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préparation aux hoftilités plutôt que des hoftilités. Le Roi s'attachoit 1536. principalement à deux objets, il vouloit conferver fes conquêtes du Piémont, & bien défendre la France fi elle étoit attaquée.

Mais de ces deux objets, c'étoit

Mém. de

le fecond qui attiroit le plus fon at- Langei, 1. 6, tention. Il comptoit fur la vanité de l'Empereur pour préférer une defcente en France à une guerre dans le Piémont. C'étoit ce que le Roi défiroit, c'étoit fur fes foyers qu'il attendoit l'Empereur. Il levoit, pour le bien recevoir, une armée formidable à laquelle il devoit joindre les reftes de fon armée du Piémont, que l'Amiral lui ramenoit. Il trouvoit dans la defcente des ennemis en France, deux grands avantages pour lui, l'un que l'aggreffion feroit plus éclatante, l'autre que la honte de Charles-Quint feroit plus complette. Si la guerre fe faifoit dans le Piémont, l'Empereur la feroit commodément, il tireroit du Milanès fes vivres & fes munitions;

en cas de difgrace, la retraite fe 1536. roit libre & facile,il n'y avoit point là pour l'Empereur de grande confufion à effuyer. Si au contraire il portoit la guerre en France, le Roi l'attendoit au paffage des Alpes, dir il espéroit lui faire perdre une bonne partie de fon armée; il devoit enfuite fe retirer vers le cœur duroyaume, en faisant le dégât, en brûlant les vivres & les fourages, en enfermant l'armée Impériale dans un vafte défert qu'il laifferoit entre lur & les Alpes, après avoir bien approvifionné & fourni de garnifons nombreufes toutes les Places en état d'être défendues; c'étoit par la famine par les fatigues qu'il vouloit ruiner l'armée de l'Empereur, il ne devoit livrer bataille que s'il y étoit forcé; la maturité de l'âge, l'expérience, le fouvenir de Pavie l'avoient fait revenir de la fureur des batailles; il commençoit à préférer une guerre lente & fyftématique. Or dans cette vue d'attirer l'Empereur en France, & de lui faire négliger

&

la guerre du Piémont, il étoit effentiel de rappeller l'armée de l'Amiral; 1536. car fi le Roi avoit une armée dans le Piémont, il étoit impoffible que la guerre ne s'y fît pas. L'Empereur feroit-il affez imprudent pour laiffer derriere lui une armée qui pourroit lui fermer le retour?

Mém. de

Mais d'un autre côté il falloit conferver au moins les principales con- Langei, 1. 6. quêtes du Piémont, c'est pourquoi le Roi avoit ordonné à l'Amiral de fortifier promptement, avant fon départ, les plus confidérables Places & d'y laiffer des garnifons fuffifantes pour les défendre; il étoit poffible que l'Empereur, dans l'empreffement d'attaquer la France, ne vou lût point s'arrêter devant ces Places, qu'il efpérât qu'elles tomberoient d'elles-mêmes, lorfque maître du Milanès, d'un côté, ayant conquis la Provence de Pautre, il les tiendroit enfermées entre deux Etats dont il pourroit réunir contreelles toutes les forces.

Par-là le double objet du Roi fe

roit rempli: pourvu que l'Empereur 1536. s'engageât dans les Alpes, le Roi fe croyoit für de garder les conquêtes du Piémont, & d'humilier fon ennemi en Provence.

Si pourtant l'Empereur, mieux confeillé, commençoit par faire le fiége des Places du Piémont, le Roi fe propofoit de paffer les Alpes luimême pour aller défendre fes conquêtes.

Son amour pour la gloire, fon application aux affaires reprenoient alors une nouvelle force. Alexandre, dit le Maréchal de Tavanes Mém. devoit les femmes quand il n'a point Tavanes. d'affaires, François voit les affaires quand il n'a plus de femmes. Phrafe de pur bel efprit, où il n'y a pas un mot d'exact. Alexandre ne fut jamais fans affaires; quand il fut amoureux, ce fut au milieu des affaires même & par délaffement. François le fut toute fa vie, les femmes le gouvernerent encore plus dans fes dernieres années que dans les premieres, comme on le verra dans la

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guerre de 1542, mais toujours fans lui faire trop négliger fes affaires. 1536. S'il y eut un temps où il fut propre à l'amour, ce fut fur-tout depuis fon avénement à la Couronne jufqu'en 1525. Or jamais, à quelques éclipfes près, il ne fe livra aux affaires avec tant d'ardeur que dans ces premieres années de fon regne. Il eft vrai qu'il eut un intervalle de langueur depuis le Traité de Madrid jusqu'au Traité de Cambrai, mais cette langueur venoit moins de fes amours que de la longue impreffion de fes malheurs, qui le portoit au re→ pos.

Ses foins s'étendirent à tout dans cette guerre de 1536. La France pouvoit principalement être attaquée du côté des Pays-Bas en Picardie, du côté de l'Allemagne en Champagne, du côté de l'Italie en Dauphi né & en Provence, du côté de l'Espagne en Guyenne; il pourvut à tous ces objets, il fit réparer les fortifications des Places frontieres dans toutes ces Provinces, il y fit dif

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