les grandeurs. Or eft-il que perfonne ne s'avise d'envier ce qui dépend de lui, & qu'il a en fa puiffance; il eft donc conftant que l'envie ne s'attache jamais qu'à de faux biens; & que ceux qui ne cherchent qu'a être libres, ne peuvent être fujets à cette paffion. C'est dans cette vue qu'Epictete difoit: Car fi tu es une fois bien perfuadé que l'effence de notre bonheur confifte dans les chofes qui font en notre puissance, ni l'envie, la jalousie n'auront plus de lieu, &c. Dacier, fur le 38. vers de la I. Ep. d'Horace, l. 1. Invidus. ni Elle n'est jamais contente de ce qu'elle a, Ac potius laudet diverfa fequentes Quodque aliena capella gerat diftentius uber Invidus alterius macrefcit rebus opimis. Idem. l.Ep. 2. Elle fe gliffe par tout couvert de fa malignité, rien n'eft à femblable à un vent peftilentiel, qui infecte de fon haleine tous les lieux par où il paffe. Quifnam impacatâ confanguinitate ligavit Invenêre viam liventia fata, piumque Invidet, & velis adnubilat aura fecundis. Stat.Sylv.l.s. L'envie ne s'attache qu'aux chofes élevées. Summa petit livor. Perffant altiffima venti Quò non livor adit? Sunt qui tibi menfis honorem Tout le monde y eft expofé. Stilicon la furmontée par fa vertu. Nulli pars æmula defuit unquam Que gravis obftreperet laudi, ftimulifque malignis Humanumque modum. Quis enim vefcere poffit * Il fuffit d'avoir un nom pour être en butte à l'envie. Le merite non plus que la dignité ne font point à couvert de fes traits! L'envie eft un vice commun à tout le monde. Que la plupart de ceux qui fe difent amis font faux & d'une fidelité douteuse. Multi more ifto atque exemplo vivunt, quos cum cenfeas Effe amicos, reperiuntur falsi falsimoniis Lingua factiofi, inertes opera, íublefta fide. La premiere maxime de la politique d'un Roi, eft de pouvoir fouffrir l'envie. Ars prima regni eft poffe te invidiam pati. Sen. Herc. Fur. C'est être fou de porter envie aux fuperbes heureux. Demens fuperbis invidet felicibus. Pytac. apud Aufon Properce fe plaint que pendant qu'il vivoit, on lui portoit envie : mais qu'après fa mort la pofterité lui rendra juftice au-delà de ce qu'il merite:qu'alors elle groffitles objets, & que la reputation d'un homme fort du tombeau plus belle & plus brillante. At mihi quod vivo detraxerit invida turba, Omnia poft obitum fingit majora vetuftas Le Comte de Buffy après Martial, s'eft moqué de ces envieux qui n'eftiment les gens de merite qu'après leur mort. Tu n'eftimes que ceux des fiécles paffez: Pour vouloir par ma mort meriter ton eftime. Et Ovide, Invide, quid laceras Nafonis carmina rapti ? Le même Poëte avoue dans un autre endroit qu'en effet il a joüit de fa reputation pendant fa vie, ce qui n'arrive pour l'ordinaire qu'après la mort, & que l'envie qui a coûtume d'attaquer les vivans, n'a trouvé rien à mordre dans fes ouvrages. Tu mihi, quod rarum eft, vivo fublime dedisti Si quid habent igitur vatum præfagia veri: Protinus ut moriar non ero, terra, tuus. Sive favore tuli, five hanc ego carmine famam: Les morts mêmes ne font pas à couvert de l'envie, elle les va attaquer jufques dans les tombeaux. Nec levida tabes Invidiæ fun&is, quamquam etiam lumine caffis L. 2. Belle description de l'envie, où fes effets font admirablement dépeints. Les vers fuivans font attribuez à Virgile. Livor tabificum mális venenum Non lux non cibus eft fuavis illi: Alecton une des Furies d'Enfer pouffée par un mouvement d'envie de voir la tranquillité dont on joüissoit dans les villes, affemble toutes fes compagnes pour la troubler. Invidiæ quondam ftimulis incanduit atrox |