ab GATION DE leur Maître de s'oppofer à cette union, & ils le firent avec CONGRE tant de force & de vivacité, que les Peres de la Congrega- S.PLACIDE tion de faint Vanne & l'Abbé de faint Hubert ne jugerent pas à propos de pourfuivre cette union, qui n'étoit pas folument neceffaire pour la réforme, puifque l'Abbaïe de faint Hubert avec fes dépendances, pouvoit faire un Corps affez puiffant pour fe maintenir. Ainfi l'union de l'Abbaïe de faint Hubert avec la Congregation de faint Vanne ne se fit point. L'Abbé de faint Hubert eft non feulement Seigneur du lieu; mais il a encore feize villages de fa dépendance. Remacle,qui en étoit Abbé dans le feiziéme fiécle, prétendant jouir des droits de Souveraineté, refufa de comparoître à l'Affemblée des Etats du Luxembourg, qui fe tinrent à l'inauguration de Philippes II. Roi d'Efpagne. Mais le Procureur Général du Confeil de la Province aïant fait faifir fon revenu en confequence de ce refus, & l'Abbé aïant pellé de la faifie au Grand-Confeil de Malines, il y fut condamné, & ne put obtenir la main-levée qu'après avoir ratifié tout ce qui s'étoit fait dans l'Affemblée, & promis d'y comparoître à l'avenir. ap Le bon ordre qui avoit été établi dans l'Abbaïe de faint Hubert, piqua de jaloufie les Abbés de plufieurs autres Monafteres des Païs-Bas, qui ne témoignerent pas moins d'empreffement pour rétablir la Difcipline Reguliere dans leurs Monafteres, que l'Abbé de faint Hubert en avoit fait paroître pour la faire recevoir dans le fien. Entre ces Abbés, Dom François de Buzegnies, Abbé de faint Denis en Hainaut, fut un des premiers qui emploïa tous fes foins pour la réforme de fon Monaftere, & de plufieurs autres des Païs- Bas. Cette Abbaïe de S. Denis fut fondée vers l'an 1081.par Ri childe Comteffe de Flandres,qui y fit venir des Religieux de l'Abbaïe de Sauve-Majour (dont nous avons parlé dans le Tome précedent,c. XXXI. à laquelle elle fut foûmife jufqu'en l'an 1426. que fous l'Abbé Guillaume Daffonville elle fut exemte de fa Jurifdiction moïennannt une fomme d'argent. L'Abbé Dom François de Buzegnies voïant que les Obfervances Regulieres avoient été bannies de fon Abbaïe, auffi-bien que de ces autres Monafteres des Païs-Bas, & voulant y rétablir la Discipline Monaftique, fit venir pour cet effet de l'Abbaïe de faint Hubert Dom Mathias Potier, S. PLACIDE. CONGR pour confulter avec lui & avec l'Abbé de S. Adrien fur les GATION DE moïens dont il falloit fe fervir pour réformer ces Monafteres & les ériger en Congregation, fur le modele de celle de faint Vanne & de faint Hidulphe. Ils commencerent par établir un Noviciat dans les Abbaïes de faint Denis & de saint Adrien avec un fi grand fuccès, qu'à la fin de l'année les deux Communautés d'anciens Religieux renouvellerent leur profeffion avec une ferveur animée par l'exemple de leurs Abbés, qui furent les premiers à faire ce renouvellement de vœux, & à fe foumettre à l'étroite Obfervance des mêmes pratiques qui fe gardoient à faint Vanne, à quelques changemens près qui regardoient le gouvernement des Monafteres, où les Superieurs font toûjours reftés perpetuels. Peu de tems après le célébre Monaftere d'Afflighen embrassa aussi la même reforme. C'étoit autrefois une Abbaïe qui fut fondée l'an 1083. à quatre lieuës de Bruxelles dans le Diocêfe de Cambray en un lieu qui étoit autrefois defert & fervoit de retraite à des voleurs, & qui eft maintenant un des plus agréables de tout le païs. Six de ces voleurs s'étant convertis par les Prédications de Gederic, Moine de Blandiny, bâtirent un petit Monaftere dans ce Defert avec une Eglife qui fut confacrée en l'honneur de S. Pierre par l'Evêque de Cambray. Ils y vêcurent fous la regle de S. Benoît,& fous