Imágenes de páginas
PDF
EPUB

furface de l'eau, vienne atteindre l'extrêmité inférieure de ce morceau de Sapin.

1o. Vous obferverez d'abord, que le Sapin s'enfonce dans l'eau; & que, loin de devenir plus léger, felon les loix communes de l'Hydrostatique, il devient au contraire plus pefant que le poids qui étoit auparavant en équilibre avec lui. Le Phyficien Taillor, qui fit le premier cette éxpérience, eut befoin d'une force ou d'un poids de 50 grains, pour rétablir l'équilibre.

II°. Vous obferverez enfuite, fi vous élevez doucement ce morceau de Sapin, que l'eau s'éleve avec lui jufqu'à une hauteur confidérable; & forme entre le refte de l'eau & l'extrêmité du fapin, une petite colonne qui y demeure fufpendue.

Les deux mêmes effets ont encore lieu plus ou moins fenfiblement : quand, en place du bois de Sapin, on emploie un autre Corps folide, comme du chêne, du fer, de l'argent, du marbre, du crystal.

EXPLICATION. A quelle Force attribuera-t-on ces deux effets; fi ce n'eft à une Attraction Spéciale entre les élémens de l'eau, d'une part; & les élémens du fapin ou de l'eau imbibée dans le fapin, de l'autre ?

1o. La Matiere tourbillonnante des Cartéfiens, cette brillante chimere qui fe dément en mille manieres & que nous détruirons ailleurs de fond en comble, fe trouve ici vifiblement en défaut.

Il eft clair d'abord, que la Matiere tourbillonnante ne peut pas élever l'eau en colonne vers la bafe du morceau de fapin exhauffé. Caufe de la pefanteur, felon les Difciples de Descartes, il fau droit qu'elle eût à la fois, & une tendance fpéciale vers le bas, pour produire la pefanteur; & une tendance fpéciale vers le haut, pour produire cette élévation de la colonne d'eau.

Il est clair enfuite, que la Matiere tourbillonnante ne peut pas contribuer à la fois, à enfoncer le bois

dans l'eau, & à élever l'eau au-deffus de fa furface à mefure que le bois s'y enfonce: il lui faudroit encore ici une double Action contraire; une vertu d'élever & une vertu d'abaiffer.

II. L'Auraction générale, proportionnelle aux maffes & en raison inverfe des quarrés des diftances, ne peut produire dans deux Corps placés près de la furface de la Terre, aucun mouvement fenfible qui les emporte l'un vers l'autre comme le démontre la théorie même de l'Attraction, & comme en conviennent tous les Sectateurs de Newton. (1422&1517). Donc fi l'Attraction a quelque influence réelle comme on n'en peut douter, fur les deux phénomenes dont il eft ici queftion : il eft conftant que cette attraction doit être une Attraction Spéciale, uniquement relative aux différentes efpeces d'élémens fur le point du contact. (88, 91, 1520).

Le célebre Abbé Sigorgne, ce fublime & profond interprete du grand Newton, reconnoît avec lui que l'Attraction en raifon directe des maffes & en raison inverse des quarrés des diftances, ne fuffit au cunement pour expliquer une foule de phénomenes de la Nature. Il fuppofe donc en conféquence, que l'Attraction agit à l'égard de tous les corps indiftinctement, en raison inverfe des Quarrés des diftances quand la distance eft notable; & en raifon inverse des Cubes des diftances, quand la diftance eft infi niment petite.

Mais l'augmentation de Force attractive, qu'il fup pofe également & indiftinctement à toutes les efpeces de corps, ne peut nullement fatisfaire aux divers phénomenes d'affinité que l'on obferve par-tout dans la Nature, & pour lefquels uniquement elle feroit

néceffaire.

97. Expérience II. Une Goutte d'eau, fur un Plan

horisontal de marbre ou de cuivre ou de bois verniffé, au lieu d'étendre fa furface felon le niveau qu'affectent les Liquides, prend une forme à peu près fphérique. (Fig 5).

EXPLICATION. D'où peut venir à cette Goutte d'eau, la figure fphérique qu'elle prend; fi ce n'eft de l'Attraction Spéciale de fes Parties intégrantes entre elles: attraction qui la fouftrait à la Loi généra'e de l'Hydroftatique, en vertu de laquelle les Liquides fe mettent toujours & par-tout de niveau dans leurs furfaces fupérieures.

