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perpétuer la lignée de Clovis; & foit pour affurer GONTRAN. encore plus fortement la fucceffion à Childebert, foit pour prévenir les difficultés qui pouroient naître à cette occafion après fa mort entre fes neveux, il régla ces difficultés, par un traité qu'il fit en 587 avec Childebert à Andelot. Il y a deux lieux de ce nom, l'un en Champagne auprès de Langres, & l'autre en Alface, où ce traité peut avoir été paffé.

Gontran avoit eu un fils nommé Gondebaud, d'une concubine qu'il abandonna pour époufer Marcatrude, fille d'un Seigneur Transjurain apellé Magnacaire. Cette Reine fit empoifonner Gondebaud, dans la crainte qu'il n'enlevât la Couronne au fils qu'elle avoit eu de fon mariage. Mais elle perdit bientôt après ce fils fi cher, & elle mourut de douleur,d'avoir encouru la difgrace du Roi, qui la répudia lorsqu'il fut informé de fon crime. Il fe maria ensuite à Auftregilde qui avoit été Demoiselle de Marcatrude, & en eut deux fils, Clotaire & Clodomir qui décédérent en 577, & deux filles, Clodeberge morte avant l'an 584, & Clotilde qui vivoit encore en 587, & qu'on croit s'être confacrée à Dieu.

Ce Prince n'oublia rien pour maintenir la paix dans fes Etats, & l'entretenir entre fes freres & fes neveux. S'il prit quelque part à leurs querelles, ce ne fut ni par paffion, ni pour profiter de leurs dépouilles; mais feulement pour empêcher l'un d'accabler l'autre, & pour les accommoder, comme il fit toujours, lorfqu'il put les y déterminer. La protection qu'il accorda fucceffivement à fes deux neveux pupiles, marque bien que c'étoit là fon unique vûë. Auffi faifoit-il les délices de la France, & recevoit des aplaudiffemens extraordinaires dans les grandes Villes, quand il y paffoit. Sa qualité dominante, étoit la bonté du cœur; car il s'attendriffoit fur la mort de fes freres & de fes neveux, lors même qu'ils mouroient les armes à la main contre lui. Il puniffoit avec

GONTRAN. peine, & ne le faifoit qu'à l'extrémité. Il étoit familier avec les Seigneurs de fa Cour, libéral & affable envers tout le monde. Il aimoit la juftice, & avoit foin d'établir dans fes Etats, des Juges éclairés & équitables. Il eut pour Référendaires ou Chanceliers fucceffivement, Flavius & Licerius, qui furent Evêques à la fuite, l'un de Chalon & l'autre d'Arles; ce qui marque qu'il n'honoroit de fa confiance dans les affaires de Juftice, que des perfonnes diftinguées par leur fcience, leur probité & leurs bonnes mœurs. Il pardonna les injures qu'on lui fit, & ne fe vengea pas de Frédegonde, quoiqu'il pût le faire, & qu'il eût des preuves certaines qu'elle avoit tenté plufieurs fois de le. faire affaffiner..

Il étoit fi zélé pour la difcipline Eccléfiaftique, qu'afin de la rétablir dans fes Etats, il fit affembler à Mâcon, à Chalon, à Lyon, à Valence, à Autun & ailleurs, des Conciles dont il apuia les Decrets de toute fon autorité. Sa charité & fa libéralité envers les pauvres & les Eglifes, allérent jufques à la profufion. Il fonda l'Abbaïe de S. Marcel auprès de Chalon, & dota celles de S. Benigne de Dijon & de S. Symphorien d'Autun, déja fondées. L'on tient qu'il fit introduire à S. Marcel & à S. Benigne, la pfalmodie perpétuelle qui s'obfervoit à S. Maurice d'Agaune. Enfin il mourut après trente & un ans & quelques mois de regne, dans la foixante-huitième année de fon âge, le 28 Mars de l'an 593, & fut inhumé dans l'Eglife de S. Marcel auprès de Chalon...

Il avoit paffé douze ans en viduité après la mort d'Auftregilde,& l'on a lieu de croire qu'il avoit effacé par la pénitence les péchés de fa jeuneffe, & quelques fautes, que l'ignorance & la férocité de l'éducation de fon fiécle,lui avoient fait commettre, puifque l'Eglife l'a mis au nombre des Saints,& a défigné le 28 de Mars, pour honorer publiquement fa mémoire. Les Reliques de ce digne parent de S. Sigifmond &

petit-fils de Sainte Clotilde, furent tirées en 1435 GONTRAN,de leur ancien tombeau, par Jean Evêque de Chalon, fils de Nicolas Rolin Chancelier du Duc de Bourgogne, & natif de Poligni en Franche-Comté, qui les dépofa en une Chapelle qu'il avoit fait bâtir dans l'Abbaïe de S. Marcel.

CHILDEBERT I. en Bourgogne, & II. en France.

C

HILDE BERT, né à Pâques de l'an 571, & reconnu Roi d'Auftrafie à Noël de l'an 575, demeura fous la Régence de Brunehaut fa mere & des Grands du Royaume d'Auftrafie, pendant fa pupillarité. Il paffa en Italie à la follicitation de l'Empereur Maurice, & fubjugua les Lombards en 584. Mais comme Autaric leur Roi lui manqua de parole, il paffà de nouveau en Italie en 590 & ravagea la Lombardie.

