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Donc, par un Jugement d'analogie, toutes les autres fubftances matérielles qui leur reffemblent, n'ont également par elles-mêmes, aucun principe intrinfeque d'action & de mouvement. Or, quelles fubftances matérielles ne leur reffemblent pas; furtout dans l'hypothefe aujourdhui affez généralement reçue, d'une Matiere homogene dans fa nature, & différenciée par la feule diverfité de fes maffes & de fes configurations, dans toutes les efpeces de Corps? (143).

II. La Raifon démontre à fon tour l'inertie de la Matiere. Car quelques efforts qu'aient faits jufqu'à préfent les Athées & les Matérialistes, pour attribuer à la Matiere une action intrinfeque, capable de les difpenfer de l'influence d'un Dieu auteur & moteur de la Nature: ils n'ont jamais pu enfanter que des fyftêmes abfurdes, qui heurtent toutes les idées & toutes les notions que nous avons de la Matiere.

Quelque idée que l'on fe forme de la Matiere: on la conçoit toujours néceffairement comme une fubtance aveugle & paffive; comme une fubftance indifférente à l'action & au défaut d'action, au mouvement & au défaut de mouvement; comme une fubftance capable de recevoir toutes les modifications poffibles de mouvement & de configuration, mais incapable d'en prendre & de s'en donner aucune par elle-même.

Donc, fi l'on doit juger des chofes par les idées qu'on a des chofes, c'eft-à-dire, par le Principe fondamental de toutes nos connoiffances: il eft clair que la Matiere n'a point effentiellement l'action & le mouvement par fa nature; puifqu'on la conçoit & qu'elle exifte fans action & fans mouvement: il est clair que la Matiere n'a point accidentellement le mouvement & l'action, par fon exigence intrinfeque & de for

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propre fonds: fans quoi il pourroit & il devroit arriver qu'un bloc de marbre ou de chêne fe remuât de lui-même, quand il eft en repos; ou s'arrêtât de luimême, quand il eft en mouvement: ce qu'il feroit évidemment abfurde d'affirmer ou de penfer.

III°. Nous avions déjà obfervé & démontré dans notre Métaphyfique, en confultant & l'expérience & la raifon, que la Matiere eft effentiellement incapable & de Penfée & de Sentiment: que la Matiere en repos ou en mouvement eft abfolument incapable de produire par elle-même & comme caufe efficiente, le mouvement & l'action dans une autre matiere. (Met. 1042 & 1222).

Nous venons d'obferver & de démontrer ici que la Matiere n'a point le mouvement en elle-même paf fon effence, & qu'elle ne peut prendre & fe donner accidentellement le mouvement par elle-même ou par une vertu intrinfeque qui lui foit propre.

D'où il réfulte que la Matiere n'a & ne peut avoir par elle-même, aucune Action quelconque : que la Matiere eft à tous égards une fubftance paffive, une fubftance capable de recevoir & incapable de fe donner l'action & le mouvement; une fubftance dont une Inertie intrinfeque & radicale eft en tout & partout l'apanage naturel. C. Q. F. D.

76. ASSERTION II. Le mouvement & l'action qui animent la Nature vifible, fur la Terre & dans les Cieux, ont néceffairement pour Caufe efficiente, l'action permanante de l'Etre incréé & créateur

DÉMONSTRATION. Il est évident qu'il y a dans la Nature vifible, une fomme immenfe & permanante de Mouvement: mais quelle en eft la fource & la cause?

I. Il eft certain que le mouvement qui renouwellę fans ceffę la face de la Terre, qui vivifie &

perpétue la Nature vifible autour de nous, dans le Regne animal, dans le Regne végétal, dans le Regne minéral, n'a pour caufe efficiente, ni la matiere qui conftitue notre Globe, ni aucune autre matiere femblable ou diffemblable: puifque, felon l'Affertion précédente, la Matiere n'a par elle-même & de fon propre fonds, qu'une inertie abfolue & univerfelle qu'une incapacité radicale & entiere de fe mouvoir ou de mouvoir une autre matiere. Donc le mouvement qui anime notre Globe terreftre, n'a & ne peut avoir évidemment pour principe, pour caufe efficiente, que l'action permanante du Créateur.

