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avoir la tête tranchée, & les autres à être chargez de chaînes & emprisonnez, ce qui eft contraire aux Loix de la Chine, qui ne condamnent qu'à l'exil ceux qui profeffent une fauffe Loy : mais cela même fait voir que le Général étoit bien inftruit des intentions de la Cour.

L'Empereur renvoya cette accufation à l'Affemblée des Princes du Sang & à tous les Grands des neuf Tribunaux comme une affaire d'une trèsgrande importance, afin de l'examiner, & de lui en faire leur rapport. Il eft certain que dès ce tems-là, l'Empereur prit la résolution d'obliger ces Princes à renoncer à leur religion. Les divers expédiens, & les différens biais qu'il employa pour y réüffir, font affez voir que les raifons qu'il allégua

dans la fuite pour les condamner, étoient de purs prétextes, qui n'ont trompé que ceux qui ont bien voulu être trompez.

La délibération fut différée ; & la réponse ne vint qu'un peu tard; car les affaires s'expédient ici dans l'ordre qu'elles arrivent: & plufieurs autres plus anciennes devoient précéder celle-ci. Pendant ce tems-là, il arriva à Peking un Courier avec un mémorial du Général d'armes de Mougden, ou autrement Chin-yang capitale de la Province du Leao-tong, autrefois la Cour des Tartares Mantcheoux. Ce Général représentoit à l'Empereur, que les foldats de fa garnison n'avoient ni maifon dans la ville, ni cafernes au dehors, & qu'étant obligez de demeurer dans des villages aux environs, ils étoient trop éloi

gnez, & que le fervice en fouffroit.

L'Empereur n'ignoroit pas que ce nouveau Général fe plaignoit d'une coûtume auffi ancienne que l'établiffement des Mantcheoux, & qui étoit même fondée en raison. Cependant il éclata contre les anciens Commandans qui n'avoient pas donné cet avis. Les deux qui avoient précédé immédiatement celui-ci, font encore à Peking pleins de vie. L'un s'appelle Sunjou*, & l'autre Tangpao-tchou; en remontant plus haut, on trouvoit Sourniama qui étoit mort, & qui avoit en effet gouverné cette Province pendant dix ans avec un applaudiffement général. Aucun d'eux n'avoit averti que les Soldats

* Sonjon eft aujourd'hui un des quatre

Miniftres d'Etat.

manquaffent

manquaffent de logement; on ne s'en prit néanmoins qu'à Sourniama. L'ordre de l'Empereur portoit qu'on confifquât tous les biens de Sounou, & qu'ils fuffent employez à bâtir des logemens pour les foldats de Mougden; que les deux Commandans qui l'avoient suivi fçavoir Sunjou & Tampao- tchou fuffent chargez de l'exécution, & que s'ils ne trouvoient pas dans la confifcation l'argent qui étoit néceffaire, ils le fourniffent du leur.

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Ces deux Mandarins étoient trop intereffez dans cette affaire, pour ne pas agir avec la derniere rigueur. Ils fe firent accompagner des Mandarins de la Banniere rouge, qui eft celle de Sourniama, & ils allerent la nuit du 18 de la feconde Lune), c'eft-à-dire le 8 Fevrier appofer XIX. Rec. C

les Sceaux non-feulement dans l'Hôtel de Sourniama, mais encore dans tous les Hôtels des Princes fes enfans. Ces Princes avoient encore dans Peking des Intendans & des domestiques, qui prenoient foin de leurs Palais & de leurs biens. Plufieurs furent arrêtez, & n'eurent pas le loifir de rien mettre à couvert; un feul trouva le moyen de s'échapper, & d'emporter dans un pannier les vafes d'or dont le Regulo fe fervoit aux cérémonies pour les ancêtres défunts. Comme il fuyoit, il fut arrêté par ceux qui battent les veilles, & pour se retirer de leurs mains, il leur abandonna le pannier, dont ils profiterent.

Cette nuit fut une nuit de confufion, de defordre, & de pillage. Les Mandarins ne pou

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