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RELATION

D'UN VOYAGE

D'ESPAGNE A BENDER.

E grand nom, & les furprenantes aventures du Roi

de Suede me toucherent fi vivement, lorsque j'étois en Espagne Capitaine d'une Compagnie de Dragons, qu'en ayant fait la démiffion avec l'a

grément de Sa Majesté Catholique, j'en fortis le premier Decembre 1711. pour aller à Bender. Après avoir effuyé de fâcheufes tempêtes fur mer, j'arrivai l'avant veilTe de la Pentecôte à Conftantinople dans la plus agreable faifon de l'année. J'allai d'abord rendre mes refpects à M. le Comte des Alleurs notre Ambaffadeur, qui me donna mille marques d'amitié, & me fit l'hon-. neur de me donner un

apartement fous fa chambre, d'où je découvrois le Serrail du Grand-Seigneur, dont la fituation & la beauté des lieux circonvoisins me char moient.

Il s'informa d'abord de la fanté du Roi, & rien ne me ferra plus le cœur,que les larmes qu'il répandit fur la perte irreparable que nous venions de fai re, Comme j'étois forti d'Espagne, & qu'étant débarqué à Galata, je montai, fans perdre tems

à Pera, au Palais de Fran ce; il me demanda auffi comment fe portoient le Roi, la Reine, le Prince des Afturies, & en quel état étoient les affaires; je lui en fis un détail affez exact.

Il me préfenta enfuite à M. le General Poniatoski, & le lendemain Faber de Bizi l'aîné, homme de merite, me conduifit de fa part au

Miniftre de Suede à la

porte. Que venez – vous

faire en ce païsci, me

dit-il? Je viens, lui répondis-je, pour avoir F'honneur de voir le brave Lion du Nord: c'eft ce fameux Conquerant, dont la réputation fait tant de bruit dans le monde, qui m'y attire. Je reftai quelques jours à Conftantinople, pour voir cette grande Ville fi fameufe entre toutes les nations. Sa belle & avan tageufe fituation, qui fe présente dans un bois comme en forme d'am phitheatre, me ravit d'a

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