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Xénophon étoit à la fois grand Capitaine, grand Philofophe & grand Hiftorien; le

l'une de M. Larcher, de l'Académie Royale des Infcriptions & Belles-Lettres, & de celle de Dijon. (Paris, 1778, 2 vol. in-12, chez les Frères de Bure). La feconde de M. le Comte de la Luzerne, Maréchal des Camps & Armées du Roi (nouvelle édition, Paris, 1778, 2 vol. in-12, chez Cellot & Jombert le jeune, rue Dauphine). Ces deux excellentes traductions nous ont paru rendre toutes les beautés & toute l'élégance de l'original. Elles font utiles & néceffaires à tout Militaire, qui, ne pouvant lire Xénophon dans le texte, eft curieux de s'inftruire de la Tactique des anciens. Elles font auffi accompagnées de notes instructives pour l'intelligence du texte. On ne fauroit être trop reconnoiffant envers des hommes d'un favoir auffi rare, & d'un mérite auffi diftingué que M. Larcher & M. le Comte de la Luzerne, de l'utile emploi qu'ils font de leurs veilles. Il appartenoit également au Savant & au Militaire de traduire Xénophon. Mais quel ufage plus glorieux, plus digne d'éloge & d'eftime, un homme de qualité très-instruit, poffédant parfaitemenr la Langue Grecque, peut-il faire de fes talens? Que l'exemple de M. de la Luzerne eft bien fait pour inspirer l'amour du favoir, quand on le confacre comme lui, à l'instruction de ses semblables!

furnom de Mufe & d'Abeille Athénienne, qu'il reçut de fes Contemporains, prouve que la Philofophie de ces temps reculés n'étouffoit point le génie, ne corrompoit point le goût, ne refroidiffoit point l'imagination qu'elle animoit tout du coloris de la Poéfie, qu'elle favoit répandre des fleurs fur les fujets les plus arides, & adoucir fon auftérité, en s'abandonnant aux douces infpirations des Mufes : que loin d'être fombre, froide & compaffée, elle avoit tout l'élan du génie, & tout le feu d'une imagination vive & brillante. Auffi Xénophon emprunta-t-il le pinceau d'Hérodote nouvel hommage rendu à Homère.

Cette heureuse union de la Philofophie & de la Poesie, eft encore plus sensible dans les écrits de Platon. Né avec un génie profond, accompagné de la plus belle imagination, la Poéfie, la Peinture & la Mufique furent les premiers jeux de fa jeuneffe: mais bientôt entraîné l'attrait de la Philofophie, il s'y livra

par

tout entier, & devint le plus éloquent des Philofophes. A la manière divine dont il s'exprime, dans laquelle on fent l'étude qu'il avoit faite d'Homère, on croit entendre un Dieu parler, & non un simple mortel (1). Il recueillit avec foin les différens fyftêmes des anciens Philofophes, ce qu'il avoit pu apprendre des Disciples de Pythagore, & principalement les leçons qu'il avoit reçues de Socrate: il en forma un ouvrage complet, & s'abandonnant au feu de fon imagination, il fit parler à la Philofophie le langage d'Homère. Son ftyle harmonieux, plein d'images & de Poésie, ajoute encore un prix à ses ouvrages admirés des Grecs, dont à cet

(1) Philofophorum ex quibus plurimum fe traxiffe eloquentiæ M. Tullius confitetur, quis dubitet Platonem effe præcipuum, five acumine differendi, five eloquendi facultate divinâ quadam & homericâ ? Multum enim fupra profam orationem, & quam pedeftrem Græci vocant, furgit: ut mihi non hominis ingenio, fed quodam delphico videatur oraculo inftinctus. QUINTIL. Lib. X, Cap. I, pag. 744 & 745.

égard la postérité n'a point démenti la juste admiration.

Les Arts & les Sciences trouvèrent également de grands Hommes qui leur confacrèrent leurs veilles ; & fi nous avons fu depuis perfectionner les uns, fi nous avons plus approfondi les autres, il refte toujours aux Grecs la gloire de l'invention. Nous fommes trop heureux que le temps ait refpecté une partie de ces monumens immortels d'Architecture & de Sculpture qu'ils nous ont laiffés : la vétusté n'en a pas altéré la beauté le génie de l'Artiste semble y respirer encore, & on ne peut les contempler qu'avec ce raviffement, cette extafe que les miracles 'de l'art inspirent. Ne le diffimulons point, nous ferons toujours forcés de convenir que c'eft du centre de la Grèce que font partis tous les rayons de lumière qui ont éclairé jufqu'à préfent, dans tous les genres, les Sciences & les Arts. Mais fi nous n'avons qu'une ftérile admiration pour ces Chefs-d'œuvre du génie; si nous

ne brûlons pas du feu qui les a produits, fi le defir de nous immortaliser est éteint dans nos cœurs, ces Chefs-d'œuvre font pour nous, comme s'ils n'avoient jamais exifté.

Le Génie, les Talens ne demandent qu'à naître: ils languiffent & meurent s'ils ne font protégés. C'est donc à ceux qui ont le pouvoir en main, s'ils chériffent la véritable gloire, à les aimer, à les protéger, à les faire éclore. Qu'ils donnent au génie des aîles, en applaudiffant à fes efforts, & en le comblant d'honneurs ; qu'ils rendent par-là l'émulation générale, elle fera alors auffi glorieufe qu'utile à la chofe publique. Telle fut la conduite de Périclès lorfqu'il étoit à la tête de la République. Jamais Athènes ne fut plus floriffante que fous fon administration. Les magnifiques Monumens de toute espèce dont il l'embellit, le nombre immenfe de ftatues dont il la décora, en firent une ville fuperbe, & la plus impofante de la Grèce. Quelle haute idée, tant de

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