Car quelle autre caufe, qu'une Cause infinie & en intelligence & en puiffance, pourroit & connoître & produire à chaque inftant, dans le Globe que nous habitons, fans excès & fans défaut, le degré précis & la qualité convenable d'action, qu'exige perfévéramment la Nature matérielle, dans toutes fes parties par exemple, le degré précis d'action, qui convient à une Puiffance mécanique, dont la force variable croît & décroît toujours comme fes leviers qu'elle ne mefure pas : le degré précis d'action, qui convient à chaque Corps terreftre, dont la force gravitante devient plus grande en allant de l'équateur vers les poles, devient plus petite en allant des poles vers l'équateur, augmente en s'approchant & diminue en s'éloignant du centre de la Terre, toujours en raifon inverfe des quarrés de fa diftance actuelle au centre de la Terre; quarrés qu'elle ne connoît pas : le degré précis & la qualité convenable d'action, d'où doit réfulter le jufte équilibre des Eléments, le conflit harmonique des Solides & des Fluides, le développement des Germes, la formation & l'accroiffement de tout ce qui vit & végete, l'éternel renouvellement de la Nature vifible: myfteres in

concevables, auxquels les génies les plus profonds & les plus pénétrans ne comprenent rien?

II°. Il eff certain que la Lune, en fe mouvant autour de la Terre, que les Planetes & les Cometes en se mouvant autour du Soleil, ont chacune féparément, fur tous les points de leurs Courbes elliptiques, un Mouvement projectile, toujours en raifon inverfe de leur diftance au centre de leur mouvement; un Mouvement centripete, toujours en raison inverfe des quarrés de leur distance au même centre de leur mouvement; un Mouvement centrifuge, toujours en raifon inverfe des cubes de leur diftance au même centre de leur mouvement: comme nous l'expliquerons & le démontrerons dans la théorie des Loix de Kepler. (1273 & 1298).

Or, quelle autre Puiffance, que la puiffance infinie de l'Etre incréé & créateur, peut produire & varier à chaque inftant, felon des Loix fixes & invariables, cette immenfe fomme de mouvement, dans les Planetes & dans les Cometes? Quelle autre Intelligence, que l'intelligence infinie de l'Etre incréé & créateur, peut perfévéramment & toujours indéfectiblement connoître & déterminer la quantité précife d'accroiffement & de diminution, que doivent prendre à chaque inftant, ces Mouvemens toujours croiffans ou décroiffans felon différentes Loix, pour conduire & pour retenir chaque Globe errant, dans la route qui lui fut tracée, & dont il ne s'écarte précifément qu'autant que l'exigent les invariables Loix auxquelles il eft foumis? (1307).

Il eft donc certain, il eft donc évident, que le mouvement & l'action qui animent la Nature visible, & fur la Terre & dans le Ciel, n'ont & ne peuvent avoir pour Caufe efficiente, que l'action permanante de l'Etre incréé & créateur. C. Q. F.D.

PARAGRAPHE

SECOND.

CAUSES PHYSIQUES, ET LOIX D'OU DÉPEND
L'ACTION DE LA MATIERE.

77. OBSERVATION. AVEUGLE & inerte

VEUGLE & inerte par fa nature & de fon propre fonds, la Matiere eft foumise à certaines Loix générales & invariables, d'où résulte dans elle une Action réguliere & permanante, infiniment digne & de l'étude & de l'admiration du Philofophe.

Ces Loix générales font pour la Matiere, de vraies Caufes phyfiques: puifqu'elles y donnent lieu à l'exiftence d'une infinité d'effets différens, qui font tout auffi réels & tout auffi phyfiques en eux-mêmes, que s'ils avoient pour caufe efficiente, la Matiere ellemême.

Parmi les différentes Caufes phyfiques, dont il nous eft donné de faifir, d'observer l'influence & l'action :

I°. On nomme Cause particuliere, une action isolée. Tel eft le choc d'une boule, contre une autre boule ou contre un corps quelconque : tel eft l'effort d'un homme qui leve un fardeau.

II°. On nomme Causes générales, une action commune, qui convient ou peut convenir à tous les Corps, & d'où naiffent plufieurs efpeces d'effets. Telle eft l'Impulfion en général, qui occafionne une infinité d'effets de différente efpece, & qui n'eft étrangere à aucune espece de corps. Telle eft l'Attraction en général : elle affecte tous les corps, & produit une foule de phénomenes dans la Nature. Telle eft encore l'Affinité: il n'y a aucun corps qui n'ait une attraction fpéciale à l'égard de quelque efpece de corps.

III. On nomme Caufe primitive, un effet général qu'on obferve conftamment dans la Nature, & auquel

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