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PE.

RELIGIEUX jeunent pas, on leur donne pour leur fouper le refte de leur DE LATRA- cidre, une portion de racines, & du pain avec quelque pomme ou poire au deffert; mais pour lors à leur dîner on ne leur prefente qu'une portion de legumes avec leur potage. Quand ils ne font que la collation, un quart d'heure leur fuffit, il leur refte encore une demi-heure pour se retirer, aprés laquelle ils fe rendent dans le Chapitre, où l'on fait la lecture de quelque livre fpirituel jufqu'à fix heures que l'on dit Complies: aprés lefquelles on fait une méditation de demi-heure au fortir de l'Eglife on rentre au Dortoir aprés avoir reçu l'eau benite des mains de l'Abbé. A fept heures on fonne la retraite afin que chacun fe couche, ce qu'ils font tout vêtus fur des ais, où il y a une paillaffe piquée, un oreiller rempli de paille & une couverture, jamais ils ne se deshabillent,non pas même quand ils font malades. Toute la douceur qu'ils ont à l'Infirmerie c'eft que leurs paillaffes ne font pas piquées. Il arrive rarement, fi malades qu'ils foient, qu'on leur donne du linge, à moins que la maladie ne foit extraordinaire. Ils ne laiffent pas d'y être gouvernés avec grand foin. Ils y mangent des œufs & de la viande de boucherie: mais on ne leur donne jamais de volaille, ni fruits confits ni fucrés, & lorfqu'un malade paroît en danger de mort, l'Infirmier prépare de la paille & de la cendre fur quoi on le met quand il eft prêt d'expirer. Il n'y a dans l'Eglife ni chandeliers d'argent, ni riche ornement: tout y eft fimple & fe reffent de la pauvreté : les chafubles & les paremens des Autels ne font pas de foïe. Un Crucifix d'Ebeine fur l'Autel & aux deux extremités du contre-Autel, deux plaques de bois, d'où fortent deux branches qui portent deux cierges, en font tout l'ornement. Les étrangers font reçus dans ce Monaftere avec beaucoup de charité, de petits tableaux attachés à la muraille de la Chambre, où on les reçoit d'abord, les inftruisent de la maniere dont il faut fe comporter dans ce faint lieu. Les mets ordinaires qu'on leur préfente font un potage, deux ou trois plats de legumes, un plat d'œufs, & jamais de poiffon, quoique les étangs en foient remplis. On ne leur donne auffi que du cidre, & même le pain que mangent les Religieux.

La réputation que ces faints Solitaires fe font acquife par une vie si auftere & fi penitente, a infpiré au Grand-Duc

Religieux de la Trape

en coule comme ils sont hors du travail

DE SEPIFONS.

de Tofcane Côme III.l'envie d'établir une Maison de cette RELIG EUX même Réforme dans l'Abbaïe de Buon-Solaffo,qui eft dans Fos. fes Etats proche Florence, & qui lui a été accordée par le Pape Clement XI. Il en fit difpofer les lieux à la manière de la Trape, d'où on lui envoïa dix-huit Religieux en 1705. avec la permiffion du Roi. Un de ces Religieux, connu dans le monde fous le nom du Comte d'Avia,Piémontois de naiffance, & qui a fait autrefois une grande figure à la Cour du Duc de Savoye, a été nommé Abbé de cette Maison. Le Frere Arfenne, frere aîné de M. le Marquis de Janfon, & de M. l'Abbé de Janfon, & qui a porté dans le monde le nom de Comte de Rosemberg, est auffi du nombre de ces Religieux.

Marfollier & Maupeou, Vie de l'Abbé de la Trape. Conftitutions de la Trape. Felibien, Defcription de la Trape. Moreri, Dictionnaire Hiftorique. Corneille, Dictionnaire Geographique & Hiftorique.

CHAPITRE I: I.

Des Religieux Bernardins Réformés de Sept-Fons.

