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AVERTISSEMENT.

ES

Es Ouvrages de Plutarque font univerfellement connus & recherchés. Si fes Vies des grands-hommes l'égalent aux plus célebres Hiftoriens de la Grece & de Rome, fes Traités de morale lui affurent un rang diftingué, parmi les Philofophes les plus eftimables de l'antiquité. Un efprit élevé, un jugement fain, une connoiffance profonde du cœur humain, une étude refléchie des devoirs de l'homme, une érudition riche & variée, une morale auffi exacte que les ténebres du Paganifme pouvoient le permettre & fouvent plus pure que celle de la plupart de nos Moraliftes modernes : telles font les qualités qui font admirer Plutarque, comme un des plus fenfés & des plus judicieux Ecrivains de fon temps. Il s'étoit inftruic à fond des différentes fectes qui

partageoient alors les Ecoles des Philofophes, & il en difcute les opinions avec une fagacité peu commune. Toutes les fciences lui étoient familieres, & fans jamais tomber dans une affectation déplacée, il fait dans l'occafion les employer avec goût, pour répandre de l'intérêt & de la variété dans les fujets qu'il traite. Aucune partie de la morale ne lui étoit étrangere; &, quoique nous ayons perdu la plupart de fes Ouvrages, il nous en refte encore affez, pour juger qu'il avoit parcouru toute l'étendue de la Doctrine Philofophique, & qu'il s'étoit exercé fur les différens objets qu'elle embraffe, avec un fuccès égal. On reconnoît dans tous fes écrits, un efprit folide & jufte, qui fait difcerner le vrai, au milieu des erreurs & des préjugés dont la fauffe science & la vanité l'avoient obfcurci: un cœur ami de la vertu qui, plein de refpect pour elle,

s'applique à la faire connoître, la peint fous les traits les plus aimables, & s'efforce de la rendre fupérieure aux affauts que les paf

fions humaines lui livrent, pour la fubjuguer ou la féduire. Partout enfin, c'eft un Philofophe eftimable, qui ne combat que pour la fageffe, dont la Doctrine porte la lumiere dans les efprits, & qui, par des leçons données avec cette candeur & cette bonne foi qui perfuadent, infpire l'horreur du vice, & fait aimer la vertu.

Lorfque la chûte de l'Empire des Grecs en Orient ramena dans l'Europe le goût des fciences & des lettres, & nous apporta les richeffes de l'ancienne Grece, fi long-temps ignorées parmi nous, Plutarque fut un des Ecrivains que les Savans s'emprefferent le plus de faire connoître. Ils en firent des traductions latines, & y joignirent des commentaires qui le rendirent acceffible au grand nombre des

Lecteurs, à qui la langue de l'ancienne Rome étoit très-familiere.

Peu de temps après, Amyot le mit à la portée de tout le monde par une traduction françoise qui fut accueillie avec un empreffement général. Rien ne prouve mieux le mérite de l'Auteur original, & celui de fon Traducteur, que la multitude d'éditions qu'on en fit, dans un affez court espace. Cette traduction a acquis à Amyot une réputation qui s'eft confervée jufqu'à nous : & en effet, elle a dans fon vieux ftile, une grace, une énergie, & une naïveté, qui la feront toujours eftimer & rechercher des connoiffeurs. Mais en rendant juftice à fes qualités, en avouant qu'Amyot a peut-être plus fait que fon fiecle & les fecours qu'il avoit alors, ne fembloient le permettre, on ne peut fe diffimuler qu'il a des défauts confidérables. Sans parler des inéxactitudes qui s'y trouvent fréquemment, & qui tiennent plus

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