Fortes creantur fortibus: & bonis
Eft in juvencis, eft in equis patrum
Virtus, nec imbellem feroces
Progenerant aquila columbam.

Do&trina fed vim promovet infitam :
Rectique cultus pectora roborant:
cunque defecere mores,
Dedecorant bene nata culpæ.

Ut

La maniere d'élever les enfans, felon Terence, eft de les traiter doucement, & de s'en faire aimer : de les accoûtumer à ne rien cacher à leur pere: car celui qui ment pour cacher fa conduite à fon pere, il s'accoûtumera encore plus facilement à tromper les autres; qu'il faut retenir les enfans plutôt par l'honneur que par la crainte ; que celui qui ne fait fon devoir que par ce motif, fe relachera & reviendra à fon naturel, quand il croira n'être point obfervé. Celui qui parle ici eft un oncle qui avoit pris un de fes neveux pour l'élever avec lui,

Nati filii

Duo. Inde ego hunc majorem adoptavi mihi,
Eduxi à parvulo, habui, amavi pro meo:
In eo me obleco : folum id eft carum mihi.
Ille ut item contra me habeat, facio fedulo :
Do, prætermitto,, non necefsè habeo omnia
Pro meo jure agere: poftremò, alii clanculum
Patres que faciunt, quæ fert adolefcentia.
Ea ne me celet, confuefeci filium

NAM que mentiri, aut fallere infuevit patrem, aut
Audebit, tanto magis audebit cæteros.
PUDORE & liberalitate liberos

Retinere, fating effe sredo, quam metu, &c,

Ry

MALO coactus qui fuum officium facit,
Dum id refcitum iri credit, tantifper cavet.
Ille quem beneficio adjungas, ex animo facit,
Studet par referre: præfens abfenfque idem erit.
Hoc patrium eft, potius confuefacere filium
Sua fponte recte facere, quam alieno metu.
Hoc pater, ac dominus inter eft, hoc qui nequit :
Fateatur nefcire imperare liberis. Adelph.

Il avoit dit auparavant,

Et errat longè, mea quidem fententia,
Qui imperium credat gravius effe aut stabilius,
Vi quod fit, quàm illud quod amicitia adjungitur.

En effet, on s'aperçoit fouvent mais trop tard, qu'une trop grande févérité eft moins capable de faire revenir un jeune homme de ses égaremens qu'un traitement accompagné de douceur: L'un le fait rentrer en lui-même & l'autre le rend encore plus mauvais. Corneille fait ainfi parler un pere dans l'IlJufion Comedie.

Scus ombre qu'il prenoit un peu trop de licence,
Contre fes libertez, je roidis ma puissance,
Je croyois le domter à force de punir
Et ma févérité ne fit que le bannir.
Men ame vit l'erreur dont elle étoit féduite,
Je l'outrageois fouvent & je pleurai fa fuite,
Et l'amour paternel me fit bientôt fentir
D'une injuste rigueur un juste repentir.

On ne peut rien imaginer de plus judicieux fur l'éducation des enfans que ce qu'en a dit la Bruyere. C'eft perdre toute confiance dans l'efprit des

enfans, & leur devenir inutile, que de les punir des fautes qu'ils n'ont pas fai tes, ou même févérement de celles qui font legeres ; ils fçavent précisement & mieux que perfonne ce qu'ils meritent, & ils ne meritent que ce qu'ils craignent; ils connoiffent fi c'eft à tort ou avec raifon qu'on les châtie,, & ne fe gâtent pas moins par des peines mal ordonnées que par l'impunité.

Terence dit que les enfans font tels que les peres le veulent.

Sic fiet modo, ut nunc eft quæfo

Ut quifque filium fuum vult esse, ita eft. ibfd.

Ce Poëte eft pourtant perfuadé qu'il faut de la fermeté avec les enfans, & qu'une trop grande indulgence eft pernicieufe. Les hommes font ainfi faits: plus on leur donne de liberté, plus ils en abusent, & plus ils deviennent me chans.

Peffime iftuc in te atque in illum confulis.

Nam fi femel tuum animum intellexerit ille,

Prius perditurum te tuam vitam & prius

Pecuniam omnem, quam abs te emittas filium : hui
Quantam feneftram ad nequitiam patefeceris?
Tibi autem porro ut non fit fuave vivere.
NAM deteriores omnes fumus licentia.
Quodcunque inciderit in mente: volet:

Neque id putabit pravum an re&tum fit quod petet.
Tu rem perire & illum non poteris pati,
Dare denegaris: ibi ad illum illico,

Quem maxime apud te valere fentiet,

Abiturum fe abs te effe illico minabitur. Idem Heaut.

Il fait beau voir un enfant marquer ainfi fon obéiffance à fon pere:

Neque iftic , neque alibi tibi ufquam erit in me mora,

idem.

C'est un crime de défobeir à fon pere dans le bien, & non dans le mal. Adverfari [patri] fine dedecore

Et fcelere fummo poffumus. Plaut.

C'eft à cet âge encore tendre qu'il faut les former & les inftruire fans relâche.

Udum & molle lutum es: nunc properandus & acri
Fingendus fine fine rota. Perf. Sat. 3.

Quand un jeune homme a le malheur de tomber dans quelques défordres, il doit travailler à s'en retirer promptement. Quand on a 20..ans paffez,le libertinage eft plus condamnable.

Breve fi quod turpiter audes.

Quædam cum prima relecentur crimina barba. Juv.

Sat. 8.

Il eft bon d'accoûtumer de bonne heure les jeunes gens au travail & aux exercices qui conviennent à leur condition; rien n'eft plus dangereux que l'oifiveté, & ce n'eft pas fans raifon, qu'on l'appelle la mere de tous les vi

ces.

Quæritur Ægifthus quare fit factus adulter:
In promptu caufa eft, defidiofus erat. Ovids

Claudien nous aprend qu'on avoit accoûtumé l'Empereur Honorius à toutes fortes de fatigues & d'exercices dès fes jeunes ans.

Mox ubi firmasti recto vestigia gressu

Non tibi defidias molles, nec marcida luxu
Otia, nec fomnos genitor permfit inertes,
Sed nova per duros inftruxit membra labores,
Et crudâ teneras exercuit indole vires.
Frigora fæva pati, gravibus non cedere nimbis
Eftivum tolerare jubar, tranfnare sonoras
Torrentum furias, adcenfu vincere montes,
Planitiem curfu, valles & concava faltu.
Nec non in clypeo vigiles perducere noctes,
In galea portare nives, nunc fpecula cornu
Tendere, nunc glandes baleari fpargere funda. 3
Confult. Honor.

Une bonne éducation eft fans doute le plus folide héritage qu'on puiffe laiffer aux enfans; c'eft de là que dépend tout leur bonheur ou leur malheur. Ainfi on ne fçauroit trop avertir les parens d'y veiller comme à la plus importante de leurs affaires & qui les touche de plus près. C'eft pourquoi on joint ici l'extrait de la Lettre d'une Dame à fon fils, qui eft pleine d'avis fages & raisonnables fur ce qu'on doit pratiquer & éviter dans le monde pour devenir honnête homme.

L'idée d'un Heros eft incompatible avec l'idée d'un homme fans juftice, fans probité & fans grandeur d'ame. Il