Imágenes de páginas
PDF
EPUB

15320

tans avec les Catholiques dans une utile émulation contre les Turcs; ils s'emprefferent tous à l'envi de fournir des troupes, & en peu de temps l'Empereur, qui faifoit alors fa premiere expédition importante, fe vit fur les frontieres de la Hongrie à la tête de deux cens mille hommes dont il y en avoit trente mille de cavalerie. (1)

On ne connoiffoit plus depuis plufieurs fiecles l'ufage de ces innom. brables armées; mais celle-ci étoit néceffaire pour réfifter à Soliman, qui, pour réparer l'affront qu'ilavoit reçu devant Vienne, s'avançoit avec une armée de trois cens mille chevaux, fans compter l'infanterie. Ces armemens épouvantables qui fembloient devoir inonder de fang cette partie de l'Europe, ne fervirent qu'à lui donner un fpectacle fingulier. L'immensité des préparatifs, la lon

(1) Baucaire dit qu'il y avoit trente mille hom mnes de cavalerie, & quatre vingt dix mille d'ine fanterie, ce qui paroît plus vraisemblable. Belcar, Jiv. 26. n. 39.

gueur du chemin, la difficulté de faire mouvoir cette multitude énor- 15321 me, furent caufe que Soliman arriva très tard en Hongrie. Il avoit publié qu'il alloit marcher directement à l'Empereur, fe mefurer avec lui dans une bataille, & décider de la deftinée des deux Empires; il ne fit rien de tout cela, il ravagea quelques terres, fe montra & fe retira. Il fembla craindre l'Empereur qui le craignoit encore plus, en faifant pourtant bonne contenance; (1) & comme enfin les Turcs fe retirerent, cela s'appella les avoir vaincus & forcés à la retraite. Mais on refpecta cette retraite, on ne la troubla point, on s'affura bien qu'ils étoient partis de peur qu'ils ne revinffent; on ne voulut pas même, comme il étoit fi naturel & fi aifé de le faire, s'arrêter

(1) Il parcouroit les rangs, chevauchant tout sarmé, difant qu'il tueroit ce chien de Turc, & n'y a perfonne qui me fçeuft garder que je ne me trouve en perfonne à la Bataille.

Le fameux Aftrologue Luc Gauric, lui indiqua Les 15. premiers jours d'Octobre, fur-tont le 5 comme des jours heureux pour combattre le Turci

1532.

$20.

en Hongrie pour foumettre ce royaume à la domination de Ferdinand; on fe contenta d'y envoyer quelGuicciard. que infanterie Italienne, qui fe révol ta, dit Guichardin, fans pouvoir dire pourquoi, & qui reprit brufquement la route de l'Italie, en brulant fur fon paffage les villages & les bourgs, pour fe venger, difoit-elle, fur l'Ållemagne de tant d'incendies & de ravages dont les Allemans avoient rempli l'Italie.

Sleidan. Commentar,

[ocr errors]

L'Empereur accufa de cette fédi tion des troupes Italiennes, le Cardinal Hyppolite de Médicis, que le Pape avoit envoyé à l'armée de Hon grie en qualite de Légat Apoftolique, & il le fit arrêter. C'étoit la def, tinée de Charles-Quint de faire prifonniers les Rois, les Papes & les Cardinaux, & c'étoit la deftinée des Papes & des Cardinaux du nom de Médicis, d'être faits prifonniers au moins une fois dans leur vie. Léon X. l'avoit été à la bataille de Ra venne, avant fon exaltation: Clément VII, l'avoit été dans Rome; le

Cardinal

Cardinal Hyppolite de Médicis (1)

le fut à l'armée de Hongrie ; mais la 1532.
détention de ce dernier fut courte.
L'Empereur fentit de lui-même les
conféquences du nouvel affront qu'il
faifoit au Pape, il fit de grandes
excuses & au Pape & au Cardinal;
& cette affaire, qui eût pu
devenir
très-considérable, fut étouffée dans,
fa naiffance.

Soliman, au retour de cette ridicule expédition, la feule de cette efpece qu'il eût jamais à fe reprocher fit une entrée triomphante dans Conftantinople, pour avoir, difoit-il , empêché l'Empereur de conquérir la Hongrie.

(1) Ce Cardinal étoit furieux de l'être. » Il ne »pouvoit, difoit-il, endurer que le Duc Alexandre "fon Coufin, plus jeune que lui, plus mal né que

[ocr errors]

lui, plus bas en race que lui, moindre de fçavoir & de toutes chofes, fuft choisi pour avoir » tous les biens & les honneurs de ce monde, & » lui demourer un Prêtre pour tout potage; il ne parloit que de faire révolter Florence & Sienne il entretenoit pour cela des liaisons avec la France, & peut être fut-ce la véritable caufe de fa détention. (Lettre de l'Evêque d'Auxerre au GrandMaître de Montmorency, du 7 Mars 1532). Tome IV

1

#533.

CHAPITRE V.

Affaires d'Italie, Ligue de Bologne.

CE qui avoit pu contribuer à la

Pâques le négligence avec laquelle l'Empereur venoit de traiter les affaires de Hon.

13 Avril.

I 20.

grie, c'étoit l'impatience quile prefGuicciard, foit de retourner en Italie, où il lui reftoit encore bien des chofes à régler. Il ne croyoit pas avoir affez fermé à François Premier l'entrée de ce pays, quoique par fon Traité avec les Puiffances Italiques, il les eût toutes engagées à la défenfe refpective de leurs Etats. Ce Traité n'avoit paru exclure les François que du royaume de Naples & du Duché de Milan, Gênes n'étoit pas nommément comprise dans les rénoncia, tions du Roi, c'étoit donc toujours une porte qui reftoit à François Premier pour rentrer en Italie, & pour y renouveller les troubles. A la vé rité le Roi, par le Traité de Cam

« AnteriorContinuar »