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d'autres il y a des ondes & des traces du pinceau; il s'en trouve auffi de plus brillans les uns que les autres: cela vient de l'induftrie avec laquelle ils les poliffent, & dont ils le fervent pour les ouvrages de prix, comme coffres, écritoires, boëtes, & femblables, mais ils négligent de donner ce poli aux tables, armoires, & autres meubles de cette nature, & encore moins aux plat-fonds & planchers, fe contentant de peindre ces fortes de chofes de couleurs mêlées avec le Vernis, ce qui fait un fort beau coup d'œil, fur-tout quand ils font enrichis de feuillages d'or & d'argent.

Tout cela arrive auffi aux ouvrages faits en Europe, à l'imitation de ceux-là; & nous voyons que les uns fe contentent d'avoir le Vernis tel qu'il fe trouve fur l'ouvrage au fortir du pinceau, d'autres ne l'eftiment que quand il est uni & brillant comme un

miroir; c'eft pourquoi il le faut rendre tel par induftrie.

On dit qu'au Japon, le Vernis fe polit avec la poudre de craye cuite & la pierre à éguifer; mais en Europe, on fe fert de chofes équivalentes & meilleures, & on fuit la méthode que je vais décrire; de façon que ceux-même qui n'ont aucune expérience de ces fortes de chofes, puiffent y réuffir. J'avertis en premier lieu, que les Vernis compofés de gommes diffoutes dans l'efprit de vin, & les Vernis oléagineux fur le bois ou fur le métal, se poliffent de la même manière.

Lors donc que l'ouvrage eft bien fec, on prend de la pierreponce pulvérisée fubtilement ; quelques-uns la font rougir & l'éteignent dans le vinaigre mais cela n'eft pas néceffaire: on en fait une pâte avec de l'eau, & avec une peau de chamois ou un linge, on frotte le Vernis, juf

ques à ce qu'il foit bien uni, prenant cependant bien garde de ne point aller affez rudement pour emporter le Vernis & découvrir le fond; c'eft pour cela qu'il doit y avoir plufieurs couches de Vernis, & même jufqu'à vingt, fi c'eft quelque gomme diffoute dans l'efprit de vin, mais les Vernis oléagineux ayant plus de corps, il n'eft pas befoin de tant de couches. Il y a une autre manière de polir & de rendre parfaitement unie toute forte de furface, qui eft de se servir en la place de pierre-ponce, de cristal pulvérifé mêlé avec de l'eau.

La furface étant bien unie, on pourra y faire les ouvrages en or, fi ce n'eft point un Vernis huileux, parce qu'on peut enfuite recouvrir l'or fans le gâter avec le même Vernis; mais s'il eft huileux (excepté pourtant celui fait avec l'ambre) on ne doit faire ces fortes d'ouvrages, que quand

le Vernis a recouvré fon luftre, & qu'il est tout-à-fait poli. Ayant donc bien uni la surface avec la pierre-ponce, on trouvera d'abord tout le luftre perdu, & le Vernis fera devenu comme de l'ébene: les Chinois laiffent beaucoup d'ouvrages de cette couleur, & c'eft là-deffus qu'ils font leurs ouvrages d'or & d'argent; mais voulant donner touta-fait le brillant, il faut prendre de la poudre de Tripoli, avec laquelle on polit les glaces; & avec cette poudre, & un linge trempé dans l'huile d'olive, frotter l'ouvrage long-temps, & on le verra redevenir plus brillant peu-à-peu, mais non pas entièrement, Après l'avoir bien poli de cette manière, on ôte tout-à-fait ce qui refte de gras, avec la fleur de farine l'ouvrage étant achevé de polir, on le doit frotter pendant quelque temps avec un morceau de linge, & il aura un très

beau luftre. On peut auffi, au lieu de tripoli, fe fervir (1) de potée d'émeril, qui eft l'émeril broyé en poudre impalpable, & incorporé avec l'huile.

que

Si l'on n'y veut pas tant de façons, & l'on fe contente du brillant que le Vernis a par luimême, on pourra, après avoir bien uni sa surface, la couvrir légèrement du même Vernis avec un pinceau fort doux & à grands coups, comme on dit qu'ils faifoient au Japon, fe fervant, lorfqu'ils donnent la dernière couche, d'un pinceau fait avec des cheveux d'enfant : lorfque cette dernière couche fera sèche, il la faudra frotter légèrement avec un linge, parce qu'elle acquiert toujours plus de brillant, fur-tout

(1) C'eft une pâte que les Lapidaires ramaffent autour de leur meule, qu'ils lavent, & qu'ils réduifent en boules à peu près comme des favonnettes: on s'en fert pour polir les ouvrages d'acier.

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