FABLE I V. La Vertu, l'Opulence, & l'Indigence. UN jour la Vertu vint für terre, Et ne fçavoit où fe loger. Et la vertu l'accepte, & crut que fans danger De faire à fon Hôteffe un gracieux accueil. Elle méprifoit l'Opulence, Et dans le fil de fon difcours La Médifance Prit féance. Enfin au bout de quelques jours Elle s'en fut & dit, ah ! quelle perfidie! Croiroit-on l'Indigence avoir pareils défauts ? Chemin faifant elle vit l'Opulence Qui vivement l'aborde & lui tient ce propos: Je vous prépare un fûr azile, Seront au gré de vos défirs. La Vertu répondit: cela ne peut me plaire, Où je loge pour l'ordinaire. Ce difcours eft fimple, ingénu; Mais il y refte un certain voile. FABLE V. L'Enfant & les Fleurs. Avide de cueillir des Fleurs', Dit en lui-même, il faut me fatisfaire, 4 Tout m'offre ici mille douceurs UNE Fourmi dans la belle faison Travailloit, amaffoit fans ceffe. A tous elle étoit fecourable : Avoit auffi part au gâteau; Enfin notre Fourmi n'avoit pas fon égale ¿ Vous vous croyez un talent fingulier; La fierté de nos cœurs devroit être profcritte FABLE VIII. "La Vigne-Vierge. UN Payfan de bon fens, d'esprit mûr Entrant un jour dans un Auberge, Ah! ah! dit-il, cette vardure Mais n'eft-ce pas une parure, Et ne voudroit-on pas dérober à nos yeux Il écarte les branches. Mais, Plus d'un Faquin, dans un Bureau, Qui n'ont de beau que l'apparence, LA FABLE IX. Le Coq & la Limace. A Limace & le Coq devifant fous un chêne Avoient même dessein, un beau gland leur plaifoit ; Pour l'atteindre, le Coq fierement s'élançoit ; La Limace fous cap le glofoit sur sa peine, Et lui dit lentement, ta tentative est vaine, Imite-moi; c'eft ainfi qu'on s'y prend. Sieur Coq méprisant fa pensée, La vit aller tête baiffée Prendre le pié de l'arbre, & fi bien qu'en rempant Dame Limace eut la joie, D'atteindre & d'emporter la proye. Que l'honnête homme doit fouffrir, S'il eft contraint d'imiter la Limace! |