la conduite de Fulgence qui leur fut donné pour Abbé par le même Prélat. Cette Abbaye acquit tant de réputation en peu de tems, qu'un Gentilhomme nommé Heribrand, avec cinq de fes fils, y prit l'habit, & y donra tous fes biens qui étoient très confiderables, & Angalbert frere d'Heribrand fuivit fon exemple. Les Comtes de Brabant l'ont auffi beaucoup enrichie. Godefroi premier par fes Lettres de l'an 1138. déclara que ce Monaftere aïant été fondé en fon païs, il prétendoit( conjointement avec fon frere le Comte Henri) qu'il fût libre & indépendant,& que pour lui témoigner la fatisfaction qu'il avoit de voir qu'en fi peu de tems il étoit devenu fi fameux, tant par le grand nombre des Religieux que par les exemples de leur fainte vie, il vouloit avoir part à fon agrandiffement, & qu'il avoit réfolu de l'honorer,de le défendre & de l'enrichir le plus qu'il pouroit ; & pour executer ces bonnes volontés,il lui donna plufieurs belles terres & lui accorda beaucoup de franchises & de privileges. S.PLACIDE. Ce Prince voulut auffi être enterré dans cette Abbaïe, & in- CONGREvita fes descendans à faire la même chofe ; fon fils le Comte GATION DE Henri renonçant à toutes les grandeurs de la terre, y prit l'habit de Religion. Godefroi de Bouillon, Eustache & Baudoüin fes freres, qui furent tous trois Rois de Jerufalem, firent auffi de grands biens à ce Monaftere, auffi-bien que leur mere la Comteffe Ide, qui dans un privilege qu'elle lui accorda, appella les Religieux de ceMonaftere fes Seigneurs & freres. Plufieurs autres Seigneurs & Dames l'enrichirent auffi de telle forte, qu'il devint le plus confiderable de tout le Brabant, & fes Abbés avoient la premiere place dans les Affemblées publiques. Il y avoit auffi plufieurs Monafteres tant d'hommes que de filles, de fa dépendance. Mais Philippe II. Roi d'Espagne voulant multiplier les Evêchés & Archevêchés en Flandres, fit ériger par le Pape Paul IV. l'Archevêché de Malines, & pour fon revenu principal lui affigna l'Abbaïe d'Afflighen dont le titre Abbatial fut fupprimé. Ce Monaftere aïant embraffé la Réforme de faint Vanne comme nous avons dit,& aïant fait union avec les Abbaïes de faint Denis en Hainaut, de faint Adrien, & quelques autres des Païs-Bas, on jugea à propos d'affermir cette Réforme par l'érection d'une Congregation fous le nom de faint Placide, à l'imitation des Monasteres de France qui avoient pris faint Maur pour Patron, & à cet effet on obtint des Bulles du Pape Urbain VIII. Cette Congregation s'augmenta enfuite. L'Abbaïe de faint Pierre de Gand étant venuë à vaquer fut donnée par le Roi d'Efpagne à l'Abbé de faint Denis, à condition qu'il introduiroit la Réforme dans ce Monastere ; mais il y a de l'apparence que cette Abbaïe n'entra point dans l'union des Monafteres qui formerent la Congregation de faint Placide, & qu'elle a été toûjours unie avec quelques autres Monasteres de Flandres qui prennent le titre d'Êxemts & dont nous avons parlé en un autre lieu. Voïez les Chroniques Générales de l'ordre de faint Benoit d'Antoine Yepés, traduites par Dom Martin Rhetelois. Tom. 4. chap. II. CONGRE GATION DE BENOÎT. CHAPITRE XXX I X. De la Congregation de CheZal-Benoît, & de la Societé de L Maur. 