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RELIGIEU

Réfectoire commun furent les deux premiers articles de la SES BENE- Réforme, peu à peu quelques-unes des anciennes se joigniREFORME ES rent à celles qui s'y étoient foûmifes les premieres, & l'on DE MONT- commença à voir beaucoup de changement dans ce Monaftere.

DICTINES

MARTRE.

Au mois de Juillet 1599. le Roi accorda encore à M. du Frefne l'Abbaïe de faint Pierre de Lyon pour une de fes fœurs. Il l'offrità l'Abbeffe de Montmartre, croïant lui rendre fervice, en la tirant d'une maifon ruinée pour l'établir dans une autre riche & magnifique ; mais après avoir confulté le Seigneur, elle connut que fa volonté étoit qu'elle réformât le Monaftere de Montmartre: ainfi elle préfera l'execution de la volonté de Dieu à fa propre fatisfaction. L'année fuivante qui étoit celle du Grand Jubilé, elle demanda au Pape Clement VIII. la permiffion d'élire un Vifiteur pour fa Communauté, en rompant l'affociation contractée avec fix Maisons toutes ennemies de la Réforme, sans le confentement defquelles on ne pouvoit rien faire. M. de Silleri étoit pour lors Ambaffadeur à Rome,où il auroit pu traverfer cette affaire aïant une tante & deux coufines germaines à Montmartre ; mais elle fut conduite avec tant de fecret qu'il n'en eut aucune connoiffance: l'Abbeffe obtint du Pape un Bref qui lui donnoit pouvoir de réformer fa Maison & d'élire fon Vifiteur en particulier, indépendemment des autres Monasteres defquels il lui permettoit de fe féparer. Elle n'envoïa exprès perfonne à l'élection du nouveau Vifiteur des fix Maifons affociées,afin de perdre fon privilege, ce qui fut un nouveau fujet de murmure parmi fes filles; mais elles furent bien furprifes lorfqu'on leur fit la lecture du Bref du Pape elles curent pour lors un peu plus de refpect pour l'autorité de leur Superieure, & l'on vit plus de difpofition à la Réforme qu'il n'y en avoit eu jufqu'alors.

L'Abbeffe n'avoit pas voulu fe faire benir pendant tous les troubles & les inquiétudes caufées par la réfiftance & l'obstination de fes Religieufes mais prévoïant qu'ils s'appaiferoient dans peu, elle s'y prépara par la retraite, l'Oraifon & la Confeffion Générale de tous les pêchés de fa vie. La cérémonie fe fit le Dimanche dans l'Octave des Rois: elle fut benite par le Cardinal de Sourdis, & le Pere Angede Joïeufe y prêcha. Depuis ce jour-là elle redoubla fon zele,

croïant

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croïant qu'elle étoit obligée plus que jamais, de travailler à RELIGIE la Réforme de fon Abbaie. Peu après elle reçut trois filles à SES BINE qui elle donna l'habit, dont l'une étoit pour le Chour & les RIFORME TS

deux autres Converses.

Les Religieufes de Montmartre portoient pour lors des habits blancs comme les Chanoineffes; mais l'Abbeffe pris le noir & le donna à celles qui confentirent à ce changement, ce qui fut contesté à l'ordinaire par les anciennes qui en firent leurs plaintes au Cardinal de Retz: ce qui obligea cette Eminence d'envoïer fon Grand Vicaire pour appaiser ces troubles, en ordonnant à l' Abbeffe de ne rien faire de nouveau contre l'ufage de la Communauté, ne voulant pas que l'habit fût different entr'elles. Elle répondit avec affez de fermeté qu'elle étoit refoluë d'obéïr à fes ordres, pourveu qu'ils ne fuffent pas oppofés aux voux effentiels. En effet elle reprit l'habit blanc,non pas de la maniere que fes Religieufes prétendoient: car elle fe revêtit d'une groffe ferge de laine blanche naturelle fans avoir été blanchie au foulon, avec un furplis de toile pareillement groffiere; de forte que les autres qui cherchoient la vanité dans leurs étoffes bien blanches & dans leurs furplis de toile fine & empefée, furent remplies de confufion, & fe virent contraintes de refter à l'Infirmerie, où elles fe paroient avec de longs manteaux de futaine blanche attachés avec des rubans de couleur, n'ofant pas paroître en cet équipage en préfence de leur Abbeffe & des autres Religieufes dont la fimplicité faifoit honte à leur ambition & à leur vanité.

