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Ce nouveau Général appellé Chémou-te eft Prince du Sang, & par conféquent de la famille des Princes accusez: il fçavoit que ces Princes étoient Chrétiens, & il faifoit femblant de l'ignorer mais quand ils lui eurent été déferez comme tels, il craignit de fe rendre lui même.coupable, s'il ne fe donnoit pas quelque mouvement fur une accufation fi publique.

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Il s'imagina que le moyen le plus court pour prévenir tout fujet de reproche, étoit de les faire renoncer à leur Religion: chofe à laquelle il ne voyoit nulle difficulté: il fe flatoit même, qu'il n'auroit qu'à parler pour être obéï; & que des gens qui depuis trois ans accablez de toutes fortes de maux, voyoient à peine tomber leurs chaînes, que leurs freres portoient enco

re,feroient ravis de trouver dans lui un Protecteur qui pût mettre fin à leur misere.

Mais graces en foient renduës au Seigneur, il fe trompa: n'ayant pû vaincre la réfiftance de ces fervens Chrétiens, il affembla fon Confeil de guerre, en condamna deux à être décapitez, & les autres à être emprifonnez. Il envoya enfuite un Mémorial à l'Empereur, par lequel il le fupplioit de ratifier la Sentence. Ce Mémorial arriva à Peking le 8 de Janvier de cette année.

Pour vous inftruire en détail des demandes & des réponses qui furent faites dans l'Interrogatoire, je ne puis mieux faire que de traduire la relation qu'en fit le Prince Jean Sou, & qu'il nous envoya. La fimplicité qui y regne porte un caractere de

vérité, qui ne laiffe pas le moindre doute. Ce Prince, par efprit d'humilité, parle de luimême en troifiéme perfonne. Voici fes paroles.

Il faut vous informer d'une » affaire qui vient d'arriver. Il n'y "a perfonne ici qui ignore que » les Mandarins d'aujourd'hui » couvrent la recherche qu'ils » font des Chrétiens, du spécieux »prétexte de connoître le nom»bre de nos Domestiques ; com» me fi leurs prédéceffeurs, par » égard pour nous, avoient gar» dé le filence fur cet article.

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Le 15, jour de la onzième » Lune de la quatrième année de Yong-Tching (c'est le 18 Dé"cembre 1726) des Députez en grand nombre, envoyez de » tous les Niurou, * vinrent nous

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Compagnie ou Régiment qui compofent les Bannieres. Il y en a de 100 jufqu'à 300 hommes.

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déclarer de la part du Général, « qu'il falloit changer de Loi.« Nous répondîmes que la Loi « Chrétienne que nous profeffions, étoit la feule véritable,« qu'elle ne pouvoit être ni« changée, ni réformée, & qu'ab. « folument nous ne pouvions pas « y renoncer.

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Comme ils s'apperçûrent c6 qu'ils ne gagneroient rien, foit « par leurs promeffes, foit par « leurs menaces, l'un d'eux nous c tira à part. Pourquoi, nous dit- « il, êtes-vous fi opiniâtres & « fi infléxibles? Qui vous empê-« che de penfer dans l'ame tout « ce que vous voudrez? Dites «< feulement de bouche que vous << renoncez: cela nous fuffit.

Cela même, répondîmes-« nous, nous ne le pouvons pas.<<< Le moindre menfonge eft op- «s pofé à la Loi de Dieu com- «

»ment permettroit-il une fi hon » teufe diffimulation?

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Le feptiéme fils du Prince » Sourniama, appellé Pierre Lo, » étoit préfent, de même que fon fils aîné Paul. Ils n'avoient reçû », le Baptême que depuis peu de » tems, & n'étoient pas encore affez bien inftruits des obliga,, tions du Chriftianifme. Le pre»mier faifant attention à ce que difoit l'Officier, crut pouvoir ,, fuivre l'avis qu'il propofoit, & il dit: je renonce. Et vous, dit l'Officier, s'adreffant à Paul, n'imitez-vous pas votre pere ? Paul fortit fans répondre; & l'on écrivit fur un Registre les ,, noms de ceux qui avoient con» feffé Jesus-Christ.

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Ce premier interrogatoire fini, on nous ordonna de nous rendre chez le Cousaita * afin,

* Tribun ou Colonel.

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