'ABBAÏE de Chezal-Benoît Chef de la Congregation de ce nom, fut fondée l'an 1098. dans le Diocese de Bourges du tems de l'Archevêque Leger, & eut pour premier Abbé André Religieux de l'Ordre de Vallombreuse, qui fut tiré pour cet effet du Monastere de Corneliac fondé pour des Moines de Vallombreuse, comme nous l'avons dit au Chap.XXVII.du Tom. V. L'Obfervance Réguliere en aïant été bannie dans la fuite, Pierre Dumas qui en étoit Abbé la réforma l'an 1488. en vertu d'une Bulle du Pape Innocent VIII. Guillaume Alabat Abbé de faint Sulpice de Bourges, fit la même chose dans fonAbbaïe, y aïant fait venir exprèsde Chezal Benoît dix-huit Religieux qui y rétablirent les Obfervances Régulieres. Jacques d'Amboife Evêque de Clermont & Abbé de faint Alire de la même ville, voulut auffi réformer cette Abbaïe,& pour cet effet il la réfigna l'an 1500. à Dom Jean de la Roift,qui avoit été auparavant Abbé Régulier de Chezal- Benoît. L'Abbé de faint Vincent, Philipe de Luxembourg, Cardinal & Evêque du Mans, fit embraffer la même Réforme aux Religieux de fon Abbaïe l'an 1501. & l'année fuivante, il réfigna cette Abbaïe à Yves Moriffon Religieux de la même Réforme. Ces quatre Abbés s'affemblerent l'an 1505. dans l'Abbaïe de faint Sulpice avec quatre Religieux Députés de chacun de ces Monasteres pour travailler à la Réforme de l'Ordre; aïant confideré avec quel fuccès la Congregation de fainte Justine de Padouë avoit réformé l'Ordre de faint Benoît en Italie, ils la prirent pour modele & réfolurent de s'unir enfemble pour ne faire qu'un même Corps. Le Cardinal de Luxembourg qui étoit auffi Abbé de faint Martin de Seéz, agregea cette Abbaïe aux quatre autres, & s'en démit pareillement en faveur de la Réforme entre les mains de Dom Jean de Bans & en 1510. la célébre Abbaïe de faint Germain des Prez y fut encore unie par le zele & la pieté de Guillaume Briçoner CH ZAL Evêque de Meaux, qui en étoit Abbé. Mais comme cette CONGRERéforme n'auroit pû subsister sans l'approbation de la Cour GATION DE de Rome, les Superieurs des cinq premiers Monafteres, B1N☺îr. s'étant affemblés l'an 1511. réfolurent de faire confirmer leur union par le faint Siége, ce qu'ils n'obtinrent du Pape Leon X. que l'an 1516. à la priere du Roi François I. Leon X. en érigeant cette Congregation, fupprima les titres des cinq premieres Abbaïes,& ordonna qu'à l'avenir les Abbés ne feroient que triennaux & élus dans le Chapitre Général de la Congregation. La Bulle d'érection fut autorifée par Lettres Patentes du Roi du 19. Mai 1517. qui furent enregistrées au Grand Conseil au mois de Janvier de l'année fuivante 1518. mais ce Prince aïant nommé l'an 1535. le Cardinal du Bellai à l'Abbaïe de faint Vincent du Mans, & ce Prélat en aïant obtenu les Bulles la même année, Dom Jean de Bans qui en étoit pour lors Abbé Triennal, s'opposa à la prife de poffeffion. L'oppofition fut portée au Grand Confeil, où les Religieux interjetterent appel comme d'abus des Bulles obtenuës par le Cardinal du Bellay, & le Procureur Général de cette Cour par ordre du Roi, appella auffi comme d'abus, de la Bulle de Leon X. de l'an 1616. qui en érigeant la Congregation de Chezal-Benoît avoit ordonque les Abbés feroient à l'avenir Triennaux & élus dans le Chapitre Général de la Congregation ; & le Roi déclara en 1542. par fes Lettres Patentes verifiées au Grand Confeil, qu'il n'avoit point intercedé pour la fuppreffion des titres des cinq Abbaïes, & caffa l'Arrêt d'enregistrement de la Bulle de Leon X. comme nul & donné à fon infçu. Il y eut enfin un Arrêt rendu le quatorze Decembre de la même année qui déclara abufive l'élection triennale, & maintint le Cardinal du Bellay dans la possession de l'Abbaïe de faint Vincent du Mans. né Les Religieux de la Congregation de Chezal- Benoît alarmés de cet Arrêt,appréhendant qu'il ne préjudiciât dans la fuite à leur union, eurent recours à la clemence du Roi, qui nomma un Commiffaire pour paffer un Traité en fon nom avec les Religieux : par ce Traité ils acquiefcerent à l'execution de l'Arrêt du Grand Confeil,& reconnurent que le droit de nomination des cinq Abbaïes appartenoit au Roi, qui de son côté confentit que la Bulle de Leon X. fût exe |