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fon fucceffeur, & l'obtint du légat qui donna à George une difpenfe d'âge, n'ayant alors que vingt-trois ans, & fa poftulation fut confirmée à Rome dans un confiftoire, & admife au commencement du mois d'Aoust 1511. enforte qu'il prit possession de cet archevêché par procureur dans le mois de Novembre, confacré à Gaillon le onziéme Décembre 1513. & reçu huit jours après dans fa cathédrale avec beaucoup de pompe. Enfin Paul III. à la priere du roi de France le fit cardinal le seiziéme Décembre 1545. & lui donna le titre de faint Marcellin, & de faint Pierre : & l'année fuivante il reçut le bonnet dans l'église de faint Etienne de Bourges. Il étoit à Rome quand ce pape mourut, & affifta au conclave, où Jules III. fut élu. Il tint un concile provincial à Rouen en 1514. & contribua beaucoup aux reparations & à l'embelliffement de fon églife. Enfin il mourut dans fon diocéfe le vingt-cinquième du mois d'Aoust 1550. Son cœur fut porté chez les Franciscains de Pontoife, & fon corps enterré dans la cathédrale de Rouen proche le maître autel dans le tombeau de fon oncle.

Cette même année mourut faint Jeam de Dieu fondateur de la Charité. Il étoit né à Monte-major-el-novo petite ville de Portugal, avec titre de comté en la province d'Alanteio au diocéfe d'Evora le huitiéme de Mars 1495. de parens pauvres & de baffe extraction. Son pere nommé André Ciudad, & sa mere dont on ignore le nom l'éleverent dans la pieté jufqu'à l'âge de huit à neuf ans, qu'un prêtre inconnu à qui ils avoient ac

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cordé l'hofpitalité dans leur maison, emmena le AN. 1550. jeune enfant à l'infçû de fes pere & mere, & l'abandonna enfuite fur le chemin de Madrid, à Oropefa dans la Caftille. Jean fe trouvant faus aucun fecours, entra au fervice d'un homme de probité nommé Mayoral, qui l'envoya à l'âge de quatorza ans, à une maison qu'il avoit aux champs pour y prendre foin de fes troupeaux. Jean n'y fut pas plûtôt arrivé qu'il regla rellement fes actions que fa vie étoit une fuite continuelle de bonnes œuvres. Son maître édifié de fa vertu lui confia quelques années après le foin de fa famille à la campagne, & l'établit comme l'économe de fes biens, & enfin il lui offrit fa fille en mariage. Mais le jeune homme préferant le célibat à celui du mariage, refufa ce parti, & pour éviter les follicitations de fon maître, il s'expofa à un danger plus grand que celui qu'il prétendoit fuir. Ce fut de s'enrôler dans une compagnie d'infanterie que levoit Jean Ferruz gentilhomme, dans le tems du fiége de Fontarabie en 1522. lorsque Charles V. voulut reprendre cette ville fur les François.

La vie fage & reglée dans laquelle il avoit vêcu jufqu'alors, fouffrit de fi grandes atteintes dans ce nouvel engagement, que fe laiffant entraîner au torrent du mauvais exemple, il perdit peu à peu cette pudeur & cette modeftie, qu'il avoit toujours fait paroître dans fa conduite. Îl abandonna fes exercices ordinaires de dévotion, il fe plongea dans tous les déréglemens que produit la vie licentieufe des foldats, & aucun frein ne put retenir fes paffions. Mais Dieu qui l'avoit choisi, permit

qu'il éprouvât divers accidens fâcheux qui le firent rentrer dans lui-même & renoncer à la profeffion des AN. 1550. armes. Il revint donc à Oropefa trouver Mayoral fon ancien maître, qui le reçut avec joye, & le rétablit dans fon économat: mais dix ans après, fur le bruit que l'empereur levoit des troupes pour faire la guerre aux Turcs, fon humeur guerriere se reveilla, il reprit le moufquet, alla jufqu'en Hongrie, & y fervit jufqu'à ce que les Turcs s'étant retirez, on licentia les troupes Espagnoles. Jean se trouvant du nombre revint dans fon pays, où ayant appris d'un de fes oncles la mort de fon pere & de fa mere, il paffa en Andaloufie,& de-là à Ceuta fur la côte d'Afrique, où il demeura quelque tems, & étant revenu à Gibraltar il fe mit à travailler pour fubfifter, & vivoit du reste avec beaucoup de pieté. Il avoit alors quarante ans au moins;s'étant fait un petit fond par fes épargnes, il l'employa à acheter des images, des catechifmes & d'autres petits livres de pieté pour les vendre dans Gibraltar; & enfuite fon fond s'étant augmenté, il prit le parti d'aller s'établir à Grenade, où il étala fes livres fous la principale porte de la ville. Quelque tems après aïant fçu que le docteur Jean d'Avila, qu'on furnommoit l'apôtre d'Andaloufie, devoit prêcher le jour de faint Sebastien dans l'hermitage de fon nom, il voulut entendre ce prédicateur, & en fut fi touché, que fondant en larmes, il remplit l'églife de cris & de lamentations qui le firent prendre pour un extravagant. Il se frappoit la poitrine, il fe déchiroit le vifage, il s'arrachoit la barbe & les cheveux, il fe rouloit dans la bouë, déteftant fa vie paffée, & ne faifoit que crier

