Imágenes de páginas
PDF
EPUB

********************

FABLE XX.

La Tourterelle qui a perdu fa Compagne
UNE Tourterelle,

Le vrai fymbole de l'Amour,
Avoit perdu fa Compagne fidéle;
Elle en gémiffoit nuit & jour.
Pour adoucir fon Etat déplorable,
Ses voisins, fes amis vinrent la fupplier.
De fe choifer parti-fortable,
Tous prétendoient l'affocier;
Mais la Tourterelle plus fage

Leur dit: l'Amour ne doit plus m'enflamer;
Ce feroit folie à mon âge,
Si je me laiffois charmer;
Je ne fuis plus au tems d'aimer

Je dois refter dans le veuvage.

La Tourterelle avoit bien du bon fens. Les femmes aujourd'hui ne penfent pas de mêmes Et l'on en voit plus d'une à foixante & dix ans Réfuter fon fyftême.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small]

AM. DESYEUX, Avocat au Parlement.

Sous les dehors de l'affabilité,

Bien fouvent l'homme n'eft qu'un traitre,
Et fait aux mouvemens de la duplicité.

C'eft un Prothée, il eft ce qu'il veut être,
Homme du jour, & vicieux par choix,
Trop de fincerité le bleffe;
La cordialité tant prifée autrefois,

Aujourd'hui n'eft plus que foiblefle
On ridiculife un cœur droit,

L'homme du jour fe rit de la fimple innocence
A tromper chacun eft adroit,

[ocr errors]

Et s'il eft des vertus ce n'eft qu'en apparence. J'avouerai cependant qu'on peut trouver encore Des hommes vertueux; il eft vrai qu'ils font rares, Pour nous les prodiguer les Dieux font trop avares: Mais enfin il en eft; oui, j'en tombe d'accord. Ainfi, charmant DESYEUX, ami de la Juftiee, Permettez qu'en mes Vers je place votre Nom, Vous en qui je connois un cœur fans artifice,

Un efprit vif guidé par la raison,
Un doux & liant caractére
Qui, fans bleffer, donne le ton
A la Sageffe trop austére.
Le goût & le bon fens toujours à l'uniffon
Forment en vous une belle harmonie

Qui découvre les qualités

D'un rare & folide génie.

Invincibles Héros, Demi-Dieux tant vantés,
La Victoire eft toujours pour vous le bien fuprême
Elle maîtrife tous vos fens;

Mais je ne donne mon encens

Qu'à qui fçait fe vaincre foi-même.

Je lus étant fort jeune, & je m'en souviens bien Qu'un Chat rufe fripon & de Race Normande, Sans ceffe chicannoit un Chien;

Un beau jour il lui fit demande

De telle portion d'un bien

Qu'il difoit être à lui, rien de plus faux au monde. Le Chien dit, ah, ah! Maître Chat

M'attaque? il faut que j'y réponde

Et que je faffe voir qu'il est un scélerat,

Je n'entens pas la procédure;

N'importe, j'ai bon droit, c'eft fur quoi je m'assure. Comme il parloit ainsi, vint un de fes amis,

Un autre Chien, qui fçavoit l'avanture,
Et qui lui donna cet avis.

Le Chat eft un franc miférable,
Qui te fait un mauvais procès;

Mais accommode à l'amiable,
Sinon crains un trifte fuccès:

Tu crois gagner & tu t'abuses,
Le Fripon en fon fac a toujours mille rufes.
La vérité, répliqua le Plaideur,

Eft mon appui, tout parle en ma faveur; Il ne peut alléguer que de vains fubterfuges. Son ami lui répond, ne foit pas entêté; La Juftice eft de ton côté,

Mais le Chat a pour lui les Juges.

XXXXX:XXXXXXX:XX

FABLE X XII

L'Ane & la Taupe

UN Ane... joli bas-relie£

Pour décorer un Frontispice!
S'écrira quelqu'un par malice;
Mais tel glofe & porte un beau chef,
Qui n'en eft pas beaucoup plus fage.
Dans un fertile pâturage,

Après s'être amplement répu,
Un Ane étoit de fon long étendu,
Et ne mouvoit ni pić ni patte
Satisfait dans fon doux loifir
Il s'épanouiffoit la rate.
Une Taupe voulant fortir
De fa demeure ordinaire,
Perce juftement la Terre
A l'endroit où notre Baudet
Appliquoit une large oreille;
Il en fentit bientôt l'effet,
Là peu de chofe nous réveille:

« AnteriorContinuar »