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bre. Le Roi des Romains lui accorda une Capitulation tres-glorieufe, pour faire honneur à fon merite, à fa bonne conduite & à fa valeur.

La joïe de cette conquête fut un peu troublée par la marche des Troupes du Duc de Baviere, qui tenoit depuis plufieurs mois tout l'Empire en fufpens, & donnoit de la jaloufie & de l'inquietude à l'armée Imperiale. Les Cercles de Suabe & de Franconie avoient invité cet Electeur d'agir de concert, pour maintenir la paix dans l'Empire, & pour éloigner la guerre de leurs frontieres. Cependant ces Cercles changerent d'avis dans la fuite, quelques efforts que pût faire le Duc de Baviere pour les ramener à leurs premiers fentimens. 11 fe faifit par artifice de la ville d'Ulme, tres-commode pour couvrir fes Etats. Quarante Officiers choifis, déguifez en Payfans & en femmes, entrerent dans la Ville fans qu'on y prît garde. Ils fe faifirent de quelques foldats qui gardoient la porte. Auffi-tôt fix cens Dragons, & quelques autres foldats accoururent, & fe rendirent les maîtres de la Ville, après un leger combat.

Cette furprife étonna les villes Imperiales voifines, qui furent obligées d'envoyer des fourages & toutes fortes de provifions à Ulme. Le Cardinal de Lambert.

on fur

prend la ville d'Ulme par ftratage

me.

fit demander à l'Electeur de Baviere fi la Diete Imperiale pouvoit demeurer en fureté dans Ratifbonne. Il lui fit réponse, que fon deffein unique étoit de maintenir la paix, les privileges, & les libertez de tous les fujets de l'Empire; & que par confequent la Diete pouvoit continuer fes fonctions en toute fureté.

Le Duc de Baviere n'agiffant que par des motifs d'honneur, ne fuivoit pas dans fes operations militaires les mauvais exemples des Generaux Anglois & Hollandois, dont les troupes ne fongeoient qu'à piller & ravager tous les lieux où ils étoient les maîtres, exerçant toutes fortes de violen ces fur de pauvres habitans, des enfans, des feinmess, des vieillards, fans aucun égard ni pour l'âge, ni pour le fexe; violant les femmes & les filles, comme auroient pu faire des barbares, fans loi, fans** mœurs, & fans Religion. Après que les Officiers avoient pris le meilleur, les foldats emportoient le refte, jufqu'aux grilles, & aux verroux: ils fe fervoient des Eglifes, comme d'écuries ; & pour pouffer à l'excès leurs facrileges & leurs impiétez, ils traînerent par dérifion dans les ruës, une Image de la fainte Vierge, la corde

au cou.

Les Ennemis du Roi d'Efpagne ne fe contenterent pas de porter le fer & le feu

en proye

dans fes places de l'Europe, ils allerent Les Eta's jufqu'en Amerique, pour tâcher de fe ren- de Baviere dre les maîtres de Carthagene, & de la aux ImpeHavanne. Ils folliciterent Don Diegue de riaux. Cordoue, & Pimienta, Gouverneurs deces deux Places, de reconnoître l'Empereur, dont ils pouvoient attendre toutes fortes de bons traitemens, s'ils vouloient se rendre à l'amiable; mais que s'ils fe laiffoient forcer, on les traiteroit dans toutes les rigueurs de la guerre. Ces deux Gouverneurs répondirent comme des Officiers intrépides & fidéles, qu'on les connoiffoit mal, fi l'on fe flattoit de les gagner par des promeffes, ou de les épouventer par des menaces : qu'ils ne reconnoiffoient point d'autre Maître que Philippe V. leur légitime Souverain. Ces réponses fieres ôterent aux Ennemis toute efperance de reüffir dans leur entreprife; de forte qu'ils prirent le parti de retourner en Europe, fans avoir rien executé.

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Les frequentes hoftilitez que les Anglois &'es Hollandois exerçoient dans les Ports & les Villes maritimes d'Efpagne, oblige-rent le Roi de faire un Edit, publié au fon des tambours & des trompettes, par lequel il étoit ordonné à tous les fujets de l'Empereur, & de l'Empire, d'Angleterre, & de Hollande, de fortir inceffamment de toute l'étendue du Royaume de Naples.

1702.

Ceux qui y demeureroient, ou qui y rentreroient après cette Declaration, étoient confiderez comme rebelles, & foûnnis à la confifcation de tous leurs biens, à l'emprifonnement, & d'autres peines encore plus griéves en cas de récidive,

Il y avoit long-tems que les Flottes Ar gloife & Hollandoife fe tenoient alerte, pour furprendre les Vaiffeaux de la Nouvelle Efpagne, chargez de Marchandises tres-precieufes & de Lingots. Le Comte de Château Renaud qui efcortoit cette Flotte, la conduifit heureufement dans le port de Vigo. Sans perdre de tems, il fit venir un grand nombre de charettes, pour tranfporter promptement tout l'or & les marchandifes les plus precieufes qui é. toient fur les Vaiffeaux. L'armée Ennemie fur la fin du débarquement arriva & aprés plufieurs efforts redoublez, franchit une Eft cade que l'on avoit mife à l'entrée du Port, pour empêcher le paffage aux Ennemis. Le Comte de Château-Renaud voyant qu'il étoit impoffible de fauver les Vaiffeaux des deux Couronnes, y fit mettre le feu. Les Enremis n'en purent prendre qu'un petit nombre, dans lesquels il y avoit du Tabac, & des Marchandifes peu de valeur.

de

Quoi que la perte des Vaiffeaux fût affez confiderable, on en fut en quelque

maniere confolé par la victoire que gagna le Marquis de Villars fur l'armée de l'Empereur le quatorziéme jour d'Octobre, commandée par le Prince Louis de Bade. Ce General manquant de vivres, voulut décamper. Le Marquis de Villars failit cette occafion, pour l'attaquer & le combattre, ayant fait mettre fa Cavalerie en bataille vis-à-vis de celle de l'Empereur, dans une Plaine auprès de Fridlingue. Les François effuyerent tout le feu des Ennemis fans tirer. Alors mettant l'épée à la main, ils chargerent & mirent en defordre les Ennemis, qui ne fe rallierent plus pour faire une feconde tentative, & revenir à la charge. On les pouffa une lieuë audelà du champ de bataille, après leur avoir tué trois ou quatre mille hommes. On leur prit dix piéces de canon, trois paires de tymbales, avec trente-fept drapeaux. Le lendemain de la bataille on prit le fort de Fridlingue, dans lequel il y avoit un grand amas de provifions, & quatre cent foldats, aufquels on permit de fortir defarmez. Les Officiers, la bonne conduite & la valeur du Marquis de Villars, l'ont élevé avec juftice, aux fuprêmes honneurs de la Guerre.

L'Empereur chagrin de la perte de cette Baraille, & de la ruine de fon armée, écrivit au Duc de Baviere, pour lui demander

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