La preffion de l'Air ou de la Matiere fubtile, ne peut influer en rien dans ce phénomene: puifque ces Fluides agiffent néceffairement avec des forces égales en tout fens ; & que les preffions latérales m d & n b, étant détruites par les preffions verticales ca ; les élémens de cette goutte d'eau, restent réduits à leur fimple action particuliere : action en vertu de laquelle les élémens d b c devroient fe précipiter vers rs, & prendre tous une furface de niveau; s'ils n'avoient aucune autre action, que leur tendance générale vers le centre de la Terre.

Or, ils ont une Tendance particuliere vers le centre de la Goutte qu'ils forment : donc cette tendance particuliere vers ce centre x, doit avoir pour cause une Attraction fpéciale entre ces élémens.

De la même Caufe, de la même Attraction fpéciale, naît la figure fphérique des gouttes de pluie & de rofée; l'action & la figure de deux gouttes d'eau contigues, qui fe transforment en une feule goutte un peu moins fphérique.

98. REMARQUE I. Les petites Portions de mercure, prennent une forme plus parfaitement fphérique encore, que les gouttes d'eau : foit parce que le Mer cure étant environ quatorze fois plus dense que

f'eau, il a beaucoup plus de force attractive, à raifon de la plus grande contiguité de fes élémens; foit parce que le mercure ayant moins d'affinité que l'eau avec les corps fur lefquels il repofe; l'Action attractive eft moins détruite dans le mercure que dans l'eau, par l'attraction oppofée des fubftances qui le foutiennent.

99. REMARQUE II. Un Pied cube d'eau, que l'on verfe doucement & goutte à goutte fur un Plan horifontal de marbre ou de cuivre, ne prend pas & ne doit pas prendre, comme la goutte d'eau ifolée, une figure fphérique; & voici la raifon de cette différence. (Fig. 5).

1o. Chaque élément a b c d d'une goutte d'eau, a une double Attraction; l'une, de tendance ou de gravitation vers le centre de la Terre; l'autre, de tendance vers les élémens contigus ou voifins.

En vertu de la premiere Attraction, fruit de la Loi générale; tous les élémens de cette goutte d'eau tendent à fe mettre à égale distance r s du centre de la Terre.

En vertu de la feconde Attraction, fruit de la Loi Spéciale; ces mêmes élémens tendent à fe mettre les uns auprès des autres à égale diftance d'un centre commun x, pris dans cette goutte d'eau.

La premiere Attraction lutte donc contre la feconde, & tend à la détruire. Mais comme la premiere, toujours proportionnelle aux maffes, est trèspeu confidérable dans une fort petite goutte d'eau : elle fe trouve affez foible pour être vaincue en trèsgrande partie par la feconde, qui eft dans toute fa force, à raifon de la très-grande proximité de toutes les parties.

Cette feconde Attraction, qui doit produire la fphéricité dans une goutte d'eau, obtient donc plus

ou moins parfaitement fon effet ; & la goutte d'eau eft plus ou moins parfaitement fphérique.

II. Si on fuppofe maintenant en m & en n deux nouvelles gouttes d'eau: ces deux gouttes, par leur propre attraction, attireront l'une l'élément d' vers m l'autre l'élément b vers n.

La tendance des élémens d & b vers le centre de Ja goutte a bed, fera donc partagée & diminuée ; & les élémens c, en vertu de leur gravitation qui n'a plus le même obftacle à vaincre, fe précipiteront vers la furface inférieure m n.

Ainfi un grand volume d'eau, ne doit pas prendre une furface fphérique : parce que dans un grand volume d'eau, la gravitation commune, proportionnelle à la maffe, détruit par-tout victorieusement l'Attraction Spéciale des diverfes gouttes entre elles.

Comme les gouttes éloignées m & n ne peuvent pas avoir une contiguité immédiate entre elles, & que l'Attraction Spéciale dépend de la contiguité ou du moins de la très-grande proximité: la Force attractive des gouttes d'eau entre elles, ne croît point & ne doit pas croître proportionnellement à la masse d'eau qui en réfulte. Dans une grande maffe d'eau, la Gravitation générale, qui lutte contre l'Attraction particuliere, doit donc en détruire sensiblement tout l'effet, par fon excès de force,

La même chofe a lieu dans un grand volume de Mercure & de tout autre Liquide, & pour les mêmes raifons,

100. REMARQUE III. Cette Attraction spéciale eft croportionnelle aux maffes attractives, en tant que dontigues : la raifon en eft, que cette force attractive dépend de la contiguité.

Ainfi le morceau de fapin de la premiere expérience précédente, fera attiré par une force comme 1,

« AnteriorContinuar »