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tient lieu d'appåt. Ceux dont ils se servent pour prendre les requins sont très-grands, car leur longueur est en général de six ou huit pouces ; leur force et leur beauté ont de quoi surprendre, quand on songe à la matière dont on les tire ; et en effet, nous avons reconnu, en les essayant, qu'ils sont fort supérieurs aux nôtres.

<< Leurs lignes de pêche, les cordes avec lesquelles ils font des filets et d'autres ouvrages, ont différens degrés de finesse ; ils les tirent de l'écorce du touta, ou de l'arbre à étoffe, qu'ils tordent d'une manière égale dans tous les points, ainsi que nous tordons nos fils, et ils peuvent ainsi les rendre aussi longues qu'il leur plaît. Ils ont une espèce de petite corde plus fine encore, qu'ils tirent de l'écorce d'un petit arbrisseau appelé ariemah : ils font les plus belles avec des cheveux; mais ils ne se servent de ces dernières que dans les choses d'ornement. Ils fabriquent en outre, avec l'enveloppe fibreuse du coco, des cordages plus gros, qu'ils emploient sur leurs pirogues. Nous achetâmes quelques-uns de ceux-ci pour notre usage, et nous les trouvâmes très bons pour de petites manœuvres courantes. Ils fabriquent de plus une autre espèce de cordage qui est plat et extrêmement fort ils l'emploient surtout à attacher la toiture de leurs maisons et ce qu'ils veulent serrer solidement. Cette dernière n'est pas cordonnée comme les premières espèces : ce sont les parties

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fibreuses de l'enveloppe du coco, tressées avec les doigts, selon la méthode que suivent nos matelots pour travailler les pointes des garcettes de ris.

<< Ils emploient à plusieurs usages leurs gourdes qui sont d'une grandeur si prodigieuse, que quelques-unes contiennent de quarante à cinquante pintes; afin de les rendre plus propres à ce qu'ils en veulent faire, ils leur donnent différentes formes en les enveloppant de bandages, tandis qu'elles sont encore sur pied. Ainsi ils leur donnent la forme oblongue et cylindrique, parce qu'alors elles renferment plus aisément leur équipage de pêche; d'autres ont la forme d'un plat celles-ci contiennent leur sel, leurs provisions salées, leurs pouddings, leurs végétaux, etc. Ces deux espèces ont de jolis couvercles qui ferment bien exactement et qui sont de la même matière ; d'autres ont précisément la forme d'une bouteille qui a un long cou ils y gardent leur eau. Au moyen d'un fer chaud, ils en modifient la surface, de façon qu'on les croirait peintes, et qu'ils semblent y avoir tracé des dessins élégans et agréables.

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<< Parmi les arts des habitans des îles Sandwich, il ne faut pas oublier celui de faire du sel : ce sel est très-bon, et nous nous en fournîmes abondamment durant notre relâche. Leurs salines sont des carrés, en général de six ou huit pieds de longueur et de largeur; elles sont creusées en terre sur une profondeur d'environ huit pouces, et revêtues d'ar

gile. On les établit sur une couche de pierre, près de la laisse de la mer haute; on y conduit l'eau salée par des petits fossés qui en sont remplis, et le soleil opère promptement l'évaporation. Le sel que nous achetâmes à Atouaï et à Onihéaou, lors de notre premier séjour, était brun et salé; mais celui que nous nous procurâmes ensuite à la baie de Karakakoua, était blanc, d'une excellente qualité, et très-abondant. Outre la portion que nous employâmes à la salaison du porc, nous en remplîmes toutes nos barriques, et la Résolution seule en embarqua seize barriques.

« Des piques, des dagues appelées pahouas, des massues et des frondes, forment leurs instrumens de guerre. Les piques sont d'un bois dur et solide qui ressemble beaucoup au bois d'acajou; il y en a de deux espèces. Les premières ont de six à huit pieds de longueur; elles sont bien polies, et leur épaisseur augmente peu à peu depuis l'extrémité jusqu'à environ un demi-pied de la flèche, qui se termine brusquement en pointe, et est garnie de cinq ou six rangs de barbes il n'est pas hors de vraisemblance qu'ils s'en servent quelquefois comme d'une javeline. Les secondes, qui en géné ral composaient l'armure des guerriers d'Oouaïhy et d'Atouaï, ont douze ou quinze pieds de longueur, et au lieu d'être barbelées, elles se terminent vers la pointe de la même manière leurs que dagues.

<< La dague ou le pahoua est d'un bois noir et lourd qui ressemble à l'ébène ; sa longueur est d'un à deux pieds; le manche est traversé d'un cordon par lequel les naturels la suspendent à leurs bras.

<< Les massues sont indifféremment de plusieurs sortes de bois; le travail en est grossier; il y en a de diverses formes et de diverses grosseurs.

« Les frondes n'ont rien de particulier, et si l'on ne plaçait pas la pierre sur un morceau de natte, au lieu de la placer sur un morceau de cuir, elles ne différeraient point du tout de nos frondes ordinaires.

<< Les naturels de ces îles sont divisés en trois classes. Les éris ou les chefs de chaque canton, forment la première : l'un d'eux est supérieur aux autres, et on l'appelle à Oouaïhy, éri tabou et érimoï : le premier de ces noms annonce son autorité absolue, et le second indique que tout le monde est obligé de se prosterner devant lui, ou, selon la signification de ce terme, de se coucher pour dormir en sa présence. La seconde classe est composée de ceux qui paraissent avoir des propriétés sans aucun pouvoir. Les teouteous ou les domestiques, qui n'ont ni rang ni propriété, forment la troi

sième.

« L'on ne peut établir un système sur la subordination de ces classes entre elles, sans s'écarter de la stricte véracité, qui, dans les ouvrages de cette nature, est plus satisfaisante que les conjectures les

plus ingénieuses. Je me contenterai donc de rapporter les faits dont nous avons été les témoins, et les détails auxquels je crois qu'on peut ajouter foi. Je laisserai ensuite au lecteur le soin de se former une idée de la nature du gouvernement des îles Sandwich.

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«La manière dont Terriobou ou l'éri - tabou d'Oouaïhy fut reçu à Karakakoua à son arrivée, nous annonça clairement qu'il était revêtu d'un grand pouvoir et d'une très-grande dignité. Nous vîmes tous les naturels se prosterner à l'entrée de leurs maisons deux jours auparavant, les pirogues avaient été tabouées, c'est-à-dire qu'on leur avait défendu de sortir; et cette défense subsista jusqu'au moment où elle fut levée par le prince. Il revenait de Mooui, dont il réclamait la possession en faveur de son fils Tiouarro, qui avait épousé la fille unique du dernier roi de cette île; et, par cette raison, il faisait la guerre à Tahi-terri, frère du monarque défunt. La plupart de ses guerriers l'avaient suivi dans cette expédition; mais nous ne pûmes savoir si leur service avait été volontaire, ou une condition de vassalité qui résulte du rang et des propriétés dont ils jouissent.

<< D'après ce que j'ai dit de Kaou dans le journal, à l'article du 2 et du 3 février, il est démontré qu'il lève des tributs sur les chefs inférieurs.

« J'ai déjà remarqué que Terriobou, qui donne des ordres à Oouaïhy, et Perrioranni, qui com

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