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ENDANT que l'Abbé de Rancé travailloit à établir dans l'Abbaïe de la Trape la Réforme dont nous avons parlé dans le Chapitre précedent,& à y faire revivre le premier efprit de Cîteaux, Dieu infpira auffi le même deffein à Dom Eustache de Beaufort, Abbé Regulier de Sept- Fons. Cette Abbaïe fituée dans le Bourbonnois, à fix lieuës de Moulins, Capitale de cette Province, eft auffi de l'Ordre de Câteaux, & de la filiation de Clairvaux. Elle fut fondée par un Duc de Bourbon, & dédiée à la fainte Vierge fous le nom de Nôtre-Dame de faint Lieu. On lui donna le nom de Sept-Fons ou des Sept-Fontaines, à caufe d'un pareil nombre de fontaines qui s'y trouvoient lors de fon établissement, dont il n'en reste plus qu'une qui fournit de l'eau dans tous les offices de la Maifon, & va fe perdre dans un ruiffeau, qui paffant dans le jardin,y forme un grand canal,qui donne fuffifamment de quoi l'arrofer. Son enclos de murs eft d'environ cent arpens. Ce Monaftere ne fut pas exemt du relâchement qui s'infinua dans la plupart des Maifons de cer

RELIGIEUX Ordre, & il tomba dans des defordres qui allerent jufqu'aur DE SEPT fcandale.

FONS.

Il étoit en cet état lorfque Dom Eustache de Beaufort en fut nommé Abbé par le Roi l'an 1654. à la follicitation de fes parens, & à la recommandation du Cardinal Mazarin. Il n'avoit alors que dix-neuf ans, & ne & ne penfoit gueres à la Religion: c'eft pourquoi pour l'engager à le faire confentir à fe faire Religieux (car l'Abbaïe de Sept- Fons a toûjours été en Regle) on fit briller à fes yeux une mitre & une croce. Une vocation fi peu Canonique, eut fes effets ordinaires : car le jeune Abbé donna dans la vanité, le luxe & la moleffe; il fit fon Noviciat & fes vœux à Clairvaux, d'où il partit peu de jours après fa profeffion pour aller étudier à Paris en Theologie. Il ne s'embarraffa pas beaucoup d'approfondir les Mysteres; mais il fe contenta feulement de charger fa memoire de quelques notions fuperficielles. 11 revint à Sept-Fons, où il demeura peu, ne s'accommodant nullement de la folitude, & encore moins de la focieté des Religieux : il alloit ordinairement à Moulins, où il voïoit fouvent les Dames, dont la Compagnie lui étoit plus agréable: en un mot il vivoit d'une maniere peu conforme à fon état. Il reçut les Ordres facrés dans ces difpofitions, & le Sacerdoce fut pour lui un fujet de vanité & d'orguëil, aimant fur tout à fe voir revêtu d'habits Pontificaux. Mais Dieu qui fçait humilier les cœurs les plus fuperbes, le regarda des yeux de fa mifericorde, & le retira non feulement. du danger où il étoit de se perdre,mais encore le choifit pour être l'instrument dont il voulut fe fervir pour la fanctification d'un grand nombre d'ames élues, qui menent dans cette fainte Maison une vie admirable, & qui n'eft pas moins auftere & penitente que celle des Religieux de la Trape.

Ce fut l'an 1663. que fe fit ce changement de la droite du Très haut,qui fe fervit pour cela de M.de Beaufort fon frere, Ecclefiaftique d'une grande vertu, qui aïant été pour lui rendre vifite, fut furpris de l'égarement prodigieux, où l'amour des créatures avoit jetté cet Abbé, & le voïant plongé dans tous les plaifirs que la jeuneffe lui fourniffoit,lui propofa de faire une retraite de quelques jours, afin qu'il pût faire reflexion fur les defordres de fa vie. Il voulut bien même lui tenir compagnie, afin de le fortifier dans les bons

fentimens

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