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l'Europe s'y trouvant comme ramaffée, rendoit ce féjour extrêmement contagieux pour les perfonnes de l'âge où étoit François.

Ce jeune homme plus occupé de conferver l'innocence de fon cœur, que d'avancer dans les fciences humaines, crut qu'en étudiant fous les plus habiles maîtres, il devoit fe mettre fous la conduite d'un directeur le plus pieux & le plus éclairé qu'il lui feroit poffible de trouver; & il trouva ce qu'il defiroit en la perfonne du P. Poiffevin Jéfuite. Cet homme célébre charmé de la beauté de l'efprit de François, autant que de la pureté de fes mœurs lui donna des leçons de Théologie, dont le difciple fçut faire ufage dans la fuite, pour la converfion des hérétiques les plus habiles.

La douceur qui de fon cœur fe répandoit fur fon vifage & dans toutes fes actions, lui gagna l'affection de tout le monde: un caractere de vertu, qui marqué fur fon front foutenoit cette douceur, imprima d'abord aux jeunes gens avec qui il étoit forcé d'avoir quelque commerce, un refpect qui les contint. Mais ces libertins, confus des reproches secrets que leur faifoit la conduite du faint jeune homme, & piqués de dépit de ce qu'ils ne pouvoient l'affocier à leurs défordres, entreprirent par honneur, de le vaincre; En 1585. & toutes les infinuations qu'ils avoient employées nour le féduire, n'ayant pû réuffir, ils eurent recours à l'artifice.

que fes

compa

Il échappe Ils l'engagerent, fous prétexte de fatisfaire à un aux piéges devoir de bienféance, de vifiter avec eux une courtifane que le fimple jeune homme étoit bien éloigné de connoître pour ce qu'elle étoit. Après quel que tems de converfation, ils trouverent chacun tendus à fa une raifon pour fe retirer imperceptiblement l'un chafteté, après l'autre, & ils laifferent François feul, livré

gnons avoient

en

en proie aux follicitations de la prostituée. La douceur de François n'étant pas capable d'arrêter les pourfuites de cette impudique, fa chafteté allarmée eut recours à la violence. Ce fut la feule fois de fa vie. Il prit en main un tifon ardent, & repouffant avec force cette ennemie de fa pudeur, il la rendit auffi confuse de l'iffue peu efperée de fon entreprise, qu'elle auroit dû l'être du feul deffein qu'elle avoit eu de la former.

Toutes les précautions qu'il prit depuis ce combat, ne purent le garantir d'y être une feconde fois engagé; mais la victoire qu'il remporta une feconde fois fut plus glorieufe, & fon triomphe fut complet. Non-feulement il échappa aux piéges qu'on lui avoit tendus, mais en repréfentant à celle qu'on avoit Il converit apoftée pour le corrompre, que Dieu la regardoit, une femmè il l'arrêta; & lui ayant fait fentir toute l'indignité qui vouloit de fon action, il lui en fit concevoir du regret, & la convertit.

le corrom

pre.

fait tomber

Après avoir vaincu les ennemis du dehors, il crut qu'il étoit néceffaire de les défarmer ; & comme ils avoient eu l'adreffe d'employer la révolte de la chair pour le faire fuccomber, il prit le parti de la réduire à une telle foibleffe, qu'elle fût incapable du moindre foulevement. Pour y réüffir, il Sa mortipratiqua toute ce qu'une pénitence ingénieufe peut fication, le inventer d'innocens artifices pour affliger le corps, dans une & il porta fi loin l'aufterité, qu'il tomba dans une maladie maladie qu'on crut ne devoir finir qu'avec la vie : mortelle. mais Dieu conferva une vie qui dévoit être employée pour le foutien de fon Eglife. Le malade Il prend le fut guéri, & dès que fa fanté fut affermie, il prit le Bonnet de Bonnet de Docteur en Droit avec l'applaudiffement Docteur cit de toute l'Univerfité de Padouë. Il quitta enfuite cette Ville pour aller à Rome vifiter le Tombeau

b

Droit à Pa

doue.

des Saints Apôtres : de-là il alla à Notre-Dame de Lorette; il y renouvella fon vœu de continence,, & après avoir fatisfait aux devoits de piété qui l'avoient porté à faire ces voyages, il revint dans le fein de fa famille.

Vûës de Son pere qui dans le cœur d'un jeune homme fi fon pere accompli, voyoit germer la fplendeur & l'élévation pour fon de fa Maison, avoit de grands deffeins pour fon

établifle

ment.

établissement dans le fiécle; mais les vûës de Fran

çois, qui dès fa premiere jeuneffe avoit pris le Seigneur pour fon héritage, étoient bien différentes Il eft reçû de celles de fon pere; il ne les fit connoître qu'aAvocat au près qu'il eût été reçû Avocat au Sénat de ChamSénat de bery, & que fes parens lui eurent propofé une alChambery. liance avec un parti digne de lui & convenable à fa

l'état Ecclé

naiffance.

11 déclare Il déclara qu'il avoit réfolu de s'engager dans le qu'il veut miniftere de l'Eglife. Son pere fut frappé & prefque embraffer, accablé de cette déclaration; mais comme la Relifiaftique. gion lui fit aifément connoître que les grands talens Son pere de François ne venoient que de Dieu, il comprit s'oppofe à qu'il ne devoit pas empêcher qu'ils ne fuffent emfon deffein. ployés pour la gloire de celui de qui fon fils les tenoit ; & il confentit à l'exécution d'un deffein qu'il vit bien que le Seigneur seul avoit inspiré.

En 1534

Il y avoit plus de foixante ans que les Calviniftes s'étant rendus maîtres de Geneve, avoient chaffé de la Ville Pierre de la Baume qui en étoit Evêque. Ce Prélat s'étoit retiré à Annessy, & il y avoit établi fon Siége. Pierre de Granier étoit alors fur ce SiéIl eft nom- ge, & la dignité de Prevôt de fon Eglise Cathédrale iné à la Pre- ayant vaqué, François fut nommé pour la remplir. vôté de l'E- Ses Bulles font du 7 Mars l'an S. du Pontificat de glife d'An- Clément VIII. Le nouveau Prevôt n'étoit pas encore neffy. dans les Ordres facrés ; cependant il ne laiffa pas de

quitter auffi-tôt fa famille pour aller au lieu de fa réfidence. L'Evêque de Geneve le reçut avec de grandes marques de tendreffe, & il fut ravi de le voir foutenir par fa piété, sa sagesse & son fçavoir l'estime qu'il avoit conçue pour lui, quand il l'avoit connu à Rome.

dres facrés

François reçut les faints Ordres, & dès qu'il Il eft proeût été promû au Diaconat, l'Evêque crut ne de- mû aux Orvoir pas différer d'employer pour l'avantage des peu- & chargé ples, les grands talens qu'il lui connoiffoit pour du miniftela parole: il le chargea du miniftere de la Prédi- re de la Pré

cation.

dication.

offre une

Charge de

Ce fut en ce tems-là que le Duc de Savoye lui Le Duc de offrit pour la feconde fois une place de Sénateur à Savoye lui Chambery; mais comme le pieux Miniftre de Jefus-Chrift avoit appris de S. Paul, qu'un homme sénateur au engagé au fervice de Dieu ne doit point s'embaraf Sénat de fer dans le tumulte des affaires du fiécle, il fe crut Chambery, obligé de ne pas accepter cette place, & il ne fon- 2. Tim. 2. gea qu'à s'acquitter de la miffion qu'il avoit reçûë 4. de fon Evêque. Il le fit avec un fuccès étonnant, & legrand nombre de converfions qu'il opera dans le cours de deux années, l'ayant fait juger capable de réüffir dans les entreprifes les plus importantes en ce genre; dès qu'il fut élevé à la Prêtrife, l'Evêque à la tête le mit à la tête d'une Miffion qu'il envoya dans le d'une Mi Chablais, pour réunir à l'Eglife les Peuples de cette fion dans le

Province.

Comme l'héréfie que depuis foixante-dix ans Luther & enfuite Calvin y avoient répandue, avoit à peine laiffé parmi ces peuples la connoiffance de la Foi Catholique, le fuccès de la Miffion paroiffoit très-incertain; mais François emporté par le zéle Apoftolique qui le dévoroit, & foutenu de l'autorité du Duc de Savoye, s'étant rendu d'abord à

Grand fuca

cès de fes

Sermons.

En 1594

Il est mis

Chablais.

mal

Il furmonte Thonon Capitale de la Province, commença les obftacles gré l'oppofition qu'il trouva de la part des habitans qui s'oppo- de cette Ville, à travailler à l'inftruction de ces ércès de la rans. Il n'avoit alors pour Compagnon de fes tra

fent au fuc.

Miffion.

vaux que Louis de Sales, Chanoine de Geneve, fon parent. Les menaces, les injures, la calomnie, les infultes, les dangers évidens où fa vie fut plufieurs' fois expofée, ne l'empêcherent ni de prêcher affidûment, ni de tenir fréquemment des Conférences Ses travaux particulieres. Lorfque la fureur de la perfécution le & fes pei- forçoit de fe dérober à la violence des hérétiques, il nes dans le fe retiroit dans l'obfcurité des forêts, & fouvent il Miffion de fut forcé pour échaper à la pourfuite des ennemis de Chablais. la Religion, de fe cacher dans le fond des fours & des glacieres.

cours de la

A la premiere efperance de calme, il reparoiffoit auffi-tôt ; & l'onction de les difcours jointe à la force de la verité qu'il annonçoit, lui firent faire enfin de fi heureux progrès, que le Pape l'en congratula par un Bref, & que le Duc le fit venir auprès de lui pour le confulter fur les moyens d'extirper entiérement l'héréfie dans la Province où il avoit déja fait En 1597. tant de converfions.

Le Duc de Ce Prince vit par lui-même ce que la réputation Savoye le du Prevôt d'Anneffy ne lui avoit fait connoître fait venir à qu'imparfaitement. Il admira la profonde sagesse

fa Cour.

de François dans les mefures qu'il lui propofa de prendre pour l'exécution de fon deffein ; & lui ayant promis de l'appuyer de toute fa puiffance, le zelé Miffionnaire partit pour mettre la derniere main à l'ouvrage qu'il avoit déja beaucoup avancé. Il rétablit d'abord les Curés dans tous les lieux d'où ils avoient été chaffés ; & conformément au projet formé de concert avec le Prince, il leur affigna desrevenus pour fubfifter. Enfuite furmontant tout ce que

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