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à Dieu de toute fa force, mifericorde. Chacun le AN. 1550. prit pour un infenfé, les enfans le poursuivoient à coups de pierres, il arriva chez lui tout couvert de fang. Alors il ne penfa plus qu'à fe dépouiller de tout ce qu'il avoit, & réduit à une pauvreté entiere, il se mit de nouveau à courir dans la ville pieds & tête nuë, en chemise & en caleçon,comme un vrai frenetique,jufqu'à ce qu'il fut arrivé à l'église cathédra le. Comme ce n'étoit que depuis que Jean avoit entendu le fermon d'Avila, qu'il menoit un genre de vie fi extraordinaire, on l'arrêta pour le mener vers ce prédicateur, afin de voir s'il pourroit guérir cet efprit que fon fermon avoit fi dangereufement bleffé. Avila le voïant ainfi couvert de boue & de fang, en fut furpris;mais le prenant à part après avoir fait retirer tout le monde,il fut fi édifié des fentimens & des difcours de celui qu'on faifoit paffer pour un infenfé, qu'il l'encouragea dans fes faintes réfolutions, & lui promit fon affiftance dans toutes les occafions. Jean confolé par cet homme apostolique, croyant qu'il ne pouvoit trop s'humilier continua dans fes folies apparentes, d'une maniere fi extraordinaire qu'on se crut obligé de l'enfermer dans l'hôpital des infenfez, où on le fuftigea tous les jours juf qu'au fang; & ce fupplice le mit dans un état fi dangereux pour fa vie que le docteur Avila en étant averti, l'alla voir dans l'hôpital, & l'avertit qu'il étoit tems de renoncer à cette folie volontaire & qu'il devoit s'appliquer à des actions plus utiles à fon falut & à celui du prochain. Le faint obéït auffi-tôt ; & les administrateurs de l'hôpital furpris de le voir fi-tôt devenu raisonnable & dans fon bon fens,

eûrent un si grand soin de lui, qu'en peu de tems il recouvra la fanté & toutes fes force. AN. 1550.

Le faint demeura encore quelques mois dans cet hôpital,& n'en fortit que le vingt & uniéme du mois d'Octobre,pour fuivre les avis de fon directeur& accomplir le vœu qu'il avoit fait de fervir Dieu dans les pauvres.Il commença cette bonne œuvre par un pelerinage qu'il fit à Notre-Dame de Guadeloupe en Eftramadure, & la premiere chofe à laquelle il s'appliqua d'abord, fut celle de nourrir quelques pauvres du gain qu'il pouvoit faire fur du bois qu'il apportoit & vendoit dans la place.Sa vertu anima plufieurs perfonnes pieuses à lui faire du bien, & par leurs aumônes il loüa une maifon où il retiroit les pauvres malades,& les affiftoit avec une œconomie, une activité, & une prévoyance fuivie d'un fuccès qui étonna toute la ville. Tels furent les commencemens du célebre hôpital de Grenade, & de l'ordre appellé des Freres de la Charité, qui fut bien-tôt fuivi d'un fuccès fi étonnant qu'on n'eut pas lieu de douter que ce ne fût l'ouvrage de Dieu.

La charité de ce faint homme ne se bornoit pas feulement aux malades:il cherchoit encore tous les moïens de fecourir les pauvres honteux:il procuroit du travail à ceux qui n'en avoient point, afin de leur faire éviter l'oifiveté;il prenoit un foin tout particulier des filles qui fe trouvoient fans bien & fans appui,fur tout lorfqu'elles étoient encore jeunes ; il alloit au-devant de leurs befoins, s'engageoit à les faire fubfifter pour les garantir des dangers de la tentation, où la pauvreté & la foibleffe les expofoit : il alloit même dans les lieux publics pour en

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