifque quand la raifon naturelle nous parle c'eft Dieu qui nous parle, & cette voix

de

de la nature eft en même tems une loi humaine, puifqu'elle eft autorisée par le fuffrage & le confentement de toutes les nations, Du Bois. Ciceron conclud qu'un homme qui fuivra la nature ne fera jamais de mal à un autre homme; & dans le chap. fuivant ; Que chacun regarde donc l'utilité commune comme le but à quoi il doit tendre, & qu'il compte que rien n'eft utile à chaque particulier, que ce qui l'eft auffi au general. Car dès que chacun ne connoîtra d'utilité que la fiennne propre, & qu'il voudra tout tirer à lui, nulle forte de focieté ne fçauroit fubfifter entre les hommes.

Ce que Ciceron dit ici, eft précifément la même chofe que ce que dit S. Paul, I. Cor. 12. 26. Que quand un des membres eft dans la joie ou dans la douleur, cette joie ou cette douleur fe communique à tous les autres. Et cela fait voir, que la nature toute corrompuë qu'elle eft, a encore affez de lumiere, pour faire découvrir à ceux mêmes qui ne font pas éclairés des lumieres de l'Evangile, ce que la charité envers le prochain demande de nous de plus parfait. Du Bois,

L'avare ne s'embaraffe pas des difcours qu'on tient de lui, pourvû qu'il ait le

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plaifir de contempler fon or & fon ar gent dans fes coffres.

Populus me fibilat, at mihi plaudo

Ipfe domi, fimul ac nummos contemplor in arca. Il eft comparé à Tentale, qui eft au milieu des eaux fans en pouvoir boire pour fe defalterer. Lavare n'ofe non plus toucher à fon argent que fi c'étoit des chofes facrées.

Tantalus à labris fitiens fugientia captat
Flumina: quid rides ? mutato nomine de te
Fabula narratur: congeftis undique faccis
Indormis inhians, & tanquam parcere facris
Cogeris, aut pictis tanquam gaudere tabellis. Hor. l.

Imitation des vers precedens.

Sat. I.

Dites-moi pauvre efprit, ame baffe & venale,
Ne vous fouvient-il point du tourment de Tantale,
Qui dans le trifte état où le Ciel l'a réduit,
Meurt de foif au milieu d'un fleuve qui le fuit ?
Vous riez: fçavez-vous que c'eft votre peinture,
Et que c'eft vous par là que la fable figure?
Chargé d'or & d'argent, loin de vous en fervir,
Vous brulez d'une foif qu'on ne peut affouvir.
Vous nagez dans les biens, mais votre ame alterée
Se fait de fa richeffe une chofe facrée ;
Et tous ces vains tréfors que vous allez cacher
Sont pour vous un dépôt que vous n'ofez toucher,
Quoi donc de votre argent ignorez vons l'ufage!
Defpreaux.

Horace continue à faire voir la folie des avares, qui ne fçavent pas l'ufage qu'on doit faire des richeffes, qui ne font destinées qu'à fubvenir aux befoins de la vie, à fe foulager dans les maladies,

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