Deux des anciennes qui étoient les plus oppofées à l'Abbeffe s'étant dans la fuite reconciliées parfaitement avec elle, les autres fuivirent bien-tôt leur exemple, de forte qu'en deux années de tems la Réforme fur prefque établie dans Montmartre. 11 fe préfenta un fi grand nombre de filles pour y être reçues, que pendant près de foixante ans que Marie de Beauviliers en a été Abbeffe on prétend qu'elle a donné l'habit à deux cens vingt-fept filles par ce moïen & par bonne conduite des Abbeffes qui lui ont fuccedé, dont il y a eu des Princesses de la Maifon de Lorraine, cette Abbaïe eft devenue une des plus puiffantes & des plus riches du Roïaume. Enfin cette pieufe Abbeffe eut la confolation de voir toutes les anciennes qui l'avoient tant fait fouffrir, se S£

Tome VI.

:

la

DICTINES

DE MONT-
MARTRE

RELIGIEU- profterner à fes pieds pour lui demander d'être traitées comSES BENE- me les autres, en renonçant à toute proprieté, & voulant REFOR- fuivre la Regle de faint Benoît exactement: ainfi elle n'eut plus de peine à pourfuivre la Réforme.

DICTINES

MEIS DE

MONT

MARTRE,

pas

L'Abbeffe de Beaumont fa tante avoit puiffamment travaillé pour la faire nommer fa Coadjutrice, elle en obtint enfin le Brevet du Roi & la confirmation en Cour de Rome. Il étoit porté dans les Bulles qu'elle ne feroit point obligée de quitter l'Abbaïe de Montmartre que fix mois après la mort de l'Ab• beffe de Beaumont ; de forte qu'elle porta cinq ans la qualité de Coadjutrice avec celle d'Abbeffe, & pendant ce temslà elle fit travailler aux bâtimens de Montmartre ; en quoi elle fut aidée par M. de Frefne fon beau-frere qui donna encore deux mille écus pour fermer un clos de vignes qui étoit entre le Monaftere & la Chapelle des Martyrs; mais il n'eut la fatisfaction de voir cet ouvrage achevé étant mort en l'année 1610. Il ordonna par fon Teftament que fon corps seroit porté à Montmartre,où il laissa encore trois cens trente quatre livres de rente, & 2000. livres en argent comptant, pour faire prier Dieu pour le repos de fon ame. On trouva dans fon cabinet le deffein d'un bâtiment qu'il vouloit faire à la Chapelle des Martyrs, & qu'il auroit executé,fi la mort ne lui en eût pas ôté le pouvoir; mais Madame de Fresne sa veuve suivit les intentions quelques années après,& contribua à la fondation d'un nouveau Monaftere attenant cette Eglife des Martyrs, auquel elle donna deux mille fept cens livres de rente pour la nourriture de dix Religieufes, à condition que l'Abbeffe fa four fourniroit le même nombre, & que cette Eglife seroit toujours desservie par vingt Religieufes.

Jufqu'à ce tems-là, on avoit porté l'habit blanc dans la Maifon avec un furplis comme nous avons dit ; mais l'Abbeffe écrivit à Rome & obtint du Pape un Bref pour prendre l'habit noir, ce qui fe fit fans aucune contradiction, non feulement parce que toutes les anciennes étoient décédées, mais encore par la profonde foumiffion que la Communauté avoit pour fes ordres. Elle s'acquit une fi grande eftime au dehors que plufieurs Monafteres de France qui défiroient embraffer la Réforme lui demandoient fes avis & s'eftimoient heureux d'avoir des filles élevées de fa main,pour les

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