Il fuccéda fans opofition au Royaume de Bourgo gne en 593, & perfiftant dans le deffein de vanger le meurtre de fon pere fur Frédegonde qu'il en croyoit coupable, il entra en Neuftrie fous prétexte de prendre la tutelle de Clotaire fon coufin. Frédegonde fit paroître en cette occafion, la force de fon efprit & la grandeur de fon courage. Elle fe mit avec le jeune Roi à la tête d'une armée qu'elle animoit par fes difcours, furprit & mit en déroute les troupes de Childebert, qui après cette défaite, perdit l'efpérance de fe faifir de Frédegonde, à laquelle il vit que les Grands de

Neuftrie étoient fidéles.

Il tourna fes armes contre les Bretons, & leur: donna une bataille dans laquelle il refta beaucoup de Soldats de part & d'autre. Il fut plus heureux contre les Varnes, qui habitoient dans fes Etats à la rive Septene trionale du Rhein, & qui s'étoient révoltés; car ili les défit & les foumit en 595.

CHILDE

BERT.

Childebert mourut au mois de Septembre ou d'Octobre de l'année suivante 596, dans fa vingt-fixiéme année, laissant deux fils; Theodebert qu'on croit né d'une concubine, quoiqu'il l'ait défigné Roi d'Auftrafie; & Thierri né d'un mariage légitime avec Faileube, auquel il donna le Royaume de Bourgogne, après y avoir ajouté l'Alface, le Suntgau ou Comté de Ferrette, le Duché d'Allemagne fitué dans l'Helvétie entre le Ruff & le Rhein, & une partie de la Champagne, qui avoient dépendu auparavant du Royaume d'Aultrafie. Il laiffa auffi de fon mariage avec Faileube une fille nommée Theudelane, qui eut le Gouvernement de la petite Bourgogne.

THE

THIERRI I. en Bourgogne.

HEODEBERT & THIERRI encore pupiles, furent mis fous la tutelle de Brunehaut leur ayeule, qui refta en Auftrafie auprès de Theodebert, & confia l'éducation de Thierri, à Siagre Evêque d'Autun, & à Varnacaire, qui porta le premier le titre de Maire du Palais en Bourgogne.

Cette dignité n'éleva d'abord celui qui en étoit revêtu, que fur les domeftiques du Roi; mais elle fit bientôt les mêmes progrès,qu'avoit fait celle de Préfet du Prétoire fous les Empereurs Romains; car le Maire du Palais devint la feconde perfonne du Royaume, le Lieutenant Général de l'Etat, fupérieur aux Comtes, aux Ducs & aux Patrices mêmes; & eut le droit de difpofer fous le nom & l'autorité du Roi, de tout ce qui concernoit la Guerre, la Justice & les Finances. Cette dignité étoit d'autant plus agréable aux Grands, que les Evêques & les Seigneurs élifoient les Maires du Palais, & le Roi les confirmoit feulement, en leur paffant le bras fur le col, pour marquer qu'il leur confioit fa puiffance.

Frédegonde mere de Clotaire, profita de la conf- THIERRI. ternation que la mort prématurée de Childebert & le bas âge de fes fils, avoit jettée dans fes Royaumes, pour s'emparer de Paris & de plufieurs autres Places; après quoi, elle fit avancer fes troupes dans la Bourgogne en un lieu nommé Latofao auprès de la Sône où elles défirent l'armée des deux jeunes Rois, & s'emparérent d'une partie de la Bourgogne. Cette Reine encore plus fameufe par les crimes qu'on lui imputa que par fes grandes qualités, mourut en paix & dans la profpérité en 597. Les Généraux de Thierri eurent leur revanche contre Clotaire, qu'ils défirent auprès de Sens en 599, & recouvrérent ce qu'il avoit ufurpé fur le Royaume de Bourgogne.

Cependant les Grands d'Auftrafie, accoutumés à partager la Régence pendant la minorité de Childebert, fuportoient impatiemment, que Brunehaut s'at tribuât toute l'autorité dans le Royaume. Elle avoit fait tuer Ventrion le plus puiffant d'entre eux; mais cette action violente la leur rendit fi odieufe, qu'ils fe foulevérent contre elle, & l'obligérent, du confentement du Roi, à fe retirer dans le Royaume de Bourgogne auprès de Thierri, fur l'efprit duquel elle prit un afcendant qui dura jufques à la mort de ce તે

Prince.

Peu de tems après, les Rois d'Auftrafie & de Bourgogne, firent la guerre à Clotaire Roi de Neuftrie, & remportérent fur lui une fi grande victoire à Dormeilles dans le Gatinois, qu'il fut contraint de cé der à Thierri ce qu'il poffédoit entre la Seine & la Loire jufqu'à l'Ocean, & à Theodebert le Païs qu'on apelloit le Duché de Dentelin fitué entre la Seine & l'Oife jufques à la Mer Océane.

Les Cantabres que nous connoiffons fous le nom de Gafcons, & qui habitoient alors au-delà des Pirenées dans la Navarre, excitérent l'indignation de Thierri, par les courfes qu'ils faifoient dans